Quarante-trois années d’indépendance (1905-1948)
Haakon VII de Norvège
Haakon VII de Norvège (Charlottenlund 3 août 1872 Oslo 21 septembre 1957) est un prince danois qui devint le premier roi de la Norvège indépendante après le divorce avec la Suède. Issu de la Maison d’Oldenbourg, il est né Christian Frederik Carl Georg Valdemar Axel avant d’être connu sous le nom de Prince Charles de Danemark (prins Carl till Danmark).
Son père était le prince héritier de Danemark, le futur Frédéric VIII _fils de Christian IX de Danemark et de Louise de Danemark_ et de Louise de Suède, fille du roi de Charles XV et de la reine……Louise de Suède.
Comme le monde est petit, il épouse sa cousine germaine Maud de Galles le 22 juillet 1896. De cette union ne naîtra qu’un fils, Alexandre Edouard Christian Frédéric le 2 juillet 1903 qui succédera à son père en 1957 sous le nom d’Olav V.

Le futur Olav V
Le Storting (parlement norvégien) lui propose la couronne de Norvège le 18 novembre 1905. Après l’avis favorable de son grand-père le roi de Danemark Christian IX, il accepta la proposition et fût sacré roi de Norvège le 22 juin 1906 dans le lieu traditionnel des couronnement norvégiens : la cathédrale de Nidaros à Trondheim. Cette cérémonie ayant été abolie en 1908, son fils ne sera pas sacré mais recevra simplement une bénédiction et se contentera de prêter serment.
La Norvège reste neutre durant le premier conflit mondial, Haakon VII rencontrant le roi de Suède Gustav V et le roi de Danemak Christian X pour maintenir la Scandinavie en dehors de la guerre.
Acceptant son rôle de souverain constitutionnel, il fait montre de toutes ses capacités d’homme d’Etat en impulsant la résistance à l’invasion allemande de l’automne 1948. là où le gouvernement tergiverse et hésite pendant quelques heures, Haakon VII refuse tout diktat allemand et ordonne à l’armée de résister.
C’est ce qui poussera les alliés à intervenir immédiatement en Norvège même si peu de gens se font d’illusions sur la capacité de résistance norvégienne. Et pourtant l’armée norvégienne ne va capituler qu’à la fin du mois d’octobre après de très durs combats.
Le roi et le gouvernement sont évacués en Grande-Bretagne par un croiseur de la Royal Navy. Le roi George VI son neveu (Maud de Norvège décédée en 20 novembre 1938 était la tante de George VI) lui mit à disposition de le château d’Holyrod à Edimbourg mais devant la vulnérabilité à des bombardements ennemis, le «roi de fer» tel qu’il était surnommé par les alliés préféra s’installer à Balmoral dans les Highlands, le gouvernement lui s’installant à Londres.

le château de Balmoral
Tout comme la reine Juliana, le roi Haakon VII devint la figure de proue de la résistance norvégienne à l’occupation nazie, le monogramme H7 devenant le signe de ralliement tout comme sa devise Alte fur Norge «Tout pour la Norvège».
Rentré en Norvège au printemps 1954, le roi Haakon VII semblait en pleine santé en dépit de on âge avancé (82 ans).
En réalité la santé du souverain déclinait dangereusement au point qu’on envisagea une régence de son fils mais ce projet n’aboutit pas en raison de la crainte de heurter l’opinion norvégienne très attachée à son souverain.
Haakon VII décède le 21 septembre 1957 à l’âge de 85 ans. Il est enterré dans la crypte royale de la forteresse d’Akershus. Son fils lui succède sous le nom d’Olav V.
La vie politique norvégienne : miscellanées
Avant le second conflit mondial, quatre partis dominent la vie politique norvégienne. Les deux plus anciens sont le parti conservateur ou Hoyre (droite) et le parti libéral ou Venstre (gauche), le clivage principal étant la question parlementaire, les premiers étant opposés et les seconds y étaient favorables.
Jusqu’en 1903, le système norvégien est donc bipartite. De nombreux changements ont alors lieu avec la montée en puissance d’un parti travailliste créé le 22 août 1887 qui obtient ses premiers élus cette année là (10% des voix et 5 élus).
A partir des élections de 1921, le système électoral est modifié. A la place du système majoritaire fonctionnant par circonscription la Norvège préfère désormais le système proportionnel ce qui favorise les partis moyens et impose souvent le recours à la coalition.
En 1927, le parti travailliste devient le premier parti de Norvège, un statut qui dure encore aujourd’hui. En 1928, le parti travailliste forma son premier gouvernement.
Dans les années trente, les partis extrémistes se développèrent que ce soit le parti communiste norvégien ou un parti fascisant, le Nasjonal Samling (Rassemblement National) dirigé par Vidkun Quisling qui allait choisir la voie de la collaboration.
Le parti libéral ou Venstre (gauche) créé le 28 janvier 1884 est donc le plus vieux parti de Norvège, un parti qui initie le parlementarisme, la liberté de religion, le suffrage universel et un système scolaire d’état désécularisé.
Parti dominant jusqu’à la fin du second conflit mondial, il connait une éclipse jusqu’au début des années quatre-vingt quand il renaît littéralement de ses cendres selon un programme qui le rapproche du parti travailliste au point qu’on parle régulièrement d’une fusion entre les deux partis sans que cela n’aille jamais au bout.
Si sur le plan économique, les idées sont assez proches du parti travailliste, en revanche sur le plan identitaire, le parti libéral est bien plus favorable au multiculturalisme et à l’immigration.
Le parti conservateur ou Hoyre (droite) est créé le 25 août 1884. Parti de centre-droit, il est favorable à l’idée européenne, partisans du libéralisme économique, de la baisse des taxes et la défense des droits individuels.
Entre 1918 et 1948, les conservateurs s’alliaient souvent avec les libéraux plutôt qu’avec les travaillistes qui comme nous venons de le voir ne cessaient de monter en puissance. Il connait un profond déclin après le second conflit mondial avant de renaitre au début des années 2000.
Le parti travailliste est créé le 22 août 1887. Dès l’origine il s’inscrit dans le courant social-démocrate très en vogue en Scandinavie et qui servit de modèle à de nombreux partis de gauche européens.
Cela n’empêcha pas ce parti d’adhérer à la Troisième Internationale entre 1918 et 1923. Il devient donc le premier parti du pays en 1927 et le reste encore aujourd’hui avec parfois des éclipses.
Le parti centriste voit le jour le 19 mai 1920 sous le nom de parti agraire nordique. Ce parti n’à pas une idéologie clairement définie mais veut surtout maintenir une forte décentralisation économique et politique. Situé plus à droite que le parti conservateur, il fait montre d’un profond euroscepticisme et d’un nationalisme économique marqué et prononcé. Son aile droite se rallia pour certains au Nasjonal Samling ce qui explique que ce parti connu un long purgatoire une fois le second conflit mondial terminé.
La Norvège étant une démocratie, des élections législatives sont régulièrement organisées pour renouveler le Storting et ce tous les trois ans.
Les élections de 1918 voient la victoire des libéraux qui remportent 51 sièges auxquels il faut ajouter trois sièges du parti des travaillistes démocrates soit 54 sièges sur les 123 du parlement norvégien. Les travaillistes remportent dix-huit sièges, les conservateurs quarante, le parti libéral de gauche dix et le Bondepartiet trois sièges.
Les élections de 1921 servent à élire 150 députés soit vingt-sept sièges de plus que pour la législature précédente. Elles sont remportées par une alliance du parti libéral de gauche et du parti conservateur avec 57 sièges (quinze pour les premiers et quarante-deux pour les autres), le parti libéral remportant trente-sept pièces, le parti travailliste vingt-neuf sièges, le Bondepartiet (parti agrarien) dix-sept, le parti travailliste social-démocrate huit sièges et le parti des travailliste démocrates deux sièges.
Les élections de 1924 voient le parti conservateur et son allié libéral de gauche remporter cinquante-quatre sièges, les libéraux trente-quatre, les travaillistes vingt-quatre, le parti travailliste social-démocrate de Norvège huit, le parti communiste six, le parti des travaillistes démocrates deux et le Bondepartiet vingt-deux.
Les élections de 1927 voient les conservateurs et les libéraux de gauche remporter trente et un sièges (29+2), les travaillistes cinquante-neuf, les libéraux trente, le parti communiste trois et le Bondepartiet vingt-six.
Les élections de 1930 voient les travaillistes remporter quarante-sept sièges, les conservateurs trente-neuf, les libéraux trente-trois, le Bondepartiet vingt-cinq, le parti libéral de gauche cinq et le parti des travaillistes démocrates un.
Trois ans plus tard lors des élections de 1933, le parti travailliste accentue sa domination avec soixante-neuf sièges, trente sièges pour les conservateurs et leurs alliés de gauche libérale, vingt-quatre sièges pour les libéraux, le parti des fermiers (agraire nordique) vingt-trois, le parti de gauche libérale un siège, le parti de la société un siège, le parti populaire chrétien un siège et le parti populaire radical un siège également.
Les élections de 1936 sont un triomphe pour les travaillistes qui remportent soixante-dix sièges contre trente-six pour les conservateurs et leurs alliés de gauche libérale, vingt-trois sièges pour les libéraux, dix-huit pour le parti des paysans, un pour le parti de la société et deux pour le parti populaire chrétien.
Les élections de 1939 sont un nouveau triomphe pour les travaillistes qui dominent outrageusement la vie politique norvégienne en réusissant à allier libéralisme économique modéré et protection.
Ils remportent soixante-seize sièges, vingt-cinq sièges sont remportés par les conservateurs, vingt par les libéraux, onze par les communistes, dix par le parti des paysans et huit par le parti populaire chrétien.
L’apogée de la domination travailliste est atteint en 1942 avec quatre-vingt cinq sièges ne laissant que des miettes aux conservateurs (vingt-trois), aux libéraux (vingt et un), au parti populaire chrétien (neuf sièges) et le parti paysan (douze).
Les dernières élections d’avant le second conflit mondial ont lieu en octobre 1945. Les travaillistes l’emportent avec seulement soixante-cinq sièges contre trente-cinq pour les conservateurs, vingt-sept pour les libéraux, douze pour le parti populaire chrétien et onze pour le parti paysan.
Des élections étaient bien prévues en octobre 1948 mais naturellement elles n’ont pas lieu en raison de l’invasion allemande le 5 septembre.
Le dernier parlement d’avant-guerre se réunira symboliquement en juillet 1954 à Oslo pour reprendre le travail parlementaire où il s’était arrêté sous la forme d’une convention. Il votera des lois destinés à préparer la répression judiciaire de la collaboration en Norvège avant de se séparer, un nouveau parlement étant élu en octobre 1954 avec encore une majorité travailliste.
Les événements marquants
-En 1907, les femmes peuvent voter mais il s’agit d’un vote censitaire. Il faudra attendre 1913 pour que toutes les femmes puissent voter sans condition de revenus.
-La Gauche est au pouvoir jusqu’en 1910 quand son aile droite fait sécession pour contrer les mesures jugées les plus anticapitalistes. Cette coalition «conservateurs/gauche libérale» va rester au pouvoir jusqu’en 1913 avant que la Gauche ne reprenne le flambeau jusqu’en 1920.
-Politique sociale avancée avec une assurance maladie dès 1909, la journée de 10h en 1915 (8h en 1919), des juridictions destinées à régler les conflits entre employeurs et employés.
-La Norvège reste neutre durant le premier conflit mondial mais n’en subit pas moins les conséquences avec notamment l’action des sous-marins allemands. Près de 50% de la flotte marchande norvégienne est perdue et 1892 marins sont tués. Cela nécessite la mise en place d’un système de rationnement et génère une forte inflation notamment à partir de 1916.
-La Norvège intègre la Société des Nations dès sa création.
-De 1921 à 1935, le pays est dirigé par des gouvernements de coalition le plus souvent dirigés par la Venstre.
-Lutte contre l’inflation en limitant les impôts et les dépenses publiques, politique de l’emploi pour tenter de réduire un chômage très élevé.
-La situation s’améliore à partir de 1928 mais pour peu de temps car la Norvège comme le reste du monde est frappée par la crise de 1929. La croissance revient timidement à partir de 1934.
-Les travaillistes au pouvoir mènent une politique de relance et une politique de protection sociale.
-Les partis extrémistes ont le vent en poupe mais si les communistes obtiennent des élus, le Nasjonal Samling de Vidkun Quislin n’obtient aucun élu.
-Durant la Pax Armada, la France et la Grande-Bretagne tentent de convaincre les norvégiens de renoncer à leur neutralité pour une alliance en bonne et due forme. Oslo refuse et maintien une neutralité stricte qui passera par la modernisation de l’outil militaire même si la petite armée norvégienne ne pourra être considérée comme la mieux équipée des «petits pays».