Le Conflit (179) Balkans (13)

«Malheur aux vaincus !» aurait hurlé Brennus lors de la chute de Rome en 390 a.C. Nul doute que les grecs se savaient davantage dans la position des romains que des gaulois.

Dès l’invasion de la Yougoslavie, la Grèce se sait menacée par les italiens _qui n’ont pas digéré lors de la défaite_ par les allemands et secondairement par les bulgares qui peuvent rêver à un retour sur les rives de la Mer Egée.

Les yougoslaves avaient espéré une intervention grecque dans le Vardar macédonien par exemple pour créer une zone inexpugnable mais les grecs ont vite faite comprendre à Belgrade qu’ils n’en avaient ni les moyens ni la volonté.

Néanmoins pour ne pas désespérer Belgrade (comme jadis il ne fallait pas désespérer Billancourt), des opérations aériennes sont menées pour soulager les troupes yougoslaves.

Cependant comme je l’ai mentionné plus haut, pas certain que Belgrade aurait aimé in fine des troupes grecques dans des zones potentiellement annexables par la Grèce.

On le verra d’ailleurs quand la 1ère Armée Grecque au cours de la contre-offensive alliée pénétrera en Macédoine. Pour dissiper tout malentendu il faudra une rencontre entre Paul 1er et Pierre II, le «Roi Soldat» jura à son «frère» que la Grèce n’avait aucunement l’intention d’annexer des territoires yougoslaves.

Les unités de bombardement sont mises à contribution et subissent des pertes assez sévères mais parfois leur intervention à stoppé l’avancée des troupes ennemies et peut être plus important à permis d’éviter une panique au sein des troupes au sol.

Les grecs soutenus par les franco-britanniques sont confiants dans leur capacité à tenir le plus longtemps possible.

Certains à Athènes pensent que si le front tient le plus longtemps les alliés pourraient être tentés d’envoyer d’autres unités pour libérer la Grèce voir pour avancer en Bulgarie, en Yougoslavie et en Albanie.

Initialement seules les troupes allemandes et italiennes devaient participer à l’offensive, Berlin comme Rome doutant de la capacité des bulgares à mener une offensive en bonne et due forme. A cela s’ajoutait la crainte que la présence de troupes bulgares ne poussent les unités héllènes à être encore plus motivées donc dures à battre.

Finalement les bulgares vont être engagés en raison d’une résistance alliée plus importante que prévue.

Le plan est simple : les italiens attaquent depuis l’Albanie et couvrent le flanc occidental du dispositif de l’Axe, les allemands avancent au centre et les bulgares doivent avancer pour occuper le nord de la Grèce voir certaines îles.

En face les alliés sont dans l’expectative : où l’ennemi va-t-il attaquer ? La seule certitude c’est l’improbabilité d’un assaut par la mer par exemple un débarquement dans le Péloponnèse par l’est ou par l’ouest. En revanche l’assaut principal peut très bien venir des italiens, des allemands voir des bulgares.

On date généralement le début de la Campagne de Grèce au 25 septembre 1949 mais cette date ne fait pas l’unanimité chez les historiens.

Cette date correspond aux premières frappes aériennes et aux premiers combats sur le sol grec mais entre des troupes yougoslaves en retraite et des unités allemandes qui épuisées doivent attendre l’arrivée du reste du dispositif et surtout d’une logistique toujours trop faible surtout dans un territoire aussi pauvre en infrastructures qui plus est ravagées par les combats et les sabotages.

Cela explique pourquoi la chasse alliée va longtemps disputer le contrôle du ciel aux unités aériennes allemandes, italiennes et bulgares.

L’aviation alliée va également mener des missions de chasse-bombardement, les Hawker Tempest britanniques et canadiens notamment attaquant les troupes ennemies à la bombe et à la roquette.

Les chasseurs quand ils ne devaient pas lutter contre les chasseurs, les bombardiers et les avions de reconnaissance ennemis mitraillaient les troupes au sol moins les unités au contact que la logistique aggravant les difficultés dans un secteur où l’Axe n’à jamais brillé sans compter que le terrain et les infrastructures n’étaient pas au niveau d’une guerre moderne gourmande en carburant, munitions, pièces détachées et fournitures diverses et variées.

D’autres historiens retiennent la date du 4 octobre 1949 qui elle au moins ne suscite aucun débat et pour cause ce sont les bulgares qui attaquent sans avoir prévenu leurs alliés !

Es-ce un succès des armées de Boris III ? Hélas non l’avancée est timide pour ne pas dire pusilanime et les grecs leur réserve un comité d’accueil musclé. Les grecs bloquent l’avancée bulgare à l’ouest de Xanthi et vont même contre-attaquer ! Certaines unités découvriront après guerre qu’ils avaient franchit la frontière bulgare.

Hélas pour Athènes le 6 octobre 1949 les allemands attaquent depuis la Macédoine yougoslave ce qui oblige les troupes grecques à devoir se replier sur Serrès puis sur Kavala pour éviter d’être tournés par les allemands.

Heureusement pour les grecs, les allemands ne peuvent engager tous leurs moyens en raison d’un terrain contraint et d’une logistique anémique.

Il est décidé de faire porter l’effort sur les trois corps d’armée en ligne (18ème Corps de Montagne ou XVIII.Gebirgskorps, 31ème Corps d’Armée ou XXXI.AK et 32ème Corps d’Armée ou XXXII.AK) mais de manière successive, un corps avançant (ou tentant de le faire) pendant que les deux autres fixent les troupes ennemies.

Quant au 35.PzK (35ème Corps Blindé) il reste en arrière en attendant la percée qui ne viendra jamais vraiment envoyant aux oubliettes la possibilité d’une offensive blindée de grand style. Les Panzermann frustrés tenteront de renouer avec les folles chevauchées de la cavalerie de jadis dans les steppes russes.

Ils interviendront bien sur mais souvent par petits paquets, formant le cœur de Kampfgruppe pour s’emparer d’un objectif mineur et non d’une cible stratégique.

Les combats sont violents et impitoyables. Dès les premiers jours on signale les premières exactions de la soldatesque teutone sur les civils grecs (qui prennaient souvent les armes pour aider leurs soldats) et les premiers crimes de guerre sur des prisonniers abattus ou laissés sans soins, sans eau, sans nourriture.

Difficile de savoir si tout cela était délibéré. C’est qui est certain en revanche c’est que ceux qui espéraient que ces exactions allaient provoquer l’effondrement du pays et de son armée ont du vite revoir leurs plans.

Résultat la ville de Thessalonique ne tombe que le 30 novembre 1949 ! De l’aveu même des grecs c’est un miracle mais cela se fait au prix d’une ville détruite à 72% et un port ravagé, encombré d’épaves diverses et variées.

Symboliquement ce sont les bulgares qui rentrent les premiers dans la grande ville du nord mais quand on demande à un officier allemand de liaison la part du boulot réalisée par les troupes de Sofia il répond «10%». Ambiance….. .

Quand à la ville de Thessalonique elle sera (très) partiellement reconstruite par les bulgares peuplées de colons bulgares, le port lui aussi en partie dégagé dans l’espoir d’en faire une potentielle base navale bulgare puis dans l’après guerre la vitrine portuaire et industrielle d’une nouvelle Bulgarie. On connait la suite…. .

Non ? Bah en réalité le port ne va accueillir qu’une poussière navale incapable de faire autre chose que sécuriser les approches immédiates du port. Ce dernier sera fortifié mais comme le montrera l’opération THUNDERBOLT, ces défenses seront loin d’être infranchissables.

Par la suite les allemands demandent aux bulgares d’occuper le nord-est de la Grèce et le maximum d’îles à proximité plutôt que de leur confier une avancée vers le sud par exemple en direction d’Athènes. C’est ainsi qu’ils s’emparent de Lemnos le 5 décembre 1949 et de l’île de Samothrace le 7 décembre 1949.

A chaque fois pas de véritables combats mais plutôt quelques escarmouches symboliques avant que les troupes grecques n’évacuent cahin caha en direction du sud après avoir saboté le maximum d’installations et après avoir laissé des «cadeaux souvenirs» (αναμνηστικά δώρα/anamnistiká dóra) sous la forme de mines et de pièges explosifs qui vont engendrer une véritable psychose chez les unités en garnison dans ces îles qui pensaient avoir tiré le gros lot en évitant les combats les plus durs.

Les italiens attaquent eux le 6 octobre 1949 mais ne sont pas plus heureux que cinq mois plus tôt lors de l’opération CAESAR. Les troupes sont pourtant reposées, des renforts sont arrivés, les leçons tirées mais c’est comme si les italiens jouaient systématiquement de malchance.

Plusieurs attaques sont menées (6, 10 et 15 octobre 1949) mais il faut attendre la quatrième le 19 octobre 1949 pour qu’enfin les italiens avancent en territoire grec en profitant essentiellement de l’épuisement des unités qui pour beaucoup étaient déjà là au mois de mai.

Certes de jeunes recrues étaient arrivées pour recompléter les unités mais si la fatigue physique avait été atténuée, la fatigue mentale était toujours là et bien là.

Le premier objectif, la ville de Ioanina tombe aux mains des troupes transalpines le 24 octobre 1949 en l’occurence des unités de la 3ème Armée, la 15ème DI italienne se voyant attribuer les lauriers de cette conquête ô combien importante notamment pour le moral du fante italien.

A cette époque les allemands et les bulgares sont encore loin d’avoir pris Thessalonique ce qui fait que les italiens étaient en avance sur leurs alliés mais hélas pour la gloire des armes de Rome les troupes italiennes étaient dans l’incapacité de poursuivre leur avancée vers Larissa qui ne va tomber que le 5 décembre 1949 et encore avec le concours des troupes allemandes qui s’étaient entre-temps emparés de Thessalonique.

Etonnamment ou pas les italiens ne s’intéressent pas à Corfou qui va rester aux mains des grecs jusqu’en février 1950.

Ce choix peut s’expliquer par la difficulté d’y prendre pied et sur le fait que la Regia Marina montait une garde vigilante pour empêcher l’île de servir de forteresse refuge ou de point d’appui pour un futur assaut en direction par exemple de l’Albanie dans une logique de combat à front renversé.

Quelques coups de main sont bien menés mais il s’agit de timides piqures d’épingle qui ne changent pas grand chose à la situation.

Les allemands tentent une première offensive contre Athènes le 12 décembre 1949 mais les grecs comme les français à Verdun en 1916 leur hurlent «δεν περνάμε !» (On ne passe pas !) et repoussent un premier assaut non sans subir de lourdes pertes, des pertes quasiment impossibles à compenser malgré une mobilisation totale de la population grecque.

Les allemands et les italiens vont prendre leur temps, préparant soigneusement une nouvelle offensive accumulant non sans mal en raison d’infrastructures déficientes et/ou détruites les quantités incroyables de munitions, de carburant, de vivres, de pièces détachées nécessaires pour une offensive en bonne et due forme.

La Luftwaffe redéploie ses unités sur des aérodromes en plus ou moins bon état. Les aviations alliées qui avaient pu reprendre un peu du poil de la bête ces derniers jours doivent à nouveau s’employer face à des unités allemands qui vont pouvoir durer davantage au dessus de l’Attique et du Peloponnèse.

Les allemands mènent plusieurs coups de main pour tester le dispositif allié. De leur côté les italiens fixent les troupes grecques et alliées encore déployées sur la rive nord du Golfe de Patras. La ville elle même située sur la rive sud est copieusement bombardée par l’aviation ou par l’artillerie de marine, devenant un champ de ruine. L’aviation grecque et alliée intervient pour calmer les ardeurs des artilleurs italiens qu’ils soient terriens ou marins.

Aux assauts directs l’Axe préfère le contournement et l’infiltration. La raison n’est pas difficile à cerner : éviter de coûteux assauts frontaux _depuis le premier conflit mondial on sait que ce n’est pas une bonne tactique_ et espérer appuyer le levier qui fera s’écrouler tout le dispositif ennemi.

L’année 1949 se termine par un front se situant sur la rive nord du Golfe de Patras et au nord d’Athènes à environ 180km de la capitale grecque, les allemands étant passés par le célèbre détroit des Thermopyles où les grecs se sont accrochés le plus longtemps possible avant de décrocher.

Comme le dira un soldat grec anonyme «Impossible de ne pas se battre ici ! Sans ça les âmes des fiers guerriers spartiates nous auraient maudits à jamais !».

Entre-temps l’Axe s’est emparé de différentes îles que ce soit l’île d’Eubée pour les allemands (20-21 décembre 1949) où les grecs mènent d’habiles combats retardateurs alors que les italiens se sont emparés de l’île de Céphalonie le 23 janvier 1950 mais vont échouer à s’emparer de l’île de Zanthe (ou Zante) qui va rester jusqu’au bout sous contrôle allié.

Les fêtes de fin d’année sont plus calmes (NdA oui je sais les grecs sont orthodoxes donc ils ne sont pas concernés mais vous avez compris le truc) avec des combats aériens quelques duels d’artillerie mais dans l’ensemble les deux bêtes lèchent leurs plaies en attendant de se sauter à nouveau mutuellement à la gorge.

Symboliquement le premier obus de l’année 1950 est tiré par un canon grec qui tire une salve de douze obus entre 23.59 et 00.01 avant que d’autres canons alliés ne tirent. Les allemands se contentent de quelques tirs pour montrer qu’ils sont là mais ne cherchent pas à faire taire les canons alliés. Ce n’était que partie remise….. .

Quand l’année 1950 commence les alliés savent qu’il leur saura très dur de résister à une offensive germano-italienne décidée. Les grecs pressent Paris et Londres d’envoyer davantage de troupes pour éloigner le front de la capitale mais les franco-britanniques font comprendre aux grecs que le front balkanique n’est pas prioritaire par rapport au front occidental.

Clairement la ville d’Athènes est condamnée. Le gouvernement grec et le roi décident d’évacuer la capitale direction la Crète et Heraklion. C’est chose faite le 9 janvier 1950 dans le plus grand secret au point que les habitants d’Athènes ne l’apprendront pas avant la chute de la ville.

On presse alors Paul 1er de quitter le territoire grec pour l’Egypte, les anglais lui propose même une splendide villa à côté d’Alexandrie.

Le roi grec est furieux. Devant l’ambassadeur de Grande-Bretagne, il se coupe la paume de la main avec une dague qui ne le quittait jamais et macule de son sang le sol de la Crète. «Ecoutez moi bien monsieur l’ambassadeur ! Je ne quitterai jamais le sol grec ! Jamais !». Les britanniques n’insisteront pas ayant compris que le roi grec était du genre obtus et obstiné.

Dès que les combats le permettront il se rendra en Grèce pour soutenir le moral des troupes, visitant les premières lignes, remontant le moral, s’inquiétant sincèrement du sort des soldats. Il n’hésite pas à tancer un général qui selon lui méprisait ses soldats et notamment leurs besoins essentiels : nourriture, soins, repos.

Tout cela lui valu le surnom de «Roi-Soldat» (βασιλιάς στρατιώτης vasiliás stratiótis). Blessé lors d’un bombardement aérien allemand sa popularité est à son comble ce qui semble augurer d’un avenir radieux pour la monarchie grecque. C’est bien simple les soldats en première ligne le considère comme leur «frère de sang».

Comme le dira un soldat anonyme «Si mon roi est capable de verser son sang pour libérer notre patrie, qui suis-je moi simple paysan pour refuser de faire mon devoir ?».

Entre-temps les allemands ont repris leur assaut en direction d’Athènes, les combats sont violents, furieux et impitoyables.

Un premier assaut échoue le 6 janvier 1950 mais le deuxième le lendemain permet de percer le front. Les grecs et les alliés résistent le plus longtemps possible pour permettre d’évacuer le maximum d’hommes, de matériel mais aussi de civils qui fuient la soldatesque allemande dont ils connaissent ou redoutent la brutalité.

Le 13 janvier 1950, le croiseur lourd HMS Drake bombarde l’île d’Eubée où les allemands préparaient visiblement un assaut de type commando sur Athènes. Ce bombardement est un succès _les allemands ne tenteront pas un tel assaut pour déstabiliser le dispositif allié_ mais il entraine une riposte de l’aviation allemande.

Le HMS Drake le sait et se replie rapidement vers le sud dans l’espoir d’échapper à toute riposte. Le temps se dégrade avec des grains réguliers ce qui rassure les marins britanniques.

Hélas pour eux, une brusque éclaircie le révèle à des bombardiers allemands, des Junkers Ju-188 qui passent à l’attaque. Malgré une DCA rageuse, ils placent deux bombes qui endommagent sérieusement le croiseur lourd qui parvient néanmoins à se replier. Il en est quitte pour six mois de réparations jusqu’en juillet 1950, revenant donc à une date où la Campagne de Grèce était terminée tout comme l’engagement du croiseur de classe Admiral dans le bassin oriental de la Méditerranée.

Résultat la capitale Athènes ne va tomber que le 17 janvier 1950. La ville est ravagée. Des photos mémorables sont prises notamment de nuit où l’Acropole se détache d’une ville ravagée par les incendies provoqués par l’artillerie, l’aviation mais aussi les sabotages et les pillages.

Après cette prise compliquée, les allemands tentent de prendre les alliés de vitesse. Pour cela ils sortent une carte magique, le Brandeburger Regiment, une unité commando spécialisée dans les raids et les coups tordus, l’équivalent pour la Heer du Bataillon Valkyrie de la S.S.

L’objectif c’est la prise du pont qui traverse le canal de Corinthe. Si cet ouvrage est pris intact, non seulement les allemands pourront occuper le Péloponnèse et de là viser la Crète (une opération IKARUS est déjà prévue avec d’abord des frappes aériennes en attendant soit un assaut aéroporté ou un assaut amphibie voir les deux même si Berlin doute de la capacité de la marine italienne à assurer sa part du boulot) mais aussi pourront couper la retraite des alliés.

Seulement voilà les alliés connaissent parfaitement l’importance de cet ouvrage. Il est donc solidement protégé avec des blockhaus, des champs de mines, des barbelés, de nombreux canons antichars et antiaériens.

Mieux même des troupes fraiches essentiellement canadiennes et australiennes montent une garde vigilante. Ce n’est pas la même chose de combattre des troupes reposées brûlant d’en découdre que d’affronter des unités fatiguées, démotivées et en retraite.

Le 24 janvier 1950 à l’aube, les Brandebourgeois déposés à distance par des planeurs et déguisés en soldats grecs tentent de s’emparer du pont mais se trompant dans le code du jour, ils déclenchent une terrible fusillade sur la rive nord du canal.

En dépit du fait que des troupes grecques, britanniques et françaises soient encore sur la rive nord, le pont saute immédiatement. C’est un cuisant échec pour les brandebourgeois qui perdent 32 hommes sur 68 engagés, les 36 autres parvenant non sans mal à regagner les lignes allemandes.

Si pour les alliés la situation est compliquée, pour les allemands la situation est dramatique. En effet il faut soit monter une offensive en bonne et due forme ou alors confier aux italiens une tentative de débordement par le golfe de Patras. Autant dire deux possibilités aux chances de réussite assez réduites….. .

Si l’Axe hésite sur la marche à suivre, les alliés eux ont plus de certitudes : il faut absolument tenir le Péloponnèse.

En contrôlant cette immense presqu’île de 21379 kilomètres carrés ils s’offrent à peu de frais un «porte-avions incoulable» (pour reprendre une expression attribuée à Mussolini) et surtout maintiennent la pression sur la Grèce occupée et sur les accès à l’Adriatique.

La presqu’île se transforme en une forteresse avec lignes fortifiées, aérodromes, dépôts de toute sorte. Un travail de titan sur un sol aussi pauvre qu’ingrat. C’est bien simple il faut quasiment tout importer.

Le trafic en direction des ports du Péloponnèse quintuple en quelques jours. Les aviations de l’Axe tentent de s’y opposer, remportent quelques beau succès mais la réaction des aviations alliées est énergique et plutôt efficace. Quant aux sous-marins italiens leur impact est assez limité moins faute de moyens qu’en raison d’une stratégie largement perfectible.

La Crète devient une base arrière vitale pour l’effort de guerre allié. On trouve quelques bases opérationnelles qu’elles soient aériennes (Maleme Heraklion Kestell notamment) ou navales comme La Sude mais surtout des dépôts logistiques, des centres de regroupement où dans un premier temps les troupes dispersées retrouvent leurs camarades ou se reposent en attendant un transfert vers l’Egypte pour réentrainement et rééquipement.

Généralement des convois amènent d’Egypte et de Libye (occupée par les alliés depuis l’été 1949 et le succès de l’opération BAYARD) du carburant, des pièces détachées, des munitions, des vivres et tout ce qui est nécessaire à une armée moderne c’est-à-dire motorisée.

Ensuite des caboteurs isolés (pour les plus rapides) ou en convois (pour les plus lents) rallient le Peloponnèse où des ports de campagne ont été aménagés.

Leurs capacités sont bien plus limités qu’un port comme Le Pirée ou Patras mais les alliés n’ont pas le choix, le premier étant aux mains des allemands et le second sous le menace constante de l’aviation ennemie qu’elle soit italienne ou allemande.

Le transbordement se faisait essentiellement de nuit même si parfois le jour était bien avancé que les navires étaient toujours au mouillage pour débarquer leur précieux chargement.

Cela attirait parfois l’aviation ennemie qui réalisa quelques beaux cartons mais au prix de lourdes pertes face à une DCA puisante et une chasse alliée mordante.

Une fois vidés les navires reprenaient la mer direction la Crète où ils étaient promptement rechargés pour une nouvelle rotation. Certains étaient transformés en navires hôpitaux pour évacuer vers la Crète les blessés et les malades, le haut-commandement allié voulant éviter à tout prix qu’une épidémie n’éclate sur cette presqu’île surpeuplée.

Alors que les alliés ont l’oeil rivé sur l’isthme de Corinthe (qui devient l’une des zones les plus minées du monde) ils hésitent sur la conduite à tenir concernant les Cyclades. Certains sont partisans d’un effort conséquent pour conserver ses îles mais d’autres estiment que cela apporterait davantage de problèmes que de solutions.

Cette hésitation est fatale à l’effort de guerre allié. Les petites garnisons grecques font ce qu’elles peuvent tout comme l’appui allié assuré par l’aviation et la marine.

Les allemands finissent par s’en emparer mais pour un prix jugé excessif à Berlin. Ces îles ne seront d’ailleurs d’aucun avantage pour l’Axe mais une servitude supplémentaire en imposant une dispersion des forces.

Le 2 février 1950 un nouveau gouvernement grec est créé à Athènes. Dirigé par le colonel Soriotis, il est immédiatement rejeté par une bonne partie de la population grecque.

Ancien protégé de Metaxas mais viré de l’armée pour alcoolisme et corruption, le colonel Soriotis y voit ici la chance de sa vie.

Hélas pour lui il n’aura qu’un rôle très limité les allemands lui faisant comprendre qu’il n’est qu’un gouvernement fantôche de plus.

Le 9 février 1950 le gouvernement grec légitime installé à Heraklion annonce qu’un conseil de guerre s’est réuni et à condamné à mort le colonel Soriotis par contumace pour intelligence avec l’ennemi et haute trahison. La justice n’aura pas le temps de s’exercer car le colonel Soriotis sera tué par un bombardement aérien allié sur Athènes le 17 mars 1952.

Pour protéger son «pouvoir» il dispose d’une Force de Sécurité aussi féroce qu’inefficace qui se distinguera davantage par les tortures, les viols et les exactions que par la répression des différents mouvements de résistance.

Les italiens comme les allemands ne confieront d’ailleurs à la FS que des missions de garde statique pas trop exigeantes. Même des missions de nettoyage semblaient hors de leur portée.

Revenons aux opérations militaires. Après trois semaines de pause (24 janvier-14 février 1950) au cours desquelles les combats se sont limitées à des escarmouches et des duels d’artillerie _davantage pour maintenir la pression sur l’ennemi que pour obtenir un quelconque avantage_, des combats aériens et quelques affrontements navals, l’Axe reprend l’initiative en lançant l’opération MARTELLO/HAMMER (Marteau).

Lancée le 14 février 1950 elle doit combiner une diversion bulgare (qui fait vite pschit ce qui ne va pas améliorer les relations militaires entre allemands et bulgares), une fixation allemande dans l’isthme de Corinthe et une traversée du Golfe de Patras par trois divisions italiennes (23ème DI, 1ère DIAlp et 30ème DI).

C’est un plan complexe qui rappelle une certaine opération….ANVIL que les alliés lanceront en 1952 avec le succès que l’ont sait. Quand on voit que ces deux opérations sont pour ainsi dire des décalques, on à du mal à comprendre pourquoi le haut-commandement de l’Axe aura du mal à percevoir les axes de progression alliés.

Les allemands remplissent leur part du contrat en parvenant par endroit à franchir l’isthme et le canal mais les ponts mis en place pour faire passer renforts et matériel lourd sont systématiquement détruits par une artillerie alliée diablement efficace et une aviation alliée qui n’hésite à prendre tous les risques pour empêcher les chars de passer.

Résultat : les allemands ne parviennent pas à réunir une «masse critique» pour déstabiliser un dispositif allié qui s’est organisé en profondeur pour absorber le traumatisme d’une percée, ayant parfaitement intégré les leçons de la Campagne de France, les troupes alliées déployées sur le front grec utilisant comme à l’ouest la tactique du herisson pour séparer les chars de leur infanterie d’accompagnement.

De leur côté les italiens ont semble-t-il plus de succès mais l’exploitation est d’une désespérante lenteur ce qui permet aux unités alliées de se resaissir et de contre-attaquer.

Il semble admis aujourd’hui que les alliés étaient prêts à laisser les allemands avancer (en comptant sur le fait que l’isthme rendait difficile une exploitation rapide) mais que les assauts italiens devaient être impitoyablement châtiés.

Cette première tentative (14-19 février 1950) est suivit d’une seconde (22-25 février) et d’une troisième qui menée du 28 février au 3 mars semble prometteuse.

Hélas pour l’Axe et heureusement pour les alliés les têtes de pont italiennes et allemandes chétives et malingres vont être peu à peu réduites, forçant troupes transalpines et d’outre-Rhin à repasser pour les premiers le Golfe de Patras et pour les seconds le canal de Corinthe.

L’opération MARTEAU est considérée comme terminée le 8 mars 1950 une fois les derniers points de résistance germano-italiens brisés et nettoyés.

Les deux camps se replient sur leurs positions et se préparent à un nouveau round tels deux boxeurs groggys mais qui ne veulent surtout pas jeter l’éponge.

A cette époque aucun belligérant ne pense que la Campagne de Grèce touche à sa fin. Il faut dire que la décision ne va pas se faire sur terre ou dans les airs mais sur mer (NdA voir la partie consacrée à la Bataille du Golfe de Zant(h)e).