Les avions de l’aéronavale soviétique (2) : bombardiers et bombardiers-torpilleurs basés à terre
Avant-propos
La première utilisation du «plus lourd que l’air» était la reconnaissance, l’observation et le réglage des tirs de l’artillerie. Très rapidement pour ne pas dire immédiatement on envisagea une utilisation nettement plus offensive pour la chasse et le bombardement.
En mer l’évolution fût similaire. Les premiers avions et les premiers hydravions se contentèrent d’abord d’observer et de rapporter puis se mirent à attaquer d’abord leurs homologues ennemis puis les navires avec des problèmes encore plus aigus que sur terre.
En effet un navire de guerre contrairement à une cible à terre était mobile et de petite taille sans compter que le blindage était particulièrement épais.
D’où le scepticisme des marins vis à vis du bombardement horizontal et la prégnance du torpillage avec l’utilisation de la torpille automobile qui avait l’avantage de toucher le navire sous la ligne de flottaison où la protection était moindre et où les dégâts pouvaient être particulièrement sévères.
Les différentes aéronavales privilégièrent donc le torpilleur appelé parfois bombardier-torpilleur car capable d’emporter des bombes et/ou des torpilles. Outre des appareils embarqués, les unités aériennes dépendant de la marine ou appuyant cette dernière disposaient souvent de bombardiers basés à terre.
La VMF n’échappe pas à la règle et en juin 1950 dispose au sein de ses onze DAF d’un ou deux régiments de bombardiers-torpilleurs, des appareils bi ou quadrimoteurs semblables pour ne pas dire identiques à ceux employés par les VVS.
Plus précisément elle dispose de six régiments en Baltique (deux par division), deux en mer Noire (un par division), un en mer Caspienne, six régiments dans le Pacifique (deux par division) et quatre au sein de la Flotte du Nord (deux par division) soit un total de dix-neuf régiments.

Petlyakov Pe-8
En matière d’équipement, à part un régiment équipé de quadrimoteurs Petlyakov Pe-8, tous les autres sont équipés soit d’Illiouchine Il-4 ou de Petlyakov Pe-3M, dix régiments pour le premier et huit pour le second.

Douglas A-20 Havoc
Durant le conflit, des versions améliorées des appareils mis en service avant guerre seront encore livrées mais l’Aviation de la Flotte recevra des américains un certain nombre de bombardiers comme le Douglas A-20 Havoc mais aussi le North American B-25 Mitchell même si la VVS aura la priorité.
En ce qui concerne leur utilisation opérationnelle, les bombardiers-torpilleurs et les bombardiers de la VMF seront utilisées pour des missions navales (reconnaissance, patrouille maritime, torpillage, assaut aéromaritime, mouillage de mines, lutte ASM) mais aussi pour des missions de bombardement et d’assaut terrestre surtout quand la situation militaire de l’URSS imposait l’emploi de tous les avions disponibles pour freiner à défaut de stopper l’avancée allemande qui semblait irrésistible.
Illiouchine Il-4
L’Illiouchine Il-4 est un élégant bimoteur à aile basse conçu en URSS dans les années trente. Il est directement issu d’un appareil plus ancien du même constructeur le DB-3 puisque l’appellation initiale de l’Il-4 fût DB-3F, le F signifiant Forsirovanniye («boosté»).
Par rapport à son aîné, le nouvel appareil avait une structure transformée notamment au niveau des ailes, le métal était remplacé par du duralium, le système d’alimentation en carburant fût entièrement revu, le nez redessiné pour améliorer les performances aérodynamiques mais aussi le confort de l’homme chargé à la fois de la navigation et du bombardement.
Le prototype du DB-3F qui décolle pour la première fois le 21 mai 1939 dispose des mêmes moteurs que son prédécesseur. Il s’agit d’une solution provisoire le temps que des moteurs plus puissants soient disponibles.
Après le vol d’un deuxième prototype en janvier 1940, les deux appareils sont rebaptisées Illiouchine Il-4. Par rapport aux prototypes, les appareils de série disposent de moteurs légèrement plus puissant, d’un armement plus important, de réservoirs mieux protégés et d’autres modifications de l’ordre du détail et du cosmétique.
Les premiers appareils sont livrés aux VVS qui après avoir reçu 1528 DB-3 va recevoir de 1941 à 1952 un total de 3600 Illiouchine Il-4 en différentes versions (NdA plus de détails dans la partie consacrée aux VVS).
La VMF reçoit ses premiers appareils à partir de l’été 1943, 240 exemplaires en version Il-4M (M = minonosets «torpilleur») suivis de 360 autres appareils en version Il-4MF (Minonosets Forsirovanniye «torpilleur amélioré») soit un total de 600 exemplaires même si seulement dix régiments de trente-six étaient en ligne en juin 1950, les autres appareils étant stockés.
Les livraisons continuent jusqu’en septembre 1952 quand l’Illiouchine Il-6 le remplace sur les chaines de montage. En raison de problèmes techniques, de problèmes industriels, jamais le Il-6 ne remplacera complètement le Il-4 qui terminera le conflit en première ligne.
Quand les allemands déclenchent l’opération BARBAROSSA le 21 juin 1950, 360 Illiouchine Il-4 sont en service.
La Flotte de la Baltique dispose de 108 appareils répartis en trois régiments de trois escadrilles de douze appareils à raison d’un régiment par division. Ces trois régiments subissent de lourdes pertes en attaquant la Kriegsmarine mais aussi les Panzerdivisionen et les unités de l’armée de terre.
Souvent engagés sans escorte, les bombardiers sont étrillés par une Luftwafe mordante. Les survivants seront repliés en arrière du front, recevant de nouveaux appareils avant d’être rengagés au combat avec de pilotes tout juste sortis des écoles de formation.
A la capitulation allemande, seules les 1ère et 5ème DAF sont encore équipées de Illiouchine Il-4, la 3ème DAF ayant reçut des Illiouchine Il-6. Les Il-4 sont rétirés du service en 1957 remplacés par des appareils plus modernes qui vont également remplacer les Il-6.
La Flotte de la mer Noire dispose d’un régiment de trente-six Illiouchine Il-4 au sein de la 2ème DAF. Ces appareils sont engagés contre les roumains, les bulgares, les italiens et les allemands contre des cibles navales mais aussi contre les colonnes allemandes progressant dans les plaines ukrainiennes et en direction de la Crimée.
Les pertes sont moins élevées qu’en mer Baltique, le régiment devant se replier jusque sur les côtes de Géorgie, couvrant la flotte réfugiées à Poti, Batumi et Novorossirsk. Le régiment appuie la flotte durant la reconquête du territoire soviétique avant de soutenir la progression de l’armée de terre en Roumanie et en Hongrie, terminant la guerre à Budapest toujours équipée d’Illiouchine Il-4.
La flottille de la mer Caspienne dispose au sein de la 6ème DAF d’un régiment de trente-six Illiouchine Il-4. Dans un premier temps l’unité est peu concernée par les combats, restant sur une prudente expectative.
Le déclenchement au printemps 1951 de l’opération FRIEDRICH ayant pour objectif le Caucase et ses pétroles change la donne, obligeant le régiment à être engagé massivement ce qui entraîne une augmentation des pertes.
L’unité participe ensuite aux contre-offensives soviétiques, l’absence de menace venant d’Iran permettant à la VMF de ne laisser que des moyens aériens symboliques pour soutenir sa flottille de la Caspienne.
Le régiment équipé d’Illiouchine Il-4 termine la guerre en Crimée, l’île libérée le régiment recevant pour mission d’interdire la mer Noire à la navigation ennemie par des raids aéromaritimes, des bombardements littoraux ainsi que des mouillages de mines. Ce n’est qu’en 1955 que des Illiouchine Il-6 vont remplacer les Il-4.
Au sein de la flotte du Pacifique, les trois divisions d’aviation de la flotte alignaient trois régiments de trente-six Illiouchine Il-4 soit un total de 108 appareils en ligne.
Dans un premier temps les divisions restent pour dissuader le Japon d’intervenir mais très vite la 11ème DAF est engagée dans le Caucase dans le cadre de l’opération FRIEDRICH. La 7ème DAF elle est engagée en Mandchourie en juin 1954 contre le Japon.
Sur les trois régiments équipés en juin 1950 d’Illiouchine Il-4, un celui de la 9ème DAF était toujours équipé d’Illiouchine Il-4, le régiment de la 7ème DAF disposant d’Illiouchine Il-6 alors que la 11ème DAF volait sur B-25 Mitchell américains. Après guerre, seules les 7ème et 9ème DAF seront préservées avec Illiouchine Il-6, la 11ème DAF étant dissoute.
La Flotte du Nord dispose elle de deux régiments de trente-six appareils soit soixante-douze appareils en ligne. Si les bombardiers de la 8ème DAF sont essentiellement engagés contre les forces terrestres allemandes visant Mourmansk, les Illiouchine Il-4 de la 10ème DAF cherchent à interdire aux navires allemands les côtes norvégiennes. A la fin du conflit, le régiment de la 8ème DAF disposait toujours d’Illiouchine Il-4 alors que celui de la 10ème DAF volait sur Douglas A-20 Havoc.
Caractéristiques Techniques (Illiouchine Il-4MF)
Type : bombardier-torpilleur bimoteur quadriplace
Masse à vide 5800kg maximale au décollage 12120kg
Dimensions : longueur 14.76m envergure 21.44m hauteur : nc
Motorisation : deux moteurs radiaux Tumansky M-88D 14 cylindres de 1500ch chacun entraînant des hélices tripales
Performances : vitesse maximale 430km/h à 6500m distance franchissable 3800km en mission de reconnaissance 2600km avec 1000kg de bombes ou une torpille plafond opérationnel 8700m
Armement : deux mitrailleuses de 7.62mm ShKAS dans le nez, une mitrailleuse identique dans le poste ventral, deux mitrailleuses de 7.62mm dans la tourelle dorsale (parfois remplacée par une mitrailleuse de 12.7mm UBT), une torpille de 940kg type 45-36 ou deux roquettes BETAB-750DS de 305mm ou jusqu’à 2700kg de bombes et de mines
Equipage : un pilote, un navigateur-bombardier, un mitrailleur dorsal/opérateur radio, un mitrailleur ventral
Petlyakov Pe-3M
Le développement des avions prend parfois des tournures étranges, de véritables chemins de traverse. Le cas du Petlyakov Pe-3M est symbolique de cet état fait.
En effet le deuxième bombardier-torpilleur de la VMF était une version adaptée d’un chasseur lourd de la VVS, le Pe-3 lui même issu du bombardier rapide Pe-2. Pourquoi alors ne pas avoir développé une version bombardier-torpilleur du Pe-2, la réponse à la question reste entière……. .
Le prototype du chasseur lourd Petlyakov Pe-3 décolle pour la première fois le 7 août 1941. C’est un élégant appareil à aile basse et double dérive. Le développement se passe bien et les premiers appareils sont mis en service début 1943.
A cette époque l’Aviation de la Flotte réfléchit à la composition de ses divisions d’aviation. Si la mise sur pied de régiments de bombardement et de torpillage fait consensus, leur équipement fait l’objet de discussion acharnées car même si l’URSS est une économie socialiste et planifiée cela n’empêche les rivalités entre les différents constructeurs, rivalités encouragées par le maître du Kremlin.
L’Illiouchine Il-4 est le premier sélectionné. Il semble qu’initialement une version torpillage du Pe-2 tenait la corde mais pour une raison que l’on ignore la VMF demanda une version torpillage du chasseur lourd/chasseur de nuit Pe-3.
Deux prototypes sont commandés en septembre 1943, le premier décollant en janvier 1944 et le second en septembre de la même année. Les moteurs sont plus puissants, le fuselage redessiné, un troisième homme embarqué pour faire face aux différentes missions. L’armement est également renforcé, le fuselage étant adapté à un engagement au dessus des flots.
Le 7 janvier 1945 le premier prototype s’écrase. Le programme est suspendu le temps de connaître les raisons de ce crash. Comme l’enquête montre qu’il s’agit d’une erreur humaine, le programme reprend et la décision de lancer la production en série est prise en mai 1945.
La production et les livraisons sont rapides, le Pe-3M (M = Minonosets «torpilleur») était une version spécialement conçue pour la VMF et non une adaptation a minima d’un bombardier destiné aux VVS.
En juin 1950, huit régiments de trente-six appareils sont en ligne soit un total de 288 appareils en service sans compter les appareils de réserve. Selon des archives récemment (2015) retrouvées, un total de 560 Pe-3M et Pe-3MF ont été produits avant le début de BARBAROSSA.
Les différences entre le Pe-3M et le Pe-3MF (Minonosets Forsirovanniye «torpilleur amélioré») sont minimes, fruit essentiellement du retour d’expérience avec une meilleur répartition des charges internes, de nouveaux équipements radios, une amélioration du blindage protégeant le pilote.
La Flotte de la Baltique dispose de deux régiments de trente-six Pe-3M et MF. Le régiment de la 1ère DAF est ainsi toujours équipé de Pe-3M. Engagé aussi bien contre des cibles navales que contre des cibles terrestres, le régiment est quasiment anéanti dans les pays baltes et reconstitué ultérieurement avec des Pe-3MF sortis des réserves.
Combattant sur le front, le régiment reçoit ultérieurement des Douglas A-20 Havoc. Officiellement les pilotes soviétiques regrettent leurs Pe-3 mais on ne peut pas exclure une propagande destiné à minorer l’aide alliée durant la guerre.
Si la 3ème DAF disposait de quadrimoteurs Petlyakov Pe-8, la 5ème DAF disposait également de trente-six Pe-3 avec un équipement mixte, deux escadrilles de douze Pe-3M et une escadrille de douze Pe-3MF.
Ce régiment comme celui de la 1ère DAF subit de lourdes pertes. Il est reconstitué avec des Pe-3MF, modèle d’appareil qu’il conserve jusqu’à la fin du conflit.
La Flotte de la mer Noire aligne au sein de la 4ème DAF un régiment de trente-six Pe-3M et MF avec une répartition inverse du régiment de la 5ème DAF avec vingt-quatre Pe-3MF et douze Pe-3M.
Ce régiment est engagé sur terre pour tenter de freiner l’avancée du Heeresgruppe Süd composé de troupes allemandes, roumaines, hongroises, italiennes et bulgares. Il est aussi engagé dans des attaques navales.
Le régiment est virtuellement anéantit en Crimée quand sur les dix appareils restants sont tous détruits sur la base aéronavale de Sébastopol. Heureusement les pilotes peuvent être évacués par un sous-marin de la flotte de la Mer Noire.
Dans le Caucase ils reçoivent de nouveaux Pe-3MF et peuvent reprendre la lutte. En juin 1953 ils reçoivent des Douglas A-20 Havoc. Avec ces appareils américains, le régiment opère contre des cibles en Bulgarie, en Roumanie et même en Hongrie. C’est d’ailleurs sur les rives du lac Balaton que le régiment termine la guerre.
La Flotte du Pacifique dispose de trois régiments de Petlyakov Pe-3M et MF. En juin 1950 si le régiment de la 7ème DAF est entièrement rééquipé de Pe-3MF, les deux autres volent encore sur Pe-3M.
Comme nous l’avons vu, dans un premier temps les trois DAF de la flotte du Pacifique restent déployées en Extrême-Orient soviétique, Moscou craignant une coopération, une coordination entre Berlin et Tokyo.
Quand une attaque japonaise devint une véritable chimère, la 11ème DAF rallie le Caucase à temps pour s’opposer à l’opération FRIEDRICH, la grande offensive allemande du printemps 1951, offensive ayant pour objectif les pétroles caucasiens.
Elle va rester déployé en Russie d’Europe jusqu’à la fin du conflit. Elle retourne en Extrême-Orient mais trop tard pour participer à l’offensive en Mandchourie.
Enfin la Flotte du Nord disposait elle de deux régiments de trente-six Petlyakov Pe-3M et MF, le régiment de la 8ème DAF volant sur Pe-3M et celui de la 10ème DAF volant sur Pe-3MF.
Comme leurs homologues volant sur Illiouchine Il-4, les régiments équipés de Pe-3 effectuent aussi bien des missions navales contre la navigation allemande au large des côtes norvégiennes que des missions d’appui au profit des troupes au sol notamment dans le cadre de l’opération FRANZ, une offensive de diversion ayant pour objectif Mourmansk alors que le schwerpunkt est situé bien plus au sud puisqu’il se trouve dans les piémonts du Caucase.
Si le régiment de la 8ème DAF vole sur Pe-3M jusqu’à la fin du conflit, la 10ème DAF remplace ses Pe-3MF par des North American B-25 avec lesquels elle vole jusqu’à la fin du conflit.
Le Petlyakov Pe-3M et Pe-3MF vole au sein de la VMF jusqu’en 1958 dans les unités de première ligne et jusqu’en 1962 dans les unités de réserve.
Nombre d’appareils sont sacrifiés lors d’essais nucléaires ou transformés en appareils radiocommandés servent de cibles pour des essais de missiles sol-air. Un petit nombre est préservé dans des musées et sur des mémoriaux.
Caractéristiques Techniques du Petlyakov Pe-3M
Type : bombardier-torpilleur bimoteur triplace
Masse à vide 6125kg en charge 8250kg
Dimensions : longueur 12.66m envergure 17.13m hauteur : nc
Motorisation : deux moteurs en ligne Klimov M-105RA de 1250ch chacun entraînant des hélices tripales
Performances : vitesse maximale 530km/h à 5050m distance franchissable 1500km plafond opérationnel 9100m
Armement : un canon de 20mm ShVak avec 250 coups et deux mitrailleuses de 7.62mm ShKAS avec 500 coups chacune dans le nez, une mitrailleuse de 12.7mm avec 300 coups ou deux mitrailleuses de 7.62mm avec 500 coups au total dans le poste arrière, deux mitrailleuses de 7.62mm télécommandées avec 300 coups chacune installées respectivement dans le cone arrière et sous le poste de pilotage. Soute pour 800kg de bombes ou une torpille aéroportée.
Equipage : trois hommes (un pilote, un navigateur-bombardier et un mitrailleur arrière/opérateur radio)
Petlyakov Pe-8
Le Petlyakov Pe-8 est le seul et unique bombardier quadrimoteur conçu et produit en série par l’URSS. Initialement baptisé TB-7, il est rebaptisé Pe-8 suite à la mort de Vladimir Petlyakov dans un accident d’avion en 1942.
Le développement de l’appareil commence en juillet 1934 quand l’armée de l’air demande un bombardier capable de remplacer le Tupolev TB-3 alors totalement obsolète.
Les aviateurs soviétiques réclamaient un appareil pouvant transporter 2000kg de bombes à 4500km à une vitesse supérieure à 440km/h avec une altitude de 10000m ce qui représenterait un doublement des performances par rapport à l’appareil qu’il était censé remplacer !
Le projet est confié au bureau d’études Tupolev dirigé par Andrei Tupolev et plus précisément à une équipe d’ingénieur dirigée par Vladimir Petlyakov.
Désigné en interne sous le nom d’ANT-42 et officiellement TB-7 («Tyazholy Bombardirovochnyy» bombardier lourd), il effectue son premier vol le 27 décembre 1936.
Les essais officiels commencent en août 1937 mais les Grandes Purges qui voient l’arrestation de Tupolev et de Petlyakov ralentissent les travaux.
C’est ainsi que le deuxième prototype dont l’assemblage avait commencé en avril 1936 ne décolla pour la première fois que le 26 juillet 1938. Cela à aussi eu un impact sur la mise en production car si l’usine n°124 de Kazan était prête depuis 1937, la production ne démarra que fort lentement qu’à partir de 1939.
Cela explique en partie pourquoi la VMF ne pu équiper qu’un régiment de ce puissant bombardier, l’Aviation à Long Rayon d’Action (DA) était prioritaire plus que pour n’importe quel autre modèle de bombardier. Le Pe-8 est mis en service en 1942 dans la VVS qui va recevoir 120 exemplaires entre 1942 et 1945 avant que la production ne passe à la VMF qui reçoit 48 appareils en 1946 et 1947.
Ces appareils se répartissent entre trente-six en ligne et douze en réserve. Ils équipent un régiment de bombardiers-torpilleurs, régiment intégré à la 3ème DAF.
Ces appareils sont utilisés pour la reconnaissance, la patrouille maritime et le bombardement à long rayon d’action, les ports allemands de la Baltique mais aussi Berlin sont visés par des raids soviétiques, raids plus symboliques que militairement efficaces.
Les pertes sont importantes et à la fin du conflit sur les 48 Pe-8 livrés à la VMF, il n’en reste plus que douze en état de vol.
Retirés du service en septembre 1956, quatre d’entre-eux sont transformés en transport de VIP pour les autorités civiles et militaires soviétiques, quatre sont feraillés et quatre oubliés. Deux de ces «oubliés» seront retrouvés en 2002 par des passionnés et un appareil remis en état de vol, faisant depuis le bonheur des meetings aériens russes et européens.
Caractéristiques Techniques du Petlyakov Pe-8
Type : bombardier quadrimoteur multiplace (onze hommes d’équipage)
Masse à vide 18571kg en charge 27000kg maximale au décollage 35000kg
Dimensions : longueur 23.2m envergure 39.13m hauteur 6.20m
Motorisation : quatre moteurs en ligne Mikulin AM-35A de 1340ch chacun
Performances : vitesse maximale 443 km/h distance franchissable 3700km plafond opérationnel 9300m
Armement : deux canons de 20mm shVAK (un en tourelle dorsale et un dans la tourelle de queue), deux mitrailleuses de 12.7mm UBT dans les nacelles moteurs, et deux mitrailleuses de 7.62mm dans le nez, charge militaire de 5000kg de bombes ou pour la VVS deux torpilles aéroportées
Illiouchine Il-6
L’Illiouchine Il-6 est une évolution directe de l’Illiouchine Il-4. Le programme est lancé au printemps 1947 avec de grandes ambitions.
Trop peut être car le développement de l’appareil est particulièrement complexe, une véritable bête à chagrin pour les ingénieurs soviétiques qui doivent en plus compter sur la menace du NKVD qui voit des «traîtres» et des «saboteurs» partout.
Le premier prototype décolle pour la première fois le 8 septembre 1947 mais s’écrase dès le 2 novembre de la même année suite à une surchauffe des moteurs et un brusque décrochage.
Le deuxième prototype qui n’avait pas encore volé est modifié pour tenir compte de cet accident et le vol prévu le 14 mars 1948 est retardé de deux mois (19 mai 1948).
D’autres problèmes sont révélées ce qui explique que l’appareil n’est toujours pas en service en juin 1950 quand les allemands déclenchent l’opération BARBAROSSA.
Le développement est un temps suspendu pour privilégier la production d’appareils existants mais finalement en septembre 1952 la production de l’Illiouchine Il-4 cesse au profit de celle de l’Illiouchine Il-6.
La production va cependant être limitée puisque durant le conflit seulement deux régiments de trente-six appareils seront équipés du nouvel appareil soit soixante-douze appareils en ligne, trente-six en Baltique et trente-six dans le Pacifique.
En comptant les deux prototypes et les appareils de réserve, on atteint le chiffre modeste de 180 appareils. A noter qu’au printemps 1955 le régiment de la 6ème DAF reçoit les derniers Illiouchine Il-6 sortis des chaines.
Au combat l’Illiouchine Il-6 se montra un bon appareil notamment à basse altitude. Il n’était cependant pas sans défauts notamment une maniabilité perfectible et une protection qui pourrait être meilleure.
La carrière après guerre sera courte, les derniers Illiouchine Il-6 quittant le service actif en 1961 sans laisser d’immenses regrets.
Caractéristiques Techniques
Type : bombardier-torpilleur bimoteur quadriplace
Masse à vide 6500kg maximale au décollage 13150kg
Dimensions : longueur 16.20m envergure 23.45m hauteur : nc
Motorisation : deux moteurs radiaux Tumansky M-88D 14 cylindres de 2000ch chacun entraînant des hélices tripales
Performances : vitesse maximale 485km/h à 6500m distance franchissable 4000km en mission de reconnaissance 2700km avec 1000kg de bombes ou une torpille plafond opérationnel 8700m
Armement : deux mitrailleuses de 12.7mm ShKAS dans le nez, une mitrailleuse identique dans le poste ventral, deux mitrailleuses de 7.62mm dans la tourelle dorsale (parfois remplacée par une mitrailleuse de 12.7mm UBT), une torpille de 940kg type 45-36 ou deux roquettes BETAB-750DS de 305mm ou jusqu’à 3000kg de bombes et de mines
Equipage : un pilote, un navigateur-bombardier, un mitrailleur dorsal/opérateur radio, un mitrailleur ventral