22-Armée de terre : armement et matériel (32)

Somua S-45/Renault DAC-2

A l’origine (lointaine), les AMX-38 et 39

AMX-39, un démonstrateur qui ne dépassera pas le stade du prototype

AMX-39, un démonstrateur qui ne dépassera pas le stade du prototype

En 1936, le gouvernement du front populaire soucieux de reprendre la main dans le domaine des fabrications d’armement nationalise l’atelier de montage des chars de combat et chenillettes de la société anonyme des usines Renault qui devient l’Atelier de construction d’Issy les Moulineaux ou AMX.

Dirigé par le brillant Ingénieur Général de l’Armement Joseph Molinié, cet atelier est d’abord chargé de produire et d’améliorer les chars existants comme le Renault R-35 qui avec une suspension AMX et autres améliorations, devient le Renault R-40.

Les ambitions du jeune atelier ne s’arrête pas à l’amélioration. Il souhaite produire ses propres chars légers et concurrencer voir à terme supplanter les manufacturiers privés. Le prototype n°1 ou AMX-38 présenté au printemps 1939 donne ainsi un char d’un poids semblable à celui du FCM-36, propulsé par un moteur diesel avec pour armement un canon de 37mm SA modèle 1938.

Ce premier projet n’est qu’un galop d’essais puis qu’aussitôt est mis en chantier un prototype n°2 baptisé AMX-39 plus lourd, mieux protégé et mieux armé avec un canon de 47mm SA modèle 1935 (identique à celui du S-35).

En effet, le 15 décembre 1939, le général Keller, inspecteur des chars demande de relancer les études pour de futurs chars mieux armés, mieux protégés.

Ainsi le canon de 37mm doit être abandonné au profit du 47mm et le blindage de 40mm doit éder la place à du 60mm, donnant un char léger de 15 à 20 tonnes contre 10-12 tonnes pour les générations précédentes ce qui impose un moteur plus puissant pour maintenir le rapport de 9 ou 10 ch/tonne

Notons l’inflation du poids dans les différentes catégories. Le Renault G1 de 35 tonnes est issu d’un programme réclamant un char de 20 tonnes pour compléter le B1bis avec un char plus léger qui se révélera aussi lourd que celui qu’il devait compléter.

Le projet continue à être développé, sans empressement maintenant que la «paix» même si il s’agit d’une paix fragile, davantage une paix armée qu’une pax romana. Le 9 mars 1940, le général Keller maintien les spécifications décidées plus haut pour un futur char d’accompagnement à savoir 20 tonnes, 60mm de blindage et un rapport poids/puissance de 10 tonnes.

La voix semble libre pour le petit atelier aux relations orageuses avec l’inspection générale des chars mais c’est alors qu’apparait un projet concurrent de la firme Renault baptisé DAC-1 qui va coiffer sur le poteau l’AMX-39.

Le Renault DAC-1 ? Non plus…….

L’AMX-39 qui souffre de problèmes de motorisation n’est présenté en prototype qu’au mois d’octobre 1940, le Renault DAC-1 lui à été présenté à la commission un mois plus tôt.

C’est un élégant char de 16 tonnes était protégée à 60mm avec un moteur de 230ch et disposait d’une tourelle biplace avec un canon de 47mm SA modèle 1939 et une mitrailleuse de 7.5mm MAC-34.

Les deux prototypes sont évalués conjointement entre janvier et mars 1941 sans qu’une décision de production en série soit prise.

En effet, en bon disciple du général Estienne, le général Villeneuve n’est pas un chaud partisan du char léger. Il ne le voue pas aux gémonies comme son défunt mentor _l’estimant nécessaire pour faire nombre_ mais préfère privilégier le qualitatif au quantitatif, le moyen et lourd au léger.

L’AMX-39 et le Renault DAC-1 vont donc rester au niveau du prototype, du démonstrateur de technologie sans connaître l’honneur d’une production en série ce qui ne gêna pas les deux constructeurs bien occupés avec l’AMX-42/44 pour le premier, le Renault G1 pour le second.

Tout est à refaire

D’un char «léger» d’accompagnement, on passe à l’été 1941 à l’étude d’un nouveau char moyen destiné à la cavalerie pour succéder au Somua S-35/40. Cette étude traine en longueur comme jadis celle du char G1.

Trois constructeurs vont proposer leurs projets : Somua avec le S-45, Renault avec le DAC-2 et AMX avec l’AMX-45. Chaque constructeur reçoit commande en mai 1942 pour deux prototypes en état de marche plus une maquette pour les essais statiques.

Somua présente ces prototypes en novembre, Renault dès le mois d’octobre et AMX en janvier 1943 et les six véhicules vont aussitôt être testés dans le but de choisir le meilleur et le produire en série pour rééquiper les DLM.

En juin 1943, plutôt que de choisir l’un des trois projets, on décide de prendre les meilleurs éléments de chaque projet comme la suspension Christie du projet AMX, la caisse laminée-soudée du S-45 et la tourelle Renault à canon de 75mm fortement inspiré de la tourelle ARL équipant le char moyen modèle 1943R.

Les trois constructeurs vont donc s’entendre pour produire un nouveau char moyen de cavalerie qui reçoit à des fins d’intoxication la double dénomination Somua S-45/Renault DAC-2 ce qui suscitera un temps (mais un temps seulement) la perplexité des services de renseignement allemands.

Deux prototypes de ce nouveau char sont commandés en juillet 1943 et présentés en janvier 1944 et mis à part quelques modifications de détail, il est adopté sous le nom de char moyen modèle 1945.

Son assemblage est confié à la société Somua dans son usine de Saint-Ouen, agrandie pour l’occasion.

Ce char combine une caisse laminée-soudée _pour gagner du poids_, dispose d’un moteur diesel Aster, d’une suspension Christie et d’une tourelle triplace avec un chef de char et un tireur à droite, le pourvoyeur (qui faisait également office d’opérateur radio) dans la caisse.

Cette tourelle disposait d’un canon de 75mm de 32 calibres similaire à ceux des prototypes du G1R et non du canon de 40 calibres pour des raisons de poids limité à 30 tonnes ce qui obligea notamment à renoncer à un blindage homogène de 60mm au profit d’un blindage minimal de 45mm avec des endroits blindés à 60mm (face avant de la caisse et de la tourelle, réservoirs et moteurs notamment).

Comme pour le Renault G1, les débuts de production sont difficiles et la production lancée en fanfare en avril 1944 est suspendue et les quarante premiers exemplaires stockés tant ils présentaient de défauts de construction liés semble-t-il à l’inexpérience des ouvriers.

Les défauts corrigés, la production en série ne reprend qu’en octobre 1944 mais les véhicules ne sont officiellement acceptés par l’Arme Blindée Cavalerie qu’en février 1945 comme si elle n’en voulait pas.

Après cette naissance difficile, le Somua S-45 va se révéler une monture digne de ses ainés S-35 et S-40.

Contrairement au Somua S-40, le rééquipement va être réalisé division par division, toutes les DLM devant être transformées pour la fin de 1949…….. .

La 1ère DLM pour équiper le 4ème cuirassiers et le 18ème dragon reçoit ses 192 chars entre juin et décembre 1945 soit le chiffre respectable de 32 chars par mois.

La 2ème DLM reçoit ses chars pour équiper le 13ème et le 29ème dragon entre janvier et juin 1946, la 3ème DLM reçoit ses chars pour équiper les 1er et 8ème régiment de chasseurs à cheval entre juillet 1946 et février 1947.

La 4ème DLM rééquipe ses deux régiments de chars (8ème régiment de dragons et 18ème régiment de chasseurs à cheval) entre février et septembre 1947 alors que le 5ème DLM reçoit ses chars pour le  6ème régiment de dragons et le 4ème régiment de hussards entre octobre 1947 et juin 1948.

Le rééquipement de la 6ème D.L.M prévu à partir de septembre 1948 est suspendu à la déclaration de guerre à la fois pour permettre son engagement sur le TOSE voir en Tunisie en liaison avec la 1ère D.L.C et parce que face aux chars italiens, le S-40 était largement supérieur. Le rééquipement des 7ème et 8ème D.L.M prévu respectivement pour le printemps et l’été 1949 est également suspendu.

A noter qu’un projet de canon automoteur sur chassis Somua S-45 avec un canon de 105mm est envisagé pour les DLM mais sans suite concrète jusqu’au début du second conflit mondial, l’arme blindée cavalerie prévoyant d’équiper ces groupes de canons d’assaut et son RADLM avec cet automoteur soit un total de 60 automoteurs par division.

Est étudié également un canon automoteur de 155mm mais sans qu’un prototype ne soit construit avant le début de la guerre.

Caractéristiques Techniques du char moyen modèle 1945

Poids  : 30 tonnes théorique 32 tonnes en ordre de combat

Dimensions : longueur hors tout 5.45m largeur hors tout : 2.50m hauteur avec tourelle 2.40m (1.55m sans tourelle)

Motorisation : moteur diesel Aster 8 cylindres développant 390ch avec 530l de carburant

Performances : vitesse maximale sur route 49.5 km/h réservoir de 530 litres donnant une autonomie sur route de 360km qui pourrait être augmentée avec des réservoirs supplémentaires installés à l’automne 1948

Blindage : 40mm minimum 60mm à certains endroits

Armement : tourelle ARL modèle 1942 avec un canon de 75mm de 32 calibres (vitesse initiale : 800 m/s) avec 210 obus, une mitrailleuse coaxiale MAC 34 et une mitrailleuse antiaérienne du même modèle avec 6000 cartouches

Equipage : un mécanicien pilote en caisse, un pourvoyeur à gauche de la tourelle, le tireur et le chef de char à droite

Projets et prototypes

Entre 1918 et 1948, assez peu de projets de chars moyens ont été étudiés probablement en raison des difficultés énumérées dans l’introduction pour définir ce qu’était un char moyen.

Citons néanmoins un projet de 1939 de l’Atelier d’Issy Les Moulineaux (AMX) qui proposa un char moyen de 20 tonnes à canon de 47mm puissant en tourelle monoplace avec un blindage de 70mm et un équipage de quatre hommes. Il semble que ce projet vu comme une possible alternative au projet G1 n’ait pas dépassé le stade de la planche à dessin.

Le projet Poniatowski/SEAM à aboutit à la production de deux prototypes utilisés comme démonstrateurs de technologie de la transmission électrique et banc d’essais pour de nouveaux moteurs diesels et essence à haute performance pour les nouvelles générations de chars.

Entre 1946 et 1918, plusieurs projets de chars moyens sont étudiés mais il s’agit plus d’améliorer le Somua S-45 ou le Renault G1 que de mettre au point un char totalement nouveau.

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