Le Conflit (64) Europe Occidentale (30)

La Campagne de Belgique (3) : Résiste et mord : les Ardennes s’embrasent

Comme nous l’avons vu jadis les belges n’avaient pas prévu à l’origine de défendre les Ardennes mais voulaient en faire une «zone morte» à savoir multiplier les destructions pour rendre extraordinairement pénible toute avancée allemande.

Ces destructions devaient être réalisées par le génie avec pour couverture un corps d’infanterie de recrutement local, le corps des chasseurs ardennais. Une fois les destructions réalisées les «Diables Verts» devront se replier sur la ligne KW.

Cette décision ne fait pas les affaires de la France qui estiment que les Ardennes pourraient servir de voie d’accès entre les éléments du GA n°1 engagés en Belgique et la partie puissante de la ligne Maginot.

Certes le maréchal Pétain avaient dit que les Ardennes étaient infranchissables mais le général Villeneuve était loin de défendre cette position estimant que dans l’histoire on à perdu nombre de batailles avec ce genre de fadaises. Quand on lui parlait des fameuses destructions, il disait que des destructions non battues par le feu ne servaient à rien ce en quoi il avait parfaitement raison.

La Belgique étant officiellement neutre il était impossible de demander aux belges de défendre les Ardennes si Bruxelles avait décidé le contraire. Il fallu un lent et patient travail d’influence et la promesse d’une aide directe pour pousser la Belgique à changer de stratégie.

Durant la Pax Armada les belges décident de créer deux divisions de chasseurs d’ardennais regroupées au sein d’un corps d’armée des Ardennes. Les fortifications frontalières avec le Luxembourg sont renforcées, Paris comme Bruxelles sachant parfaitement que le Grand-Duché n’avaient aucune chance de résister durablement aux allemands faute de moyens.

Les chasseurs ardennais vont devoir résister le plus longtemps possible avec l’espoir de recevoir rapidement l’aide française, le général Villeneuve promettant l’envoi d’au moins une division d’infanterie, une brigade de spahis, un groupement de reconnaissance de corps d’armée et un bataillon de chars de combat de quoi tenir plusieurs jours pour éviter aux allemands la tentation de passer par les Ardennes et de prendre à revers des troupes alliées profondément engagées en territoire belge.

Le massif ardennais va donc être défendu par le 1er Corps d’Armée des Ardennes (1er CAA) avec les deux divisions de chasseurs ardennais, la 1ère et la 2ème Division des Chasseurs Ardennais qui sont organisées de la façon suivante :

-Un état-major

-Un bataillon renforcé de soutien logistique

-Une compagnie de transmissions

-Un bataillon du génie

-Une compagnie cycliste

-Une compagnie de huit chars légers T-17

-Trois régiments d’infanterie (1er, 2ème et 3ème régiments de chasseurs ardennais pour la première, 4ème 5ème et 6ème régiments de chasseurs ardennais pour la seconde)

-Un régiment d’artillerie légère disposant de canons de 75mm Bofors modèle 1934.

Le 1er CAA dispose de moyens de reconnaissance (un escadron de cavalerie et un escadron motocycliste), de moyens de génie (un bataillon), de soutien logistique et d’artillerie lourde avec un bataillon d’obusiers lourds.

S’appuyant sur leur connaissance fine du terrain, s’appuyant sur des petits blockhaus dispersés mais dont les feux se croisaient, le 1er CAA se sent capable de tenir deux à trois jours sans aide extérieure.

L’annonce de l’arrivée rapide des troupes françaises permet au général Dulliers d’espérer tenir cinq à six jours avant un repli vers l’ouest ou vers le sud.

La France dès le 10 mai 1949 va envoyer des troupes dans les Ardennes belges, unités placées sous commandement belge ce que Bruxelles appréciait car cela était vue comme une réelle marque de confiance. C’est le début d’une véritable fraternité d’armes franco-belge.

Les premières unités françaises engagées sont logiquement des unités montées et des unités motorisées. La 3ème Brigade de Spahis franchit la frontière en début d’après midi pour se porter sur la frontière belgo-luxembourgeoise et soutenir les chasseurs ardennais qui résistent admirablement aux troupes allemandes du 22.ArmeeKorps (22.AK).

Cette brigade possédait trois régiments de spahis, les 1er, 2ème et 3ème régiments de spahis algériens, des régiments organisés en un état-major, un peloton de commandement, un escadron hors rang, un escadron de mitrailleuses et d’engins (quatre canons de 25mm, huit mitrailleuses et quatre mortiers de 60mm) et deux groupes de deux escadrons, chaque escadron disposant d’un état-major, d’un peloton de commandement et quatre pelotons de spahis.

Cette brigade ne possédait pas d’artillerie organique car la 3ème BS devait initialement devenir soit une division de cavalerie montée ou une division mécanisée.

En septembre 1948 cette brigade était toujours là mais ne dispose pas de moyens d’appui. C’est donc l’artillerie belge qui va soutenir les spahis qui se montrent de redoutables combattants à pied, les cavaliers algériens combattant comme des dragons.

Dans la foulée des spahis, c’est le 3ème GRCA (3ème Groupement de Reconnaissance de Corps d’Armée) qui entre en Belgique avec ses vingt Hotchkiss H-39, vingt-huit AM modèle 1940P et son escadron de fusiliers motocyclistes.

Ce groupement intervient un temps pour soutenir dans le sud des Ardennes une contre-attaque des chasseurs ardennais destiné à rejeter au Luxembourg les troupes allemandes qui doivent faire face au tir précis de l’artillerie française notamment celle du 3ème Corps d’Armée (102ème RALT et 361ème RALP disposant chacun deux groupes de 105L modèle 1936S et deux groupes de 155 GPF-T).

Le lendemain 12 mai 1949 alors que la pression allemande s’accentue, le 16ème BCC franchit la frontière franco-belge en compagnie des premiers éléments de la 18ème Division d’Infanterie (18ème DI).

Ce 16ème Bataillon de Chars de Combat dispose de 45 Renault R-40, un char léger armé d’un canon de 37mm, une évolution du R-35 en terme d’armement (canon plus long mieux adapté au combat antichar) et de mobilité. Néanmoins ce petit char est plus fait pour soutenir l’infanterie que pour contrer une attaque de blindés.

La 18ème DI est une division de mobilisation, une division de série A soit des conscrits récemment démobilisés. Elle est organisé de la façon suivante :

-Un état-major et des unités de soutien

-618ème Batterie Divisionnaire Antichar (618ème BDAC) disposant de douze canons antichars de 47mm

-618ème Bataillon de Défense Antiaérienne (618ème BDAA) disposant de quarante-huit canons antiaériens, une batterie montée pour douze canons de 25mm, deux batteries remorquées de douze canons de 25mm et une batterie montée de douze canons de 37mm.

-70ème Bataillon du Génie (70ème BG) :

-Trois régiments d’infanterie de ligne (66ème, 77ème et 125ème RI)

-Deux régiments d’artillerie (19ème RAD et 219ème RALD) disposant pour le premier de canons de 75mm TAZ modèle 1939 (trois groupes), le second disposant de deux groupes d’obusiers de 105mm modèle 1935B et d’un group de canons de 155mm Schneider modèle 1946.

L’engagement de cette division est appuyé par le 30ème Groupement de Reconnaissance de Division d’Infanterie (30ème GRDI) qui comprend des chars légers FCM-42, des automitrailleuses puissantes AM modèle 1940P et des fusiliers motocyclistes.

Les autres unités du 3ème Corps d’Armée passent en Belgique mais restent sous commandement français comme un deuxième rideau. Outre les unités d’artillerie citées plus haut, on trouve la 5ème DIM (5ème Division d’Infanterie Motorisée) et le 1er GRDI (20 FCM-42, 28 AM modèle 1940P et fusiliers motocyclistes).

Ce déploiement est couvert par le GAO n°503 (huit MB-175, douze Dewoitine D-720 et quinze ANF-Les Mureaux ANF-123) et par un détachement fournit par la 1ère Escadre de Chasse (1ère EC) à savoir des Arsenal VG-33 et des Bréguet Br700C2.

Très vite le GRAVIA-IXA va engager des moyens d’attaque, d’assaut et de bombardement pour soutenir les troupes au sol franco-belges. Rappelons que le Groupement d’Aviation de la 9ème Armée disposait des unités d’attaque suivantes :

-Un groupe de bombardement en piqué, le GBp II/40 volant sur Loire-Nieuport LN-430

-Un groupe de bombardement d’assaut, le GBA I/51 volant sur Bréguet Br691 et 693

-Un groupe de bombardement médian, le GB III/12 volant sur Lioré et Olivier Léo 451

-Un groupe de reconnaissance, le GR III/35 volant sur Bloch MB-176

En face les allemands engagent le 22.ArmeeKorps (8.Armee) qui dispose des unités suivantes :

-Unités d’appui et de soutien : un régiment d’artillerie lourde de corps d’armée (trois bataillons de 150mm), un bataillon du génie, un bataillon de soutien logistique, un bataillon de reconnaissance de corps d’armée (Aufklärung Abteilung avec autos blindées et chars légers Panzer II Luchs)

-58ème division d’infanterie (58. InfanterieDivision)

-60ème division d’infanterie (60. InfanterieDivision)

-62ème division d’infanterie (62. InfanterieDivision)

Le 22ème Corps d’Armée peut bénéficier de l’aide de la Luftwaffe qui va détacher des unités de chasse, de bombardement et de reconnaissance en l’occurence celles du XV.FliegerKorps :

On trouve tout d’abord six gruppen de chasse :

-I. II. III./JG-27 : Messerschmitt Me-109F

-IV./JG-53 : Focke-Wulf Fw-190A

-I. et II./JG-77 : Messerschmitt Me-109F

On trouve ensuite trois gruppen de chasse lourde , les trois gruppen de la Zerstörergeschwader 2 en l’occurence les II./ZG-2, III./ZG-2 et IV./ZG-2, trois groupes volant sur Messerschmitt Me-110D

-On trouve également neuf gruppen d’attaque et de bombardement

-II./Kpfg-2 : Dornier Do-217

-III./Kpfg-2 : Dornier Do-217

-II./Kpfg-53 : Heinkel He-111

-I./Kpfg-4 : Dornier Do-217

-IV./Kpfg-41 : Focke-Wulf Fw-190D (chasse-bombardement)

-I./Kpfg-42 : Focke-Wulf Fw-190D (chasse-bombardement)

-II./Kpfg-45 : Focke-Wulf Fw-190D (chasse-bombardement)

-II./Kpfg-46 : Henschel Hs-129

-II./Kpfg-47 : Heinkel He-179

-On trouve également deux gruppen de bombardement en piqué en l’occurence les IV./Stkpfg-1 et IV./Stkpfg-2 volant respectivement sur Ju-87D et Ju-87B.

-Un gruppen de reconnaissance, l’Aufklärunggruppe 122  : Focke-Wulf Fw-189 et Fieseler Fi-156

-Un groupe de transport, le III./TransportGeschwader 3 volant sur Junkers Ju-52/3m

Les troupes françaises sont toutes déployées le 13 mai 1949 sous les ordres du 1er CAA (parfois appelé Corps d’Armée Franco-Belge mais de manière informelle uniquement) ce qui rebooste des chasseurs ardennais passablement fatigués par deux jours de combat. Les allemands eux aussi souffrent mais peuvent engager des renforts venant d’autres corps d’armée.

Les combats au sol sont violents, les alliés pratiquant la «défense élastique» avec un repli tactique pour regroupement, des contre-attaques pour bousculer l’allemand, ne lui laisser aucun répit, user l’ennemi par un combat de tout les instants.

L’artillerie française montre qu’elle reste toujours une référence mondiale avec un tir précis, un tir d’autant plus dévastateur qu’aux éclats d’obus s’ajoutent les éclats du bois des arbres détruits. Aux pièces du 3ème CA s’ajoutent également les canons de la ligne Maginot notamment les régiments d’artillerie du Secteur de Longwy qui pilonnent le Luxembourg pour géner les mouvements allemands.

Dans les airs les combats sont violents mais moins que plus au nord, les deux belligérants étant génés par le terrain _accidenté et forestier_ et par une météo capricieuse. Les bombardements sont peu efficaces mais la chasse qu’elle soit allemande ou française se montre redoutable. De nombreux avions sont abattus et régulièrement des épaves ou plutôt des morceaux d’épave sont retrouvés par des chercheurs ou par des promeneurs.

Les franco-belges se montrent héroïques mais fatiguent. Le 20 mai 1949 ils reçoivent l’ordre de se replier sur la France. Ils doivent prolonger sur le territoire hexagonal la ligne KW sur lesquels les franco-anglo-belges se sont peu à peu repliés.

Pour faciliter le repli et éviter que la retraite ne tourne à la panique le général Villeneuve à décidé dans le plus grand secret de déployer un corps d’armée de la Réserve Stratégique, le fameux dispositif NorBourg (Normandie-Bourgogne).

Ce corps d’armée c’est le 32ème Corps d’Armée (32ème CA) qui commence à se déployer à partir du 14 mai pour être en position le 19 pour la quasi-totalité des éléments du dit corps d’armée qui sont les suivants :

-632ème Régiment de Pionniers (632ème RP)

-32ème Groupement de Reconnaissance de Corps d’Armée (32ème GRCA) disposant de chars légers AMX-42, d’automitrailleuses de découverte (les fameuses «Pan-Pan») et de fusiliers motocyclistes

-145ème Régiment d’Artillerie Lourde Hippomobile (145ème RALH) disposant de deux groupes de 105mm équipés de canons de 105L modèle 1941T et de deux groupes de 155mm disposant de canons de 155L modèle 1945S.

-Des unités du génie, du train, des transmissions, de l’intendance et du service de santé

-Groupe Aérien d’Observation n°532 (GAO-532) : huit Bloch MB-176, douze Dewoitine D-720 et de quinze ANF-Les Mureaux.

-77ème Groupement de Reconnaissance de Division d’Infanterie (77ème GRDI) : disposant de chars légers AMX-42, d’automitrailleuses de découverte et de fusiliers motocyclistes

-7ème Division d’Infanterie Coloniale (7ème DIC) : Cette division dispose d’un régiment d’infanterie coloniale (7ème RIC), de deux régiments de tirailleurs sénégalais (20ème et 25ème RTS); de deux régiments d’artillerie (15ème RAC et 215ème RALC), de la 607ème Batterie Divisionnaire Antichar coloniale, du 607ème Bataillon de défense antiaérienne coloniale, du 104ème bataillon du génie et de diverses unités de soutien.

-4ème Groupement de Reconnaissance de Division d’Infanterie Polonais (4ème GRDIPol) : disposant d’autos blindées Daimler Dingo en attendant la livraison de chars légers sans que l’on connaisse à l’époque le modèle.

-4ème Division d’Infanterie Polonaise (4ème DIP) : Cette division dispose de trois régiments d’infanterie, les 10ème 11ème et 12ème RIP; de deux régiments d’artillerie (4ème RAPol et 204ème RAPol), de la 604ème Batterie Divisionnaire Antichar polonaise, du 604ème Bataillon de défense antiaérienne polonais, du 105ème bataillon du génie et de diverses unités de soutien.

Avec ce solide comité d’accueil les unités franco-belges peuvent se replier couverts par l’aviation et par l’artillerie qui déclenchent le feu de Wotan pour empêcher les troupes allemandes de profiter de la retraite pour pénétrer en France.

La retraite commence dans la nuit du 20 au 21 mai avec la 18ème DI et la 3ème brigade de spahis suivis par le 3ème GRCA, le 30ème GRDI et le 16ème BCC fermant la marche avec les chasseurs ardennais qui estimaient devoir partir les derniers.

Ces combats ont laissé des traces. C’est ainsi que la 3ème Brigade de Spahis littéralement saignée à blanc est retirée du front pour repos et transformation en unité motomécanique pour un emploi ultérieur.

Le 3ème GRCA à lui aussi souffert mais est maintenu en arrière du front pour recevoir de nouveaux véhicules à savoir des AMX-44 en remplacement des Hotchkiss H-39, des automitrailleuses puissantes AM modèle 1940P et de nouvelles motos pour les fusiliers motocyclistes.

Ces véhicules sont certes différents mais le personnel est compétent, expérimenté et motivé ce qui facilite la prise en main des nouveaux véhicules. Les autres sont renvoyés vers le sud par voie ferrée pour révision afin de savoir si ils peuvent être réutilisés ou si ils devaient être envoyés à la ferraille après avoir été privé de toutes pièces réutilisables.

La 18ème DI moins entamée est conservée en réserve de corps d’armée tandis que le 16ème BCC reçoit de nouveaux Renault R-40 issus des immenses stocks accumulés durant la Pax Armada. Même chose pour le 30ème GRDI qui reçoit de nouveaux véhicules en remplacement des véhicules détruits.

Le 3ème Corps d’Armée reprend sa position mais sa composition change. Suite à un accord franco-belge, la 1ère division de chasseurs ardennais remplace la 18ème DI aux côtés de la 5ème DIM.

C’est donc ce dispositif (3ème CA, 4ème CA, 21ème et 32ème CA) qui va tenir avec la 2ème Armée la frontière française et faire la jonction entre les unités engagées sur la ligne KW et le GA N°2 pour l’instant épargné par l’offensive allemande.