Etats Unis (123) Armée de terre (13)

Canons automoteurs et automouvants

Avant-propos

Au cours du premier conflit mondial, l’obsession des alliés comme des allemands est d’obtenir la percée. La percée est obtenue à plusieurs reprises mais l’exploitation échoue faute de moyens adaptés.

La cavalerie à cheval est inapte et si le char est l’arme rêvée pour percer et exploiter, il manque non seulement d’un véhicule pour transporter les fantassins accompagnant les chars mais également d’un moyen mobile d’appui-feu.

Pour remorquer les pièces les plus lourdes, on utilise des tracteurs chenillés Caterpillar ou Holt. Ces tracteurs vont également servir de base aux premières expérimentations de char mais également l’emport de canons pour former les premières pièces automouvantes notamment côté français.

Hélas, l’Armistice du 11 novembre 1918 empêche l’utilisation en masse lors de l’offensive du printemps 1919 de pièces automouvantes aux côtés de chars et d’avions. En absence du concept de RETEX, les pièces automotrices cessent d’être une priorité pour les armées européennes.

Côté américain, aucun canon automoteur n’est mis au point avant l’armistice. Quelques expérimentations ont lieu dans les années vingt et trente mais ne débouchent pas sur une production en série.

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M-7 Priest. Le pasteur en chair s’apprête à faire son sermon à l’aide de « Ma Deuce »

Il faut attendre la création des divisions blindées en septembre 1943 pour que la production de canons automoteurs soit relancée.

En urgence, des canons de 105mm sont embarqués sur des half-track mais ces véhicules sont remplacés par un canon automoteur chenillé le M7 surnommé Priest en raison de la présence d’un tourelleau en forme de chair d’église.

Cet automoteur à canon de 105mm va équiper principalement les unités d’artillerie des divisions blindées mais également des unités de la «Réserve Générale». Au cours du conflit, un canon de 155mm automouvant, le M12 apparaît dans des unités d’artillerie comparable à notre Réserve Générale.

M12 Gun Motor Carriage 2

Canon automouvant de 155mm M-12

A la fin du conflit, plusieurs projets de Self-Propelled Gun sont prêts à entrer en production pour remplacer les canons automoteurs ayant fait le coup de feu durant le second conflit mondial.

105mm Howitzer Motor Carriage T19

105mm Howitzer Motor Carriage T19 3

Suite à la décision de mettre sur pied des divisions blindées, se pose la question de l’appui-feu qui doit être suffisamment mobile pour suivre les chars. Une pièce tractée étant exclue, il faut envisager une pièce «mobile».

On envisage un canon monté sur camion, sur un châssis semi-chenillé et sur un châssis chenillé, imitant notamment la France et l’Allemagne.

La première hypothèse est rapidement abandonné (il semble que cela n’à été qu’une simple hypothèse de travail) mais les deux autres sont étudiées avec intérêt.

La configuration chenillée plus prometteuse est choisie mais comme la mise au point peut prendre du temps, il faut pouvoir équiper rapidement les divisions pour entraîner les servants, mettre au point les tactiques et faire face à l’éclatement impromptu d’un conflit.

La solution d’urgence trouvée est d’installer un obusier de 105mm sur un semi-chenillé, donnant naissance au T19. La première version voyait le canon simplement installé à l’arrière sans aménagements mais suite à des problèmes de stabilité au moment du tir, le véhicule est modifié avec un canon orienté vers l’arrière et des verrins hydrauliques pour le stabiliser au moment du tir.

Le véhicule se montre efficace et menace un temps le futur M7 mais ce dernier finit par triompher en raison de sa meilleure protection et d’une meilleure mobilité.

350 T19 sont produits entre juin 1943 et septembre 1944 date de l’arrêt de la production. Le véhicule reste en service jusqu’en septembre 1946 quand le M7 le remplace définitivement.

Les véhicules en bon état son stockés et réutilisés au printemps 1950 pour permettre l’entrainement des unités nouvellement créées en attendant la sortie d’usine de nouveaux M7.

Leur carrière s’achève à la fin du conflit, ils sont tous feraillés sauf quelques exemplaires conservés dans des musées ou sur des mémoriaux.

Caractéristiques Techniques du 105mm Howitzer Motor Carriage T19

Poids : à vide 8170kg en orde de route 9750kg

Dimensions : longueur 6m largeur 2m hauteur (sans mitrailleuse) 2.5m

Motorisation : White 160AX de 150ch

Performances : vitesse maximale 70 km/h sur route rayon d’action 320km

Blindage : 6.4 à 12.7mm

Armement : un obusier de 105mm avec huit obus immédiatement prêts au tir une mitrailleuse de 12.7mm Browning M2HB

Equipe de pièce : sept hommes plus un conducteur

105mm Howitzer Motor Carriage M7 «Priest»

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Après des années d’expérimentation, l’artillerie américaine réussit à produire un canon automoteur, un Self-Propelled Gun.

Comme nous l’avons vu plus haut, plusieurs configurations furent envisagées mais rapidement le châssis chenillé s’est imposé, permettant à un canon de suivre les chars pour assurer leur appui-rapproché mais également pour réaliser des tirs d’interdiction pour empêcher l’arrivée de renforts ennemis.

Après avoir envisagé de créer un châssis chenillé neuf, l’US Army et l’Ordnance Corps décide de partir du châssis du char moyen M3.

Le châssis est renforcé pour pouvoir encaisser le recul du canon de 105mm mais mis à part ces modifications, le châssis est identique à celui de la «Tour de Babel», le surnom donné par les français au M3 en raison de sa taille.

L’aménagement fait l’objet d’âpres débats. Certains penchent pour une installation en coque pour obtenir un véhicule le plus bas possible. L’avantage est de pouvoir facilement se camoufler mais présente l’inconvénient de limiter le débattement de la pièce.

Une deuxième école prône l’installation dans une tourelle alors qu’une troisième «chapelle» préconise la construction d’une superstructure au dessus de la coque du char. C’est cette troisième école qui triomphe des deux autres et donne naissance au M7.

Six prototypes sont commandés en mars 1945, intensément testés jusqu’à la fin de l’année avant d’être officiellement adopté en janvier 1945 sous le nom de 105mm Howitzer Motor Carriage M7, le surnom Priest (prêtre) venant des britanniques,le tourelleau du mitrailleur ressemblant à une chaire d’église.

Ces automoteurs qui n’ont rien à envier à leurs homologues français et allemands (il faudra attendre le conflit pour que la Royal Artillery s’équipe enfin de SPG) va être utilisé à la fois par les unités d’artillerie des divisions blindées mais également par les groupes de réserve.

Les trois divisions de cavalerie et les seize divisions blindées regroupent au total soixante-seize groupes équipés de M7 Priest soit un total de 912 pièces auxquelles il faut ajouter 432 M7 de la «Réserve Générale» soit un total de 1344 automoteurs.

Prévoyant des pertes élevées, les américains vont commander pas moins de 5700 M7 Priest produits en trois variantes, la M7A1 produite à 2100 exemplaires, la M7A2 produite à 1800 exemplaires et la M7A3 produite à 1800 exemplaires également.

Outre les Etats-Unis, cet automoteur à été utilisé par la Grande-Bretagne (qui allait le remplacer rapidement par le Sexton), la France, la Belgique, les Pays-Bas, la Pologne et la Tchécoslovaquie, la Norvège et le Danemark _ces quatre pays occupés par les allemands disposaient néanmoins d’unités en exil combattant sous commandement français pour les deux premiers, sous commandement britanniques pour les deux suivants_, le Brésil, l’Argentine, le Mexique, la Chine, l’Inde, l’Australie et la Nouvelle-Zélande.

Une fois le conflit terminé, le M7 Priest à été rapidement remplacé par de nouvelles pièces automotrices de 105 et de 155mm. Les unités de Réserve et de la Garde Nationale l’ont utilisé jusqu’au milieu des années soixante.

Comme dans beaucoup d’autres moments, des pays ont profité des surplus américains pour s’équiper en canons automoteurs à un prix défiant toute concurrence soit pour renouveler leur parc ou pour reconstituer leurs forces.

C’est ainsi que des M7 Priest ont été cédés au Portugal, à l’Espagne, à l’Italie, à l’Allemagne, à la Yougoslavie, à la Grèce, à la Turquie, à l’Iran, à la Thaïlande, à la Birmanie et au Japon.

Il n’y à pas eu de variantes dédiées du M7. Certains Priest ont perdu leur canon pour servir de ravitailleur d’artillerie, de dépanneur, de véhicule de dépannage ou de transport de troupes mais il s’agissait d’improvisations sur le terrain et non de variantes mises au point à l’arrière et bénéficiant donc d’une appellation officielle.

Caractéristiques Techniques du 105mm Howitzer Motor Carriage M7

Type : obusier automoteur

Poids : à vide 19.4 tonnes en ordre de route 21.1 tonnes

Dimensions : longueur 5.7m largeur 2.7m hauteur (sans mitrailleuses) 2.5m

Motorisation : un moteur en étoile Wright R975C1 de 400ch

Performances : vitesse maximum 40 km/h rayon d’action 230km

Blindage : 51mm à l’avant

Armement : un obusier de 105mm avec 57 coups dans le véhicule. Une remorque M8 permet d’embarquer 42 coups supplémentaires. Une mitrailleuse de 12.7mm Browning M2HB avec 300 coups assure la défense rapprochée.

Equipage : sept hommes

M12 Gun Motor Carriage

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Le succès du M7 donne des idées aux américains d’utiliser des pièces lourdes sur un châssis de char. Il ne s’agit pas d’équiper les divisions mais de doter les groupes de réserve d’une pièce automotrice/automouvante pour suivre à distance la progression des forces de l’avant.

En juin 1945, plusieurs châssis sont utilisés pour différents essais. Deux châssis M3, deux châssis M4 et deux de M26 sont acquis par l’Ordnance Command pour mettre au point une pièce automouvante de 155mm.

Le chassis du M26 se révèle idéal mais pour des raisons de coût, les artilleurs américains doivent se contenter du duo M3/M4. Quatre nouveaux prototypes sont produits au printemps 1946.

La mise au point est délicate et certains artilleurs sont sceptiques quant à son utilité. Au final la production de ce système adopté sous le nom de M12 Gun Motor Carriage est décidé au printemps 1948.

Le M12 combine un chassis de M4 renforcé avec des vérins hydrauliques s’abaissant au moment du tir. Le conducteur reste installé à l’avant, le chef de pièce prenant place à sa droite, défendant le véhicule avec une mitrailleuse calibre .30 (1500 cartouches). Le canon _un GPF puis un Long Tom_ est installé au milieu, le moteur à l’arrière.

Le M12 ne pouvant embarquer que quatre obus, un ravitailleur d’artillerie baptisé M30 Artillery Carrier qui est un M12 muni d’un espace de stockage à la place du canon. Quarante-huit obus peuvent être embarqués dans l’espace de stockage, capacité qui peut être augmentée par l’adjonction d’une remorque.

Douze groupes de vingt-quatre M12 sont mis sur pied au sein de la Réserve Générale soit un total 288 pièces automouvantes en ligne. 580 M12 et 750 M30 sont sortis des chaines de montage durant le conflit.

Deux groupes ont été envoyés dans le Pacifique où ils ont surtout servis d’armes anti-blockhaus en Chine notamment, les dix autres étant utilisés de manière plus conventionnelle en Europe, deux en Norvège et les huit autres en Europe du Nord-Ouest.

La carrière de cet automouvant après guerre à été très courte. Jugée inapte à la guerre en ambiance nucléaire, déclassé par des pièces plus lourdes (175 et 203mm) et par des automoteurs de 155mm en tourelle, le M12 à été retiré du service dès 1959. La réserve l’à utilisé jusqu’en 1963.

Caractéristiques Techniques du 155mm Gun Motor Carriage M12

Type : canon automouvant

Poids en ordre de combat 26762kg

Dimensions : longueur 6.67m largeur 2.67m hauteur 2.88m

Motorisation : un moteur Continental Motors R-975 de 400ch

Performances : vitesse maximale 38 km/h sur route 24 km/h en tout-terrain Distance franchissable 225km

Blindage : coque 51mm

Armement : canon de 155mm M1917 ou M1918 puis un Long Tom pour les dernières pièces de série, une mitrailleuse calibre .30 à l’avant

Equipage : six hommes

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