Le Conflit (173) Balkans (7)

Depuis le début du second conflit mondial en septembre 1948, les tensions entre Rome et Athènes ont repris de plus belle avec des incidents de frontière qu’ils soient terrestres, aériens et mêmes navals. Si cela ne dégénère pas en conflit ouvert c’est que les deux pays ne sont pas prêts à se sauter à la gorge.

Le plan italien est simple : une offensive principale en Epire à l’ouest de la chaine du Pinde et une diversion en Macédoine.

Les objectifs finaux de l’armée italienne sont incertains. Rome avait-elle l’ambition de conquérir la Grèce ? C’est peu probable car les moyens engagés sont tout de même limités, que le terrain est difficile et que les franco-britanniques pourraient être tentés de profiter d’un engagement massif des italiens pour par exemple reprendre la Sardaigne, s’emparer de l’ASI voir pire prendre pied en Sicile et en Italie péninsulaire. Crainte justifiée car les alliés mènent la vie dure aux italiens en Méditerranée occidentale en attendant une déclaration de guerre italienne pour passer à la vitesse supérieure.

Non clairement le but de l’opération CAESAR est de donner une bonne leçon aux grecs voir de s’emparer de territoires supplémentaires, un glacis protecteur pour protéger l’Albanie.

Ce qui conforte cette hypothèse c’est les axes de progression : au nord vers Thessalonique et au sud un mouvement envellopant qui doit permettre de longer le Pinde puis de prendre Larissa par le sud.

Les manœuvres italiennes commencent à la fin du mois d’avril. On rassemble troupes, matériel, munitions. On refait des routes, on aménage des aérodromes et des bases supplémentaires.

Tout cela n’échappe ni aux alliés ni aux grecs qui mènent quelques coups de main et disposent d’agents infiltrés en Albanie mais aussi en Italie péninsulaire qui abreuvent Athènes de rapports. Autant dire que pour l’effet de surprise on repassera….. .

Des frappes aériennes sont menées sur des cibles importantes. Cela entraine des combats aériens mais les grecs veulent conserver une partie de leurs moyens pour protéger Athènes, Larissa et Thessalonique. La Regia Aeronautica maitrise le ciel mais les plus lucides savent que c’est une domination trompeuse.

L’artillerie prend le relais à partir du 3 mai 1949 avec des frappes «massives». Massive à l’échelle italienne ce qui est bien peu par rapport aux démonstrations de feu sur le front de l’est avec des milliers de bouches à feu.

En face l’artillerie grecque riposte mais réserve une partie de ses forces pour repousser l’ennemi quand celui-ci attaquera vraiment.

C’est d’autant plus nécessaires que l’on sait l’artillerie grecque faible en terme de quantité, une partie des pièces des RAD (Régiments d’Artillerie Divisionnaire) servant d’artillerie de corps d’armée pour compenser l’absence d’une artillerie lourde en terme de qualité et de quantité.

L’attaque est initialement prévue le 4 mais le temps est tellement mauvais (pluie, vent) que l’assaut est retardé en attendant que la météo soit plus clémente. Certes le mauvais temps pourrait faciliter l’assaut italien mais un trop mauvais temps est tout aussi nocif pour l’attaquant comme pour le défenseur.

Les fante italiens attaquent le 5 mai 1949 à l’aube. Dès le début le troupier italien sent que la promenade militaire promise par la propagande est à jeter à la poubelle.

Les grecs attendent les italiens de pied ferme. Ils connaissent parfaitement le terrain et depuis septembre 1948 de nombreux blockhaus ont été construits, des tranchées creusées, des barbelés installés, des mines posées.

Par endroit des percées sont obtenues mais comme durant le premier conflit mondial, l’exploitation tarde permettant aux grecs de rétablir un front cohérent et continu.

Les corps d’armées italiens possèdent certes des compagnies de chars mais soit des chars sont dispersés en duos au profit de l’infanterie ou sont tellement peu protégés que même une arme antichar improvisée (comme les fameux cocktails molotovs) pour en venir à bout.

Certains officiers italiens vont amèrement regretter que la division blindée Littorio soit déployée si loin du front pour exploiter les percées. A cette hypothèse certains vont répondre qu’engager une division blindée dans un col sans contrôler les hauteurs c’est un non-sens militaire.

Les grecs plient mais ne rompent pas sur le front thessalien. Ils encaissent, encaissent puis contre-attaquent le 9 mai 1949 pour reprendre une partie du territoire perdu. En face les italiens s’accrochent. Les combats sont violents et impitoyables, on se bagarre à courte distance, à l’arme blanche et à la grenade.

Sur le front macédonien qui devait faire office de diversion, la situation est un peu meilleure, les italiens espèrent basculer leur effort de la Thessalie vers la Macédoine mais ils vont très vite déchanter car les grecs contre-attaquent également sur le front.

De plus pour ne rien arranger la logistique ne suit pas rendant difficile par exemple le déplacement d’une division d’un secteur à l’autre et je ne parle même pas de la réaction des grecs notamment l’engagement de leurs unités de bombardement.

Les italiens sont sérieusement bousculés. L’offensive en Thessalie est suspendue le 12 mai 1949 alors qu’à cette époque les italiens sont pratiquement revenus sur leurs positions de départ.

La Regia Aeronautica mène une offensive massive dans l’espoir de casser les reins ennemis mais elle se heurte à un surprenant effort de l’armée de l’air grecque qui délaisse un temps la protection d’Athènes et de Thessalonique.

La Regia Marina fait preuve d’une grande timidité. Au lieu d’engager ses forces massivement pour casser le dispositif grec, elle se contente de quelques timides bombardements des côtes, de quelques frappes aériennes depuis son porte-avions. Encore aujourd’hui cette attitude reste incompréhensible pour les historiens et devrait le rester sauf découverte de nouveaux documents.

Le 17 mai 1949 les italiens relancent leur attaque en Macédoine. Plusieurs percées sont obtenues mais encore une fois l’exploitation tarde et les grecs peuvent reprendre le terrain perdu.

L’opération CAESAR est officiellement terminée le 21 mai 1949. C’est clairement un échec italien et une victoire grecque.

Non seulement les italiens n’ont gagné aucun territoire mais sans une compréhensible prudence des généraux grecs ils auraient pu perdre une partie de l’Albanie italienne !

Cela à également pour conséquence de décrédibiliser aux yeux des allemands l’armée italienne en particulier et l’Italie en général.

Il va falloir que les allemands s’emploient pour neutraliser la Yougoslavie et la Grèce avant que les alliés ne déploient des troupes pour rendre la neutralisation de la Yougoslavie et de la Grèce trop difficile.

Les alliés décident d’ailleurs d’envoyer des troupes au début du mois de juin. Jusqu’ici ils n’avaient envoyé que des armes, des munitions et des «conseillers» pour remonter le niveau des unités grecques.

Cette aide est appréciée par Athènes tout comme les frappes aériennes, les démonstrations de force navales et des opérations commandos pour titiller le dispositif italien mais elle n’est pas aussi concrète que l’envoi de plusieurs divisions.

Il semble que Paris et Londres aient eu des doutes sur la capacité des grecs à tenir. Les victoires contre les italiens finissent de convaincre de l’utilitée d’envoyer plusieurs divisions pour permettre aux grecs de tenir voir de tendre la main aux yougoslaves dont l’attitude est toujours ambiguë géographie complexe oblige.

Les premiers éléments arrivent à la mi-juin et à la fin du mois plusieurs divisions français, britanniques et une brigade polonaise sont là prêts à repousser une nouvelle offensive italienne ou plus vraisemblablement une offensive combinée germano-italienne.

Les grecs sont plus ambitieux. Ils proposent aux alliés de contre-attaquer en direction de l’Albanie pour rattacher à la mère-patrie l’Epire du Nord mais l’opération Maritsa déclenchée le 7 juillet 1949 va bouleverser les plans grecs.

Cela ne veut pas dire que les grecs vont se tourner les pouces et attendre passivement l’arrivée des italiens et des allemands.

Ils réorganisent leurs unités, remplument des unités affaiblies, entrainent des soldats trop jeunes en mai 1949. Ils tentent de remettre en état fortifications, routes, ponts…… .

Ils maintiennent les italiens sous pressions avec quelques attaques aériennes et surtout des bombardements d’artillerie.

Quelques coups de main sont menés ce qui fait que les avant-postes italiens sont régulièrement assaillis mais les grecs ne se maintiennent pas préférant tout détruire. Parallèlement les alliés mènent des opérations commandos en liaison avec les grecs.

Après deux mois de combat la Yougoslavie finit par succomber. Sans le dire vraiment Belgrade n’à pas apprécié que les alliés comme les grecs aient refusé de déployer des troupes sur leur territoire.

On peut cependant se poser la question si Belgrade aurait accepté la présence de soldats grecs en Macédoine, des régions où on pouvait trouver des populations hellénophones…… .

Le 25 septembre 1949 les dernières unités yougoslaves quittent leur territoire pour se replier sur la Grèce. La Campagne de Yougoslavie se termine, la Campagne de Grèce débute mais avant d’en parler il faut revenir quelques mois en arrière….. .

L’opération CAESAR ce sont aussi des combats sur mer. Le 12 mai 1949 le sous-marin Katsonis est victime des charges de profondeur d’un hydravion italien en mer Egée. Comme c’est souvent le cas avec les sous-marins, il n’y à aucun survivant.

Les combats navals vont se poursuivre puisque le Protefs est perdu après le 7 juin 1949. La cause exacte est inconnue car l’épave n’à toujours pas été retrouvée malgré plusieurs campagnes de recherche.

En surface, les deux marines restent étrangement prudentes. Cela peut se comprendre pour les grecs qui n’ont que des moyens limités et impossible à remplacer rapidement mais pour les italiens s’est moins admissible. Il faut peut être y voir la crainte de devoir combattre les marines grecques, britanniques et françaises.