Le Conflit (225) Méditerranée (5) (1ère partie)

Pour prendre pied dans le nord de l’île les français choisissent l’embouchure de la rivière Coghinas, un endroit où un débarquement était attendu mais qui est pourtant mal défendu. Ce paradoxe s’explique probablement par le fait que c’était tellement attendu que ce serait finalement inattendu que l’ennemi prenne pied ici. Inutile de préciser que les italiens vont s’en mordre rapidement les doigts.

Le dispositif naval français comprend les moyens suivants :

-Cuirassé Bretagne (navire-amiral)

-Croiseur lourd Algérie

-Croiseur léger Jean de Vienne

-Contre-torpilleurs Aigle et Vauquelin

-Torpilleurs d’escadre L’Eveillé et L’Alerte

-Torpilleurs légers Kabyle et Tonkinois

-Chalutiers armés La Toulonnaise et La Sétoise

-Des sous-marins sont déployés en sentinelle à l’entrée du Golfe d’Alsinara (L’Hermione Belle Ile) et près de La Maddalena (Cornélie Ile d’If)

-Ravitailleur rapide Tarn

-Remorqueurs Aconit et Edelweiss venus de Toulon

Le transport des troupes engagées (83ème DIA 83ème GRDI 64ème BCC) est assuré par les cargos Charles LD Diderot Finistere Etang de Thau, le paquebot Côte d’Albatre. Le pétrolier Roxane assurer le ravitaillement en carburant nécessaire pour les véhicules engagés dans l’opération.

11 octobre 1948 à l’aube, le temps est frais mais il n’y à ni pluie ni vent. L’artillerie navale ouvre le feu sur les défenses côtières déjà passablement malmenées par l’aviation depuis plusieurs jours. Le croiseur lourd Algérie détaché de la 2ème Escadre est le premier à entrer dans la danse avec ses huit canons de 203mm.

Il est suivi par le cuirassé Bretagne et enfin par le croiseur léger Jean de Vienne. Ce sont donc huit canons de 203mm, huit de 340mm et neuf de 152mm qui vont tirer respectivement 124, 72 et 204 projectiles donnant à la zone du débarquement un aspect lunaire rappelant le premier conflit mondial.

Au delà des dégâts directs _un dépôt de munition est par exemple touché par un obus de 340mm avec les conséquences faciles à imaginer_ c’est la panique et la confusion provoquées qui vont faire le jeu des troupes françaises qui vont prendre pied couverts par l’aviation venant de Corse qui va se charger d’appuyer et de protéger les tirailleurs algériens. L’artillerie navale continue son tir mais la marine allonge son tir pour éviter les tirs fratricides et surtout bloquer l’arrivée d’éventuels renforts italiens.

Au délà de la légitime confusion d’une opération réelle, au delà de l’inexpérience des troupes françaises en terme de débarquement, la mise à terre se passe bien.

Les derniers points de résistance ennemis sont vite neutralisés, la tête de pont est peu à peu élargie et dès la fin de matinée, le haut-commandement autorise la mise à terre des moyens motomécaniques.

Ce sont d’abord les Panhard AMD-178B («Pan Pan») qui sont mises à terre via un système de plate-formes sur lesquelles sont déposées plusieurs véhicules.

Elles sont ensuite tractées par des remorqueurs venus de Toulon, les Aconit et Edelweiss. Ce ne sont pas encore les chalands de débarquement mais c’est une première méthode plutôt efficace.

Ces automitrailleuses vont aider les Turcos à briser une contre-offensive de la 12ème DI et quand cette dernière lancera une nouvelle attaque à la tombée de la nuit (dans l’espoir d’échapper aux fourches caudines de l’artillerie de marine et de l’aviation), les AMD à canon de 25mm étaient accompagnés de chars légers Hotchkiss H-39. Autant dire que face à des canons de 25mm et de 37mm long c’était pour ainsi dire perdu d’avance.

Etrangement les italiens n’ont pas engagé leur compagnie de chars M-15/42 stationnée sur leur base navale installée à La Maddalena. Ils craignaient peut être un assaut direct sur la base ou alors qu’avec un ciel dominé par l’ennemi ils ne pourraient pas la déplacer sans souffrir de pertes importantes.

Quand elle sera engagée le lendemain (après un transbordement acrobatique en pleine nuit), elle sera attendue par les chars Hotchkiss H-39 et Renault R-35 mais aussi par des Turcos solidement retranchés disposant de canons antichars de 47mm qui transformèrent les blindés italiens en torches.

Après trois jours à sécuriser leur tête de pont, les troupes françaises mettent cap sur le nord-est direction la base navale de La Maddalena. La base navale italienne est défendue mais plus symboliquement qu’autre chose.

Elle tombe le 17 octobre, les installations largement endommagées par les combats et des sabotages, des navires y sont sabordés mais beaucoup se sont refugiés en Italie péninsulaire.

La DIA qui à subit peu de pertes se réorganise pour avancer vers le sud et rejoindre les forces venues des autres têtes de pont. On surveille avec attention une possible réaction italienne par exemple un coup de main venu d’Italie mais elle ne viendra jamais.

Le dispositif naval est allégé et seuls le croiseur léger Jean de Vienne, les contre-torpilleurs Aigle et Vauquelin, les torpilleurs légers Kabyle et Tonkinois restent ce qui suscitera une certaine inquiétude en cas d’intervention massive de la flotte italienne.

Ce groupe occasionnel baptisé Groupe S va tirer contre terre et surveiller l’arrivée éventuelle de renforts italiens. Quels navires légers tenteront leur chance, certains passeront mais d’autres seront envoyés par le fond.

Et les autres navires ? Le cuirassé Bretagne et ses torpilleurs d’escorte vont retrouver le porte-avions Commandant Teste, le croiseur lourd Algérie rentre à Toulon. Les navires de soutien vont faire relâche en Corse en attendant la suite des événements.

Les navires de charge vont d’abord rester au mouillage donc relativement à l’abri des éléments mais ils ne peuvent rester à l’arrêt indéfiniment.

Non seulement cela en fait une cible intéressante pour l’aviation mais en plus leur immobilisation prive les alliés d’une précieuse capacité de transporrt.

Le 21 octobre 1948 les aviso-dragueurs La Gracieuse et La Moqueuse accompagnés par les chasseurs de sous-marins CH-43 et CH-44 arrivent dans le nord de la Sardaigne pour les ramener d’abord à Ajaccio puis à Toulon pour d’autres opérations de transport, certains se prenant à rêver d’un débarquement à Civitavecchia du côté de Rome ! Hélas pour ces audacieux un tel projet n’à jamais été sérieusement étudié par les état-majors alliés.

Il faut deux jours pour tout verouiller, tout organiser, se mettre d’accord sur les règles d’engagement et les attitudes en cas de torpillage ou de naufrage.

Les navires de charge sont organisés sur deux colonnes : la première se compose du paquebot Côte d’Albatre, des cargos Charles LD et Diderot alors que la seconde située à gauche de la première se composait du Finistere Etang de Thau et du pétrolier Roxane.

La protection est assurée par l’aviso-dragueur La Moqueuse qui ouvre la route et par La Gracieuse qui sert de «voiture-balai», la protection des flancs étant assurée par les chasseurs de sous-marins CH-43 et CH-44.

Le convoi appareille le 24 octobre du Golfe dell Asinara direction Ajaccio, le tout couvert par hydravions de chasse Dewoitine HD-780 de la 24C et surtout des hydravions de patrouille maritime Bréguet Br790 de la 23E.

Malgré ces précautions, tous les navires ne parviendront pas en Corse. Le Charles LD est foudroyé quelques heures après son appareillage par le sous-marin italien Berillo en embuscade. Ce dernier lance trois torpilles. Si l’une d’elle se perd, les deux autres foudroyent le cargo qui coule rapidement.

La riposte française ne se fait pas attendre. Un Bréguet Br790 ayant repéré les sillages des torpilles et alerté le convoi se lance dans la traque de l’importun bientôt suivit par La Gracieuse détaché de l’escorte du convoi non sans inquiéter le commandant de ce dernier.

Après plusieurs heures de traque, le sous-marin italien disparaît définitivement dans un bouillonement d’écume, d’huile et d’essence.

Quelques heures avant l’arrivée à Ajaccio, le pétrolier Roxane s’échoue à l’entrée du port suite à une avarie de machine. Le navire est allégé au maximum pour permettre à deux remorqueurs de le remettre à flot.

La tentative menée le 1er novembre sera un échec, le pétrolier se casse en deux, l’avant coulant et l’arrière étant sauvé par un remorqueur. Cela ne changera rien, les deux éléments seront finalement envoyés à la casse, l’espoir de le reconstruire ou de le transformer en citerne flottante disparaissant rapidement.

Des unités aériennes venant de Corse vont également s’installer dès le 20 octobre notamment un groupe de chasse venu de Corse et volant sur Dewoitine D-520 et une partie de la 63ème EBLg, ses bimoteurs Glenn-Martin 167F et 187F étant utilisés comme bombardiers mais également comme chasseurs lourds !

Les Turcos continuent leur avancée, ralentis davantage par le climat, le terrain que par la résistance italienne qui varie du lamentable à l’exceptionnel. Cela dépendait beaucoup du chef de corps, de sa volonté et de son intelligence.

Dès le 24 octobre, les troupes venues de la tête de pont POURPRE font leur jonction avec les troupes venues de la tête de pont BLEUE.

La zone de débarquement bleue n’était pas prévue initialement. Elle s’est ajoutée pour éviter un trop grand écart entre les deux têtes de pont initialement prévues. Sur le plan naval elle comprend les moyens suivants :

-Croiseur de bataille Strasbourg (navire-amiral)

-Croiseur lourd Charles Martel

-Croiseur léger La Marseillaise

-Contre-torpilleurs Tartu et Le Terrible

-Torpilleurs d’escadre Lansquenet et Fleuret

-Avisos-dragueurs Chamois Gazelle Commandant Rivière

-Ravitailleur d’hydravions Sans Reproche

Cargo rapide Oran

-Deux remorqueurs civils réquisitionnés, Petite Mouette et Sylvestrie

-Cargos Leopold LD Ange Schiaffino Charles Le Borgne

-Transport de Troupes Kita et Belle Province

-Pétrolier Etoile du Désert

-Les unités terrestres engagées sont la 82ème Division d’Infanterie d’Afrique (82ème DIA), le 5ème Régiment de Chasseurs d’Afrique (5ème RCA) disposant du même équipement que le 2ème REC et le 66ème BCC équipé de Renault R-35.

Le 11 octobre à l’aube, le croiseur de bataille Strasbourg ouvre le feu avec ses huit canons de 330mm. Il est bientôt suivit par le croiseur lourd Charles Martel avec ses neuf canons de 203mm.

Le tir est plutôt précis même si les défenses italiennes ne seront pas forcément écrasées comme l’espérait les planificateurs à croire que les leçons du premier conflit mondial sur les limites de la préparation d’artillerie n’avaient pas été retenues.

La couverture aérienne est assurée par des hydravions de chasse Dewoitine HD-780 de l’escadrille 24C venue d’Ajaccio-Aspretto ce qui explique la présence d’un ravitailleur d’hydravions parmi les navires de soutien. Cette précaution va se révéler inutile, l’aviation italienne n’intervenant pas dans le secteur.

Les tirailleurs algériens du 6ème RTA et les zouaves du 1er RZ sont rapidement mis à terre par les navires de charge sous la couverture de la flotte qui allonge son tir pour tenter de réaliser un tir de barrage étanche.

Quelques contre-attaques sont bien menées par des chemises noires et des carabiniers mais mal soutenus par des moyens motomécaniques fort limités et surtout victimes de l’aviation et de l’artillerie de marine, les italiens ne peuvent que s’enterrer dans l’espoir d’échapper au feu de Wotan français.

Dès le 12 au matin, la tête de pont est considérée comme non seulement sécurisée mais également impossible à réduire dans l’immédiat. Aussitôt l’ordre de mettre à terre les AMD-178B du 5ème RCA est donné.

Comme plus au nord ce sont des plate-formes construites en Afrique du Nord qui vont être utilisées sauf que cette fois elles vont être assemblées pour former une plate-forme reliant les navires de charge à la plage. Les véhicules étaient ensuite déposés par les grues du bord et rejoignaient la terre par leurs propres moyens. Les remorqueurs auxiliaires vont être utilisés pour sécuriser les plate-formes et non pour les remorquer.

Ces puissants 4×4 se montrent à l’aise dans le rude relief sarde. Ils tentent de déborder le dispositif italien mais se heurtent parfois à une étonnante résistance menée par des troupes qui pourtant savent la lutte sans espoir.

Le lendemain les Renault R-35 sont mis à terre, les petits blindés avançant d’un pas lourd dans le relief tourmenté de la Sardaigne qui valait bien celui de la Corse voisine.

Ce n’est que le 24 octobre que les troupes bleues font leur jonction avec les troupes pourpres. Le 25 octobre, les troupes venues de la tête de pont verte permettent l’encerclement de Cagliari que la propagande fasciste décrit comme «la plus formidable des forteresses non par sa puissance mais par la volonté de sa garnison de mourir pour le Duce, pour le roi et pour l’Italie». Pas certain que les hommes concernés soient d’accord avec ce discours grandiloquent.

Comme plus au nord le dispositif naval est grandement allégé, la présence d’autant de navires ne se justifiant plus.

Le croiseur de bataille Strasbourg et ses torpilleurs d’escorte Lansquenet et Fleuret vont rallier le sud-est de la Sardaigne pour faire face à une possible sortie de la flotte italienne venant de Tarente.

Le croiseur lourd Charles Martel et le contre-torpilleur Le Terrible vont patrouiller dans le détroit de Bonifaccio.

Le croiseur léger La Marseillaise et le contre-torpilleur Tartu restent sur place pour couvrir l’ancienne tête de pont.

Le Sans Reproche reste mouillé sur place pour assurer le soutien des Dewoitine HD-780 de chasse qui assurent la protection aérienne du secteur. Le cargo rapide Oran sert de navire-hôpital tandis que le pétrolier Etoile du Désert sert de «station service» pour les navires de passage, lui même étant ravitaillé par d’autres pétroliers pour recompléter ses stocks.

Les autres navires de charge vont rentrer en Afrique du Nord non sans pertes sous les coups des sous-marins italiens qui restaurent un peu l’honneur des armes italiennes même si la messe est dite depuis très longtemps.

Malheureusement pour les torpilleurs submersibles transalpins ces navires sont vides et leur perte si elle génante dans l’immédiat pèse moins que si les navires avaient été coulés à l’aller.

Le convoi appareille le 22 octobre, un convoi qui comprend une colonne centrale composée du Léopold LD Ange Schiaffino Charles Le Borgne, le paquebot Belle Province et le transport de troupes Kita sont situés respectivement à tribord et à bâbord de la colonne, la protection étant assurée par l’aviso-dragueur Chamois qui ouvre la route, son sister-ship Gazelle fermant la route, la protection des flancs étant assurée par l’aviso-dragueur Commandant Rivière et le torpilleur léger Bambara.

Le Léopold LD est victime des torpilles du sous-marin Provana venu de Naples. En dépit de la réaction virulente de l’escorte, le sous-marin que l’on croyait coulé ayant en réalité survecu pour continuer la guerre encore de longs mois.

Le Charles Le Borgne échappe lui aux torpilles du Trittone, une torpille passant devant l’étrave et la seconde heurtant la coque à tribord sans exploser ! Le sous-marin est traqué par l’aviso-dragueur Gazelle qui l’endommage avec plusieurs grenades ASM même si le coup de grâce sera porté par un Consolidated Catalina de la 14R.

La tête de pont de couleur verte est considérée comme la plus sensible, la plus proche de la capitale et d’une potentielle intervention de la flotte italienne. Ses moyens navals ne sont pourtant pas exagérément puissants ce qui trahit une certaine confiance ou une bonne connaissance de l’attitude future de la flotte italienne :

-Porte-avions Commandant Teste

-Cuirassé Bourgogne

-Bâtiment de commandant Etoile du Sahel

-Croiseur léger Condé

-Contre-torpilleurs L’Indomptable Turenne Dunois

-Torpilleurs d’escadre Hussard Spahi Lannes Augereau

-Torpilleurs légers Somali Touareg

-Sous-marins Minerve Le Glorieux La Bayadère

-Pétrolier-ravitailleur La Medjerda

-Cargos Maurice LD Nicole Schiaffino Ginette Le Borgne Bougainville

-Transport de Troupes Desirade

-Pétrolier Euphrosyne

En ce qui concerne les forces terrestres on trouve la 4ème DLI, le 2ème REC, le 66ème BCC et le 180ème RALT.

Le 11 octobre 1948 la préparation d’artillerie commence à l’aube. Le cuirassé Bourgogne est le premier à ouvrir le feu suivit par le croiseur léger Condé et les contre-torpilleurs L’Indomptable et Dunois, leur tir étant guidé par les CAO-610 du Commandant Teste pendant que les Bloch MB-159M assurent la couverture aérienne, abattant plusieurs avions italiens (en l’occurrence deux SM-79 et deux CANT Z-1018) qui tentent de s’attaquer à la flotte française mais avec un succès fort mitigé.

Des unités de bombardement venues d’Algérie complètent le tout en visant notamment la ville de Cagliari qui subit de lourdes pertes qu’elles soient matérielles ou humaines.

Cette importante préparation _plus importante qu’ailleurs_ s’explique par la présence de la 21ème DI considérée comme nettement plus solide que sa consoeur du nord. Les français s’attendent donc à une solide résistance.

La 4ème DLI est mise à terre sous la protection d’un puissant tir de barrage mené par la flotte, la tête de pont se situant entre Pula et Sarroch c’est-à-dire au sud-ouest de Cagliari.

Le 1er REI est le premier à prendre pied sur les plages sardes. Les légionnaires venus du Maroc et dont certains doutaient de la capacité à combattre un ennemi plus puissant que les tribus indociles du sud marocain bousculent les unités italiennes qui ne tardent pas à plier.

Dans l’après midi les canons d’assaut contre-attaquent avec des chemises noires. Les légionnaires plient un temps mais bien soutenus par l’aviation embarquée et les canons de la flotte ils se resaississent et brisent définitivement les derniers espoirs italiens de rejetter l’ennemi à la mer.

Le 4ème REI est mis à terre le lendemain 12 octobre 1948. La tête de pont est élargie permettant la mise à terre des unités motomécaniques en l’occurence le 2ème REC (Panhard AMD-178B à canon de 47mm) et le 66ème BCC (Renault R-35), offrant à la 4ème DLI un appui que ne possèdent pas les troupes italiennes.

Le 13 octobre 1948 les canons de 155mm du 180ème RALT sont mis à terre et commencent à bombarder les positions italiennes ce qui permet à certains navires de se replier pour reposer l’équipage et effectuer de nécessaires réparations.

Une fois la tête de pont parfaitement organisée, les troupes françaises, les képis blancs avancent vers Cagliari. Le temps pris peut être nécessaire à néanmoins permis aux italiens de se replier en bon ordre et d’espérer pouvoir tenir autour de Cagliari surtout si des renforts arrivent de Sicile et d’Italie péninsulaire.

Hélas pour les fante de la 21ème DI, le haut-commandement italien va se contenter d’envoyer des munitions, de la nourriture mais aucune unité majeure comme une division d’infanterie supplémentaire. Quelques centaines d’hommes parviendront en Sardaigne mais leur impact sera très limité.

Le 25 octobre 1948, Cagliari est encerclée, une poche s’étant formée autour de la capitale sarde, une poche suivant la ligne Capoterre-Assemini-Sinnal-Muravera.

Les troupes italiennes sont littéralement acculées par les troupes françaises en ligne à savoir la 4ème DLI et la 82ème DIA, la 83ème DIA occupant le nord de l’Italie, menant des opérations de nettoyage.

La propagande fasciste parlera de viols de masse, de crimes de guerre menés notamment par les tirailleurs algériens. Quelques cas sont signalés mais ils n’ont pas atteint le niveau décrit par l’agence de presse Stefani et complaisamment relayée vers les pays neutres.

Rien n’aurait empeché les français de prendre Cagliari au bout de quelques jours. Alors pourquoi les combats ne se sont terminés que le 11 novembre 1948 ?

Difficile de savoir pourquoi. Plusieurs hypothèses peuvent être avancées comme une mauvaise connaissance des moyens italiens, la crainte de lourdes pertes ou l’espoir que les italiens demandent grâce avant l’assaut final.

La Poche de Cagliari est maintenue sous pression par les canons de 155mm du 180ème RALT, par les canons de la flotte et l’aviation. Les raids se font de plus en plus puissants, de plus en plus insistants.

Les deux divisions françaises soutenues par le 66ème BCC et le 2ème REC passent à l’assaut le 4 novembre 1948.

Dans un premier temps les italiens tiennent bon mais le temps joue pour les alliés. Cagliari est encerclée le 6 novembre au soir. Les français qui redoutent le combat urbain hésitent à s’engager dans les rues étroites de la capitale sarde.

Finalement il faut y aller et l’assaut final est lancé le 8 novembre au soir. Après trois jours de combat qui aggravent les dégâts causés par l’aviation et l’artillerie, la ville capitule avec elle les dernières troupes italiennes.

Cette première victoire françaises provoque la consternation en Italie mais aussi en Allemagne qui espérait ne pas avoir à déclencher une offensive aussi rapidement en Méditerranée.

Dix jours seulement après la victoire française en Sardaigne, Berlin annonce à Rome que d’ici quelques mois une opération majeure en Méditerranée sera lancée. Oui mais où ? La réponse interviendra un certain 5 février 1949.

En attendant les français vont réorganiser leur dispositif et l’alléger. C’est ainsi que sur le plan terrestre certaines unités vont retourner en Afrique du Nord pour repos, réorganisation et rééquipement.

C’est ainsi qu’au moment de l’opération MERKUR les italiens se heurteront à la 4ème DLI et à la 83ème DIA comme principales unités de combat.

Ces deux divisions d’infanterie seront soutenues par le 64ème BCC qui reçoit des Renault R-40 en remplacement des R-35, le 5ème RCA (qui reçoit quelques AM modèle 1940P pour compléter les AMD-178B) et le 83ème GRDI. Le 180ème RALT reste là.

Cela signifie que la 82ème DIA et le 2ème REC vont retourner en Tunisie pour se préparer à une nouvelle opération. Ces unités auraient pu intervenir à nouveau en Sardaigne pour l’opération MERKUR mais finalement ils vont opérer en Grèce mais ceci est une histoire qui sort du cadre de ce volume.

Cela permet aux navires de charge de rentrer en Afrique du Nord, le convoi se composant d’une seule colonne avec d’avant en arrière le Maurice LD Nicole Schiaffino Ginette le Borgne Bougainville Euphrosyne, l’escorte étant assurée par les torpilleurs légers Somali et Touareg sur les flancs, la Desirade à l’arrière tandis que la route est ouverte par le contre-torpilleur Dunois. Tous les navires vont rentrer à Oran sans aucune perte malgré plusieurs tentatives italiennes.

Des unités aériennes sont déployées en Sardaigne pour couvrir l’Italie en attendant de l’utiliser comme base de départ pour des opérations de bombardement en direction de la Sicile et de l’Italie péninsulaire.

En ce qui concerne la chasse, l’Armée de l’Air décide de déployer l’ERC-515 normalement chargée de défendre Alger avec ses Arsenal VG-39 et une escadrille issue du Groupe Régional de Chasse (GRC) de Corse volant sur Dewoitine D-520.

Avec la menace croissante de l’Allemagne _les préparatifs de MERKUR ne peuvent pas totalement passer inaperçus_ des renforts de chasse sont envoyés en Corse et en Sardaigne.

C’est la 17ème Escadre de Chasse qui est choisie envoyant un groupe en Corse (Bloch MB-159 et Bréguet Br700) et un groupe en Sardaigne (même équipement).

En ce qui concerne le bombardement la 63ème EBLg reste en Corse avec ses Glenn-Martin 167/187F pendant que la 36ème EBLg quitte l’Algérie avec ses Douglas DB-7D direction la Sardaigne et notamment l’aérodrome de Cagliari-Elmas.

La mission de reconnaissance va être assurée par le GR III/39 venu de Perpignan avec des Bloch MB-176.

L’Aviation Navale va déployer des moyens de patrouille maritime et de lutte ASM pour renforcer la maitrise d’une zone vitale pour l’effort de guerre allié. Des détachements issues de l’escadrille 14E (Potez-CAMS 141) et de l’escadrille 12T (Bloch MB-481) vont ainsi être déployés en Sardaigne.

A noter que des appareils neufs arrivent pour recompléter les unités en compagnie de jeunes pilotes qui doivent remplacer les pilotes tués ou convalescents. Dès la fin de 1948 les unités ont quasiment toutes retrouvées leur niveau du début de la guerre sur le plan matériel.

En ce qui concerne les navires, des navires légers de combat y seront affectés pour protéger les côtes, les unités majeures restant à Mers-El-Kébir et à Bizerte mieux équipées que des ports déjà sous équipés en temps normal et qui ont été ravagés par les combats et les sabotages.

Un groupe occasionnel est déployé à Cagliari avec le croiseur léger Latouche-Treville, les contre-torpilleurs Dunois et La Hire, les torpilleurs légers Kabyle et Bambara, les aviso-dragueurs Commandant Duboc et Commandant Rivière, le pétrolier-caboteur Aube et le remorqueur de 750ch Amarante.

Dans le nord du pays des navires venus de Corse et de Toulon vont assurer la défense du nord de l’île-soeur de la Corse. Cela ne se fait pas sans hésitations de crainte d’affaiblir la défense de la Corse mais aussi d’affaiblir la 2ème Escadre.

Ce groupe occasionnel nord comprend les torpilleurs légers L’Entreprenant et Le Farouche, le chalutier ASM La Lorientaise, les aviso-dragueurs La Gracieuse et La Moqueuse, les vedettes lance-torpilles VTB-41 43 45 47 49 de la 1ère ELM mais aussi deux sous-marins, les Ile d’Aix et Ile d’If soutenus par l’ancien aviso Somme.

Et côté italien ? Les pertes ont été très lourdes que ce soit sur terre, sur mer ou dans les airs. Les deux divisions d’infanterie (12ème et 21ème DI) sont détruites mais un certain nombre de cadres et de soldats parviennent à quitter la Sardaigne pour rallier certains la Sicile et pour d’autres l’Italie péninsulaire. Elles seront reconstituées et redéployées dans l’île après la reconquête de l’opération MERKUR comme si l’occupation française n’avait jamais existé.

En ce qui concerne la Regia Aeronautica les pertes sont lourdes surtout sur le plan matériel, les pertes humaines étant heureusement (ou pas) plus faibles car si avoir des pilotes et des navigants c’est bien les doter d’appareils modernes c’est mieux.

Si la majorité des appareils sont perdus d’autres vont parvenir à fuir vers la Sicile ou l’Italie péninsulaire. Ces appareils ont mené des attaques sur les troupes françaises avec des succès limités pour ne pas dire mitigés.

Par exemple si des Fiat BR-20 et des CANT Z-1018 ont survécu à l’opération SCIPION en revanche tous les Ju-87B sont perdus que ce soit au sol ou en vol, le bombardier en piqué allemand montrant ses limites face à une chasse mordante et décidée. De toute façon cet appareil était totalement dépassé donc la perte de ces appareils chagrine peu les italiens.

La chasse italienne va tenter de faire ce qu’elle peut et va clairement relever le gant du défi imposé par les unités de chasse de l’Armée de l’Air et de l’Aviation Navale.

Aucun chasseur italien probablement en raison d’un rayon d’action insuffisant ne parviendra en Italie péninsulaire ou en Sicile.

En revanche une poignée de Caproni Ca-313, de CANT Z-506, de Fiat RS-16, de Savoia-Marchetti SM-79 et de Reggiane Re-2003 survivent au combat pour rallier l’Italie même si beaucoup usés et en mauvais en état serviront finalement de réserve de pièces détachées et non d’appareils opérationnels.

En ce qui concerne la Regia Marina les pertes sont tous aussi lourdes avec des navires coulés et d’autres que l’on doit saborder faute de pouvoir les évacuer.

Sur les sept sous-marins déployés en Sardaigne au début de la guerre, quatre sont coulés durant l’opération SCIPION en l’occurrence le Corello coulé par un Consolidated Catalina français le 14 octobre 1949, l’Alagi victime d’un Potez-CAMS 141 au large de Cagliari le 15 octobre 1948, l’Adua victime du sous-marin britannique HMS Sunfish le 24 octobre 1948 alors que l’Axuna est coulé par le torpilleur d’escadre Lansquenet le 25 octobre 1948 après une tentative de torpillage contre le Strasbourg.

Le torpilleur General Antonino Cascino est coulé par les bombes d’un Lioré et Olivier Léo 456 de l’escadrille 16T, deux bombes étant suffisante pour envoyer le petit navire transalpin par le fond.

En ce qui concerne les vedettes lance-torpilles présentent en Sardaigne, six sont coulées (deux par navire de surface deux par l’aviation et deux autres suites à une collision dans le brouillard), quatre endommagées sont sabordées pour embouteiller le port et deux survivantes rallient miraculeusement l’Italie péninsulaire.

Le mouilleur de mines Durazzo endommagé légèrement par l’aviation embarquée français se reple sur la Sicile. Le Pelagosa à lui moins de chance car endommagé par le bombardement naval préparant le débarquement en zone pourpre il doit être sabordé.

Le Caralis est coulé par deux Loire-Nieuport LN-420 du Commandant Teste le 13 octobre 1948 alors qu’il tentait de s’échapper de Cagliari.

Le Deffenu est surpris dans la nuit du 13 au 14 octobre par le contre-torpilleur Turenne. Transportant des munitions, il disparaît dans une gigantesque gerbe de feu après avoir encaissé huit obus de 130mm.

Le Mazzora victime d’une avarie mécanique est sabordé à La Maddalena le 19 octobre 1948 peu avant la chute du port.

A cela s’ajoute la perte d’un croiseur-éclaireur de classe Capitani Romani, le Claudio Tibero. Ces puissants navires armés de huit canons de 135mm avaient été conçus pour combattre les non moins puissants contre-torpilleurs français.

Stationné à Tarente, il avait mené plusieurs missions de recherche pour retrouver la flotte française et guider sur elle les grosses unités de la Regia Marina stationnées à Tarente.

Cette recherche fût infructueuse jusqu’au 12 octobre 1948 au sud-est de la Sardaigne où le croiseur-éclaireur cherchait à retrouver les navires français qui couvraient le débarquement près de Cagliari.

Dans un temps épouvantable, le croiseur-éclaireur croit repérer des troupes françaises opérant sur la côte. Il ouvre aussitôt le feu, tirant une quarantaine d’obus de 135mm pour un résultat désolant : les soldats français étaient en réalité un troupeau de chèvres. Bien entendu ce fait fût soigneusement occulté dans le rapport.

Le navire se resaissit et met cap au sud-ouest. Equipé d’un radar expérimental, le croiseur-éclaireur pense pouvoir détecter l’ennemi avant qu’il ne le détecte.

Hélas pour lui les radars français quoi que largement perfectibles disposent de capacités bien plus élevées.

Les trois contre-torpilleurs de la 4ème DCT, les Magon Dunois La Hire l’ont répéré depuis de longues minutes et se mettent en position. Ils adoptent la bonne stratégie en lançant une salve de neuf torpilles avant d’ouvrir le feu.

Le croiseur-éclaireur italien qui à enfin répéré les sillages des trois «French SuperDestroyer» ouvre le feu avec son artillerie principale, son tir étant comme on dit souvent «inconfortablement précis» et même pire puisque le Magon encaisse très vite six ou sept obus de 135mm.

En guise de punition le croiseur-éclaireur encaisse trois torpilles et une bonne trentaine d’obus de 130mm ce qui provoque un incendie et une voie d’eau qui sera fatale au navire italien.

De son côté le Magon mal en point reçoit le douteux privilège d’avoir été torpillé par une anguille française défectueuse. La proue arrachée, le navire est comme un corps mort sur les flots. Son sister-ship Dunois tente de le remorquer mais après plusieurs heures d’effort, une nouvelle voie d’eau entraine son naufrage.

A noter que sur les neuf torpilles, quatre ont touché une cible, trois ont coulé au fond de l’eau et deux se sont perdues sur la côte sarde où elles seront pétardées par des sapeurs français de la 4ème DLI.

Trois jours plus tard le croiseur lourd Zara est coulé par des navires français et britanniques. Le 15 octobre 1948, surprenant les français il bombarde des positions françaises au nord de Cagliari, profitant du mauvais temps qui le protège de l’aviation.

En revanche elle ne le protège par des navires de surface en l’occurence le croiseur léger Condé et les contre-torpilleurs La Hire et Dunois.

Plus puissant que ces adversaires il est cependant touché rapidement par une torpille et matraqué par des obus de 130 et de 152mm, l’incrociatori pesante touchant le Condé avec deux obus de 203mm et le Dunois avec un autre obus du même calibre mais les deux navires français restent en ligne.

Alors que les trois navires français allaient achever leur proie, un grain providentiel masque la cible aux navires français. Le Zara tente de rallier Naples mais le lendemain il sera surpris par le sous-marin anglais HMS Upholder et exécuté avec trois torpilles.

Dans le domaine des croiseurs légers le Giovanni delle Bande Nere avait été sérieusement endommagé le 6 octobre 1948 par le sous-marin français Ile de Brehat. Il rallie miraculeusement Cagliari où les italiens espèrent réaliser des réparations provisoires pour lui permettre de rallier la péninsule.

Alors que les français menacent l’île, les italiens espèrent l’utiliser comme batterie flottante faute de mieux. En réalité le navire sera peu efficace, peu efficient, le navire étant touché par plusieurs bombes avant d’être achevé par la préparation navale française, le navire sombrant dans le port, l’épave étant relevée après guerre et demantelée.

D’autres navires italiens sont endommagés comme le croiseur lourd Fiume qui à l’annonce du débarquement en Sardaigne appareille de Tarente, contourne la péninsule italique, franchit le détroit de Messine avant de rallier les eaux sardes.

Il effectue plusieurs bombardements des côtes, dépose des troupes embarquées à Tarente et tente de s’opposer aux navires alliés mais en restant à distance. Il sera endommagé le 21 octobre 1948 par une bombe de 250kg qui détruit un affût de 100mm et l’oblige à se replier sur Naples pour réparations.

Le croiseur lourd Ragusa est légèrement endommagé le 4 novembre 1948 par une bombe de 250kg d’un bombardier en piqué Loire-Nieuport LN-420 embarqué sur le Commandant Teste. La bombe perforante détruit la tourelle II (avant supérieure) de l’incrociatori pesanti qui doit rallier Naples pour réparations.

Le cacciatorpidiniere Fulmine est coulé le 12 novembre 1948 au large de Vintimille. Alors en mission de patrouille anti-sous-marine, il est surpris par des vedettes lance-torpilles françaises qui opéraient depuis une base avancée installée à Villefranche sur Mer. Deux torpilles sont suffisantes pour envoyer le cacciatorpidiniere italien par le fond, la première anguille arrachant la proue et la seconde privant le navire de propulsion. Le navire chavire et coule rapidement, ne laissant que fort peu de survivants.

Le Conflit (185) Balkans (19)

La Bataille du Golfe de Zanthe est clairement une victoire alliée, la marine italienne à subit de lourdes pertes, des pertes dont elle ne se remit jamais. Autant dire que les partisans de cet engagement massif ce sont au mieux faits discrets ou ont été envoyés dans un bureau où le téléphone ne sonnait jamais.

Les alliés notamment ont subit des pertes sensibles, enfin les alliés surtout les français qui ont perdu en mer Ionienne un cuirassé, un porte-avions, deux contre-torpilleurs et un torpilleur d’escadre ce qui est tout sauf négligeable.

Cela marque la fin de la Campagne de Grèce (1949-50) avec une situation ambivalente qui ne satisfait vraiment personne encore que les alliés s’en sortent bien en conservant le contrôle de l’île de Zant(h)e, la presqu’île du Péloponnèse et la Crète. A cela s’ajoute la conquête du Dodécanèse qui forme une chaine difficilement franchissable par l’Axe.

En revanche certains rétorquent que la défense ferme des Cyclades aurait permis de former un triangle mortel pour l’Axe mais on ne peut refaire le match.

L’Axe en revanche est dans une position difficile avec un ennemi qui bien qu’affaiblit représente toujours une menace pour l’effort de guerre germano-italo-bulgare. Clairement les comptes ne sont pas bons.

L’objectif initial de MARITSA à savoir d’éliminer la menace alliée et de sécuriser le flanc méridional de la future opération BARBAROSSA n’à pas été atteint.

Pire la présence alliée dans le Peloponnèse fait craindre le pire pour des installations sensibles en Bulgarie et en Roumanie tandis que l’Italie pourrait être tentée de freiner son engagement au sein de la «croisade antibolchevique».

Certains à Berlin vont militer pour un report d’un an de l’invasion de l’URSS le temps de régler la question des Balkans mais cette solution a priori logique et prudente va se heurter à plusieurs problèmes.

Le premier c’est le fait de devoir renoncer à une opération qui obsède les dirigeants nazis depuis 1933 ! Nul doute que si la Guerre de Pologne avait duré, la question de l’invasion de l’URSS se serait clairement posée.

Le second c’est que tout ou presque est prêt et que transférer plusieurs divisions de Pologne ou encore de Roumanie pourrait pousser Staline à lancer une attaque préventive avec toutes les conséquences que cela peut entrainer.

Enfin il y à le front occidental. Les combats sont toujours en cours (l’opération NIBELUNGEN doit commencer au mois de mai) et quelque soit les résultats de la dernière opération, à terme les alliés vont contre-attaquer et pourraient le faire très vite.

Voilà pourquoi dès la fin du mois de mars, le Heeresgruppe E reçoit l’ordre de se placer en position défensive et de préparer un comité d’accueil pour empêcher une contre-attaque allié. Nombre d’officiers allemands qui ont connu la première guerre mondiale n’ont pas oublié que c’est l’offensive du Vardar qui à entrainé la défaite de l’Allemagne.

De leur côté les alliés vont faire pareil, transformant donc le Peloponnèse en gigantesque forteresse ou le moindre espace était occupé par un dépôt, un aérodrome, une caserne. Les côtes se hérissent de canons qu’ils soient navals ou antiaériens, des champs de mines colossaux doivent empêcher les navires italiens de menacer les lignes de communication alliées.

Sur le plan des pertes, elles ont été lourdes chez les grecs et les alliés, un peu moins au sein des forces de l’Axe.

Selon une étude menée après guerre, 25% des soldats ont été tués par des éclats de bombes et d’obus, 45% par balles, 15% par des pièges, 5% par des armes blanches et 5% de causes diverses (maladies, accidents, complications post-opératoires).

De nombreux soldats yougoslaves et grecs ont pu être évacués en direction d’abord de la Crète puis de l’Egypte et de la Libye où des camps vont permettre la remise sur pied d’armées dignes de ce nom.

On espère une remontée en puissance rapide mais si ce sera le cas côté grec en revanche côté yougoslave ce sera un calvaire pour les instructeurs alliés qui pestèrent contre ces yougoslaves qui pour reprendre une formule célèbre «n’avaient rien appris et n’avaient rien oublié».

Sur le plan tactique, aucune nouvelle leçon n’à été tirée. Les classiques identifés depuis le début du conflit se sont confirmées, en l’occurence la nécessité vitale de contrôler l’espace aérien, l’efficacité de l’artillerie en phase offensive comme défensive et les difficultés des chars à opérer seuls sans l’infanterie.

Comme durant le premier conflit mondial, les Balkans restent un cauchemar pour les opérations avec un relief empêchant toute manœuvre de grand style (mais privilégiant le «grignotage» et l’infiltration) et compliquant sérieusement la logistique alors qu’une armée moderne en est plus que jamais dépendante.

Clairement en ce printemps 1950 le temps joue pour les alliés. Ils se doutent que l’Axe ne pourra pas lancer un nouvel effort avant longtemps et eux peuvent rester sur la défensive aussi longtemps que les pressions politiques (essentiellement grecques et yougoslaves) le permette.

Autre conséquence de cette campagne abrasive : les débuts de la résistance à l’occupation étrangère.

On l’avait vu, dès les premières semaines d’occupation, la Yougoslavie avait été secouée par des mouvements insurrectionnels plus ou moins politisés et dont les actions mal conçues et mal coordonnées avaient eut un impact inversement proportionnel à la dureté de la répression qu’elle soit italienne, allemande, hongroise ou bulgare. A cela s’ajoutait la division politique entre royalistes et communistes, les deux camps se combattant autant qu’ils combattaient l’ennemi.

En Grèce c’est la même chose. Des soldats egarés ne voulant ou ne pouvant évacuer, des jeunes garçons trop jeunes pour être mobilisées, des femmes, des enfants, des vieillards.

Ces maquisards sont très vite très idéologisés, très politisés. On trouve des maquis républicains, des maquis royalistes et des maquis communistes. Ces maquis sont assez faibles et de plus se querellent et se jalousent entre-eux.

On verra ainsi parfois des maquis royalistes signer une trève avec les italiens pour pouvoir régler son compte à un maquis communiste ou républicain !

Très vite le gouvernement d’Heraklion tapera du poing sur la table en appelant à une coopération «pleine et entière» mais entre la décision politique et le terrain il y aura toujours un décalage.

Avec le temps, il y aura moins de combats fratricides mais quelle différence avec par un exemple un soutien retiré à un maquis rival engagé dans une opération contre les italiens, les allemands et les bulgares ? Je laisse à chacun le soin de trancher…. .

Il faudra attendre l’encadrement des maquis par les SR et les unités commandos alliées ainsi que les préparatifs de l’opération ANVIL pour que ces combats aussi meurtriers que stupides cessent.

Il faut dire que les alliés avaient deux leviers importants : de l’argent _utile pour acheter des complicités locales_ et surtout des armes modernes. Un manque de coopération, un peu d’indiscipline et ces deux robinets étaient promptement fermés.

Face à cette résistance, l’Axe et le gouvernement de Soriotis vont réagir avec patience et habileté pour éviter que la situation ne s’envenime trop vite.

Non bien sur je plaisante, ils vont multiplier les opérations de nettoyage de sinistre mémoire, croyant qu’en terrorisant la population on obtiendrait sa soumission docile. Monumentale erreur comme dirait l’autre…. .

Un état-major phosphore en permanence. On gère une opération et on prépare la suite. Bref cela ne s’arrête jamais. L’état-major du Groupe d’Armées Alliées des Balkans (GAAB) imagine donc de futures opérations pour reprendre la lutte sur son théâtre d’opérations.

On ne s’interdit rien y compris des manœuvres de grand style comme un débarquement près de Thessalonique, une offensive dans l’isthme de Corinthe et même un débarquement sur la côte albanaise ! Pas étonnant que cette offensive ait été officieusement baptisée TRIDENT par ses concepteurs.

Très vite cependant des plans plus modestes et plus raisonnables vont être imaginés, le plus évident _attaque dans l’isthme de Corinthe et franchissement du Golfe de Corinthe_ sera vite privilégié.

Es-ce à dire que les alliés vont contre-attaquer immédiatement ? Non bien entendu et ce au grand dam des gouvernements grecs et yougoslaves qui vont protester mezzo voce contre cet état de fait.

Pas moins de quinze avant-projets vont être étudiés. Comme nous l’avons vu plus haut, on ne se refuse rien y compris l’arrivée de divisions et de moyens supplémentaires. Ces différents plans ont pour nom de code une lettre de l’alphabet grec en l’occurrence Alpha, Gamma, Delta, Epsilon, Zeta, Theta, Kappa, Omicron, Pi, Rho, Sigma, Upsilon, Phi, Khi et Omega.

Sur ces quinze avant projets, neuf (Alpha, Epsilon, Omicron, Rho, Sigma, Upsilon, Phi, Khi et Omega) prévoyaient un affrontement dans l’isthme de Corinthe et dans le Golfe de Corinthe selon des modalités différentes imposant plutôt un axe ou un autre de progression.

Les six autres sont plus hétérodoxes. Le projet GAMMA («Trident») prévoyait un débarquement à Thessalonique, une offensive dans l’isthme de Corinthe à J+1 et un débarquement sur la côte albanaise à J+2. Ensuite il sera toujours de décider quel axe privilégier.

Le projet DELTA prévoyait un débarquement au nord d’Athènes avec un mouvement tournant vers l’Albanie pour couper de leurs arrières les troupes de l’Axe déployées en Grèce.

Le projet ZETA prévoyait qu’une force amphibie ne débarque dans le Golfe de Corinthe pour s’emparer tout de suite à J+2/3 d’Athènes et faire s’effondrer le front italo-allemand. Pendant ce temps, sur le front de Corinthe, les troupes alliées seront chargées de faire pression pour empêcher le repli des troupes sur Athènes.

Le projet THETA prévoyait un débarquement sur la rive nord du Golfe de Patras pour foncer vers le nord pendant qu’un autre débarquement aurait lieu dans le Golfe de Saronique à l’ouest d’Athènes, les deux axes devant se retrouver dans le nord de la Grèce à la frontière albanaise. Un plan que n’auraient pas renié les allemands…… .

Le projet KAPPA prévoyait un débarquement à l’est de Thessalonique et un autre dans le sud de l’Albanie pendant que des coups de main seraient menés dans le Golfe de Patras, l’isthme de Corinthe et différentes îles de la mer Egée.

Le projet PI prévoyait un franchissement en force du Golfe de Patras et de l’isthme de Corinthe avec un assaut aéroporté pour créer un tapis pour faciliter la progression des troupes terrestres.