L’Armée Belge et le premier conflit mondial

Militaires belges en août 1914
En 1912, l’armée belge à entamé un processus de réorganisation, de rééquipement et de modernisation, un processus qui doit s’achever en 1926 avec un total de 350000 hommes (150000 actifs, 130000 dans les garnisons de forteresse et 70000 réservistes et auxiliaires). Ce processus est donc dans l’enfance quand le 4 août 1914, l’armée du Kaiser viole la neutralité belge pour attaquer la France par sa frontière du nord-est.
Le territoire est divisé en six circonscriptions, chacune possédant des régiments d’infanterie (ligne, carabiniers, grenadiers ou chasseurs à pied), de cavalerie (lanciers, guides ou chasseurs à cheval) et d’artillerie. On trouve également des unités cyclistes.
La 1ère circonscription (QG : Gand) dispose de trois régiments de ligne et de deux régiments de lanciers.
La 2ème circonscription (QG : Anvers) dispose de quatre régiments de ligne, d’un régiment de lanciers et d’un régiment d’artillerie
La 3ème circonscription (QG : Liège) dispose de trois régiments de ligne, d’un régiment de lanciers et d’un régiment d’artillerie
La 4ème circonscription (QG : Namur) dispose de deux régiments de ligne, d’un régiment de chasseurs à pied, d’un régiment de lancier et d’un régiment d’artillerie.
La 5ème circonscription (QG : Mons) dispose d’un régiment de ligne,de deux régiments de chasseur à pieds et d’un régiment de chasseurs à cheval.
La 6ème circonscription (QG : Bruxelles) dispose d’un régiment de grenadiers, de deux régiments de carabiniers, d’un régiment de ligne, de deux régiments de chasseurs à cheval, de deux régiments de guides,un bataillon de carabiniers cyclistes et deux régiments d’artillerie.
A la mobilisation, l’apport de réservistes permet de dédoubler les régiments d’infanterie qui passe à six bataillons. Les trois nouveaux bataillons forment un nouveau régiment, les deux régiments ainsi mis sur pied forment une brigade mixte avec deux batteries d’artillerie à quatre pièces chacune mais également la compagnie de mitrailleuses du régiment d’active (six pièces).
Ces brigades mixtes sont intégrées dans des divisions d’armées comprenant trois brigades mixtes, un régiment de cavalerie, un régiment d’artillerie et diverses unités de transport et de soutien.
Sur le papier, la DA dispose de 25 à 32000 hommes, dix-huit bataillons d’infanterie, un régiment de cavalerie, dix-huit mitrailleuses et quarante-huit canons (sauf les 2ème et 3ème divisions qui disposent de soixante canons).
On trouve également une division de cavalerie composée de deux brigades à deux régiments de cavalerie chacun, trois batteries d’artillerie à cheval, un bataillon de cyclistes, une compagnie de pionniers-pontonniers cyclistes et des unités de support soit une force de 2500 sabres, 450 cyclistes et 12 canons.
Ces divisions sont réparties sur le territoire belge dans les régions elles sont levées à la fois pour des raisons pratiques mais probablement aussi pour des raisons linguistiques même si la langue de commandement au grand dam des flamingants les plus farouches est le français.
La 1ère Division est installée dans les provinces de Flandre-Occidentale et de Flandre-Orientale, la 2ème Division est installée dans la Province d’Anvers, la 3ème Division couvre les Provinces de Liège et du Limbourg, la 4ème Division est déployée dans la Province de Namur, la 5ème Division est déployée dans la Province du Hainaut, la 6ème Division dans la Province du Brabant alors que la Division de Cavalerie est stationnée à Bruxelles.
A ces troupes mobiles s’ajoutent des unités de forteresse installés dans les forts d’Anvers, de Liège et de Namur.
La première guerre mondiale éclate le 28 juillet 1914 quand l’Autriche-Hongrie déclare la guerre à la Serbie, Vienne accusant Belgrade d’avoir été l’instigateur de l’attentat de Sarajevo le 28 juin 1914, attentat qui avait coûté la vie à l’héritier du trône, François Ferdinand et à son épouse. Le mécanisme d’alliance faisant le reste ce n’est qu’une question de temps avant que les autres pays européens ne s’engagent dans le conflit.
Le 31 juillet 1914, le roi Albert 1er demande la mobilisation générale qu’il obtient de la part du gouvernement. Le 2 août les allemands adressent un ultimatum à la Belgique réclamant le libre passage de ses troupes. Après avoir étudié toutes les possibilités (laissé faire, accepter tout en protestant et résister), le gouvernement belge décide de résister.

Carte de la campagne de Belgique en août 1914
Le 4 août 1914, l’armée allemande viole la neutralité belge en envahissant le royaume dans le cadre du plan Schlieffen. A ceux qui s’offusquent de cette violation du Traité des XXIV Articles (Article VII), le chancelier Theobald von Bethmann-Hollweg parle de «chiffon de papier». Traduction : circulez il n’y à rien à voir.
C’est le début de la Campagne de Belgique. Il n’est pas là ici question de détailler les opérations mais je vais préciser ici les principales étapes, un cadre pour replacer les différents événements :
Du 4 au 16 août, c’est la bataille de Liège suivie de la bataille de Halen (12 août) avant deux séquences se chevauchant à savoir le Siège de Namur du 20 au 25 août et les Batailles de Charleroi et de Mons du 21 au 23 août, cette deuxième séquence concernant sur les armées françaises et britanniques plus que l’armée belge très occupée par ailleurs.
En fait on peut dire que ces séquences sont connectées puisque la défaite française à Charleroi oblige les troupes françaises à se replier en ne laissant qu’un régiment pour renforcer la 4ème division belge.
Les allemands qui attaquèrent avec un rapport de force de trois pour un utilisèrent l’expérience acquise à Liège en mobilisant une importante artillerie de campagne et de siège, louant quatre batteries de siège à l’armée austro-hongroise qui avec la firme Skoda possédait un fabricant de matériel d’artillerie de premier ordre.
Après cinq jours de résistance, les troupes de forteresse belges furent obligées de se rendre mais les hommes encore valides de la 4ème division sont parvenus à se replier sur Anvers, renforçant ainsi la garnison de la place fortifiée flamande même si il fallut pour cela rallier Le Havre le 27 août, prendre le bateau pour rallier Ostende puis de là Anvers.
C’est ensuite le Siège d’Anvers du 28 septembre au 10 octobre mais aussi la Course à la Mer du 17 septembre au 19 octobre, la Bataille de l’Yser du 16 octobre au 2 novembre et enfin la Première Bataille d’Ypres du 19 octobre au 22 novembre 1914. Le front comme nous allons le voir va se stabiliser sur l’Yser, la Belgique défendant un petit bout de terre belge que les allemands ne parviendront jamais à prendre.
Les allemands veulent aller vite. Pays continental soumis au blocus, l’Allemagne de Guillaume II ne peut s’en remettre qu’à des guerres courtes et brutales, une guerre où on est persuadé qu’il suffira d’une bataille décisive (Entscheidungsschlacht) pour décider du sort de la guerre.
Cette guerre brutale ne fait pas de sentiments y compris vis à vis des civils qui sont pourtant protégés par des conventions internationales.
Suite à l’expérience traumatisante de la guerre de 1870 où les français ont continué la guerre en combinant batailles rangées et opérations de guérilla, les allemands auront tendance à voir des francs-tireurs partout ce qui provoquera un grand nombre d’exactions que la propagande alliée se fera un malin plaisir à exploiter.
Guillaume II et son Grand-Quartier Général sont initialement persuadés soit que la Belgique la laissera passer en protestant pour la forme ou qu’en cas de résistance celle-ci sera symbolique.
En réalité, dès le début et en dépit d’une infériorité manifeste, les soldats belges résistant de manière farouche.
Ils sont en cela animés par le discours énergique de celui qui n’est pas encore le «Roi-Chevalier» qui s’adresse ainsi devant les Chambres «Un pays qui se défend s’impose au respect de tous ; ce pays ne périt pas. Dieu sera avec nous dans cette cause juste. Vive la Belgique indépendante».
Les allemands vont donc devoir s’employer. La résistance belge à certainement contribué ultérieurement à la victoire française sur la Marne en donnant du temps aux généraux françaises.
C’est effectivement difficilement quantifiable mais ce qui est sur c’est que la résistance troupes d’Albert 1er n’à été ni symbolique ni inefficace.
Liège tombe le 7 août sans résistance, la ville elle même n’étant pas fortifiée. La population civile se montre attentiste ce qui torpille la légende colportée par les allemands de milliers de francs-tireurs attaquant les allemands ce qui justifiera les terribles représailles contre la population civile.
La résistance belge est telle qu’il faut envoyer des renforts pour compenser les pertes (!). Ce sont 60000 hommes supplémentaires et de l’artillerie qui doivent être envoyés.
La vitesse clé essentielle de la réussite du plan Schlieffen est clairement entravée rendant sa réalisation parfaite peu probable, les généraux allemands pourtant intellectuellement bien formés ayant oublié cette maxime du penseur maison Clausewitz «A la guerre la première victime c’est le plan !».
Sur la rivière Gette, les allemands sont battus lors de la bataille de Haelen (12 août 1914), une bataille où les uhlans du Kaiser sont décimés par les feux de l’infanterie et de l’artillerie, faisant douter certains de la pertinence de la cavalerie dans la guerre moderne.
Les belges alignent cinq régiments soit 2400 cavaliers et 450 fantassins cyclistes alors que les allemands ont engagé 4000 cavaliers et 2000 fantassins.
Après une contre-attaque lancée par les lanciers, les allemands doivent se replier. Cette victoire hélas pour les belges est locale et tactique, un nouveau contre-temps pour l’armée allemande. Les pertes sont équivalentes avec 160 morts côté belge et 150 côté allemand.
Les forts de la ligne de Liège ne sont ainsi réduits au silence que le 18 août. Pire encore les troupes belges parviennent à se replier en bon ordre vers l’ouest échappant ainsi à l’encerclement et à la captivité.
Près de 5000 soldats allemands ont été tués en seulement quinze jours de combat ce qui inquiète les généraux allemands mais confortent les alliés, la France décorant la ville de Liège de la Légion d’Honneur.
Du 28 septembre au 10 octobre 1914 donc les allemands assiègent la place d’Anvers qui avec ses trois ceintures successives constitue l’une des plus formidables places fortifiées d’Europe.

obusier de 420mm
L’immobilisation de 150000 hommes et d’une artillerie de siège conséquente (avec notamment les célèbres mortiers lourds Krupp de 420mm surnommés «Grosse Bertha») va être fatale aux troupes allemandes en France car nul doute que la contre-offensive lancée sur la Marne aurait eu du mal à avoir un vrai impact si ces 150000 hommes avaient été présents en France et non immobilisés en Belgique.
De plus la menace sur Anvers va définitivement convaincre les britanniques d’entrer en guerre aux côtés de la France, le BEF s’engageant à partir du 23 août avec la bataille de Mons où la petite armée britannique fait taire les sarcasmes par sa discipline et son efficacité au feu, efficacité acquise par les guerres coloniales et un entrainement intensif, la plupart des riflemen britanniques étant capables de tirer 12 à 15 coups par minute ce qui fera penser aux allemands que les bataillons britanniques possédaient douze à vingt-quatre mitrailleuses alors que le nombre réel est de deux pièces !
Les belges ne se contentent pas de rester à l’abri des forts du grand port flamand. Ils effectuent des sorties, sorties accompagnées de contre-attaques menées par l’armée de campagne. C’est ainsi que du 25 au 29 septembre 1914 à lieu la bataille de Buggenhout qui voit notamment l’engagement des 4ème et 5ème Divisions ainsi que de la Division de Cavalerie.
La presse française ne s’y trompe, l’Echo de Paris déclarant que «Nous,français, nous devons aux Belges plus que de l’admiration, nous leur devons une inoubliable reconnaissance».
Certains journaux comparent même la résistance belge à celle du roi spartiate Léonidas dans les Thermopyles ! (pas besoin d’être grand clair pour savoir qui sont les perses).
Cette résistance comme nous l’avons vu enrage les allemands qui multiplient les vexations, les humiliations et hélas trois fois hélas les exactions vis à vis de la population civile, le soldat allemand voyant dans tout civil belge un franc-tireur.
Des massacres ont ainsi lieu dans les provinces du Limbourg, du Brabant, du Hainaut, de Namur et du Luxembourg soit les provinces traversées par les troupes d’invasion.
La Flandre sera ultérieurement touchée (probablement en raison de la résistance d’Anvers) en attendant les départements des Ardennes, de la Meuse et la Meurthe-et-Moselle.
Ces atrocités vont tellement marquer l’opinion internationale que le recrutement des soldats américains en 1917 se fera avec le slogan Remenber Belgium.
On peut aussi estimer que le comportement relativement correct des troupes allemandes en 1949 est une conséquence de ces atrocités trente ans plus tôt tout comme l’exode des populations civiles vers le sud et sans qu’il y ait de règle établie, une résistance plus farouche des soldats wallons par rapport à celle des soldats flamands, les flamingants extrémistes retenant du premier conflit mondial la légende des soldats flamands envoyés au massacre par des officiers arrogants ne parlant que français.
Si vraiment cela avait le cas, l’armée belge se serait désintégrée et tout le territoire du royaume d’Albert 1er envahit par les armées de Guillaume II.
Les allemands tenteront bien de provoquer la désertion des soldats flamands par la propagande mais cela sera un échec. Cela sèmera cependant les graines d’un esprit flamands revanchard dont les défenseurs n’hésiteront à embrasser l’idéologie nazie.
Après la contre-offensive française sur la Marne (5 au 12 septembre 1914) puis la première bataille sur l’Aisne (13 au 28 septembre) les allemands doivent reculer de 200km.
Débute alors un nouvel épisode de la première guerre mondiale à savoir la course à la mer (17 septembre au 19 octobre) les allemands cherchant à priver les alliés d’accès aux côtes alors que ces derniers cherchaient à conserver le contrôle des ports pour permettre l’arrivée des renforts britanniques.
Si Anvers, Zeebrugge et Ostende vont tomber aux mains des allemands, en revanche Dunkerque restera sous le contrôle allié.
Les soldats belges après avoir réalisé trois sorties depuis Anvers entre le 21 septembre et le 4 octobre se replient le 15 derrière l’Yser après avoir ouvert les vannes permettant l’inondation par la mer du Nord de la plaine flamande. Si le gouvernement se replie à Sainte-Adresse près du Havre le 13 octobre 1914, le roi lui va rester derrière l’Yser, installant son quartier général à La Panne.
Du 16 au 31 octobre 1914 (NdA d’autres sources donnent le 2 novembre comme date de fin) à lieu la Bataille de l’Yser qui voit l’engagement de 52000 soldats belges aidés par 6600 français, les fusiliers marins de l’amiral Ronarc’h et soutenus par trois monitors et d’autres navires britanniques.
En stoppant l’avancée allemande, l’armée belge préserve une infime partie de son territoire national et fait d’Albert 1er un héros national. C’est la fin de la course à la mer et la glaciation du front qui pendant près de quatre ans va prendre pour forme un double système de tranchées courant sur 700km de la mer du Nord à la frontière suisse. C’est aussi la naissance du front de l’Yser tenu jusqu’à l’été 1918 par la vaillante armée belge
Ce front qui s’étend sur 30km part de la mer du Nord entre Nieuport et Westende, bifurque au sud-est le long du canal de l’Yser, enserre les villes de Ramkapelle et de Pervijze puis de la forme une arche vers le sud-est entre la rivière Yser et le canal de l’Yser. Il descend ensuite pour englober Oudekapelle et Reninge mais la ville de Dixmude à été prise par les allemands au cours de la bataille de l’Yser.
Les conditions de vie sont très difficiles, 20000 soldats belges y perdant la vie dont 7000 à cause du typhus. Ces pertes étaient très partiellement compensées par des belges venant de la partie occupée du territoire (ai-je besoin de préciser que c’était fait de manière illégale…..).
Bien que les alliés mènent l’offensive en Flandre avec les meurtrières batailles de Messine, d’Ypres et de Passenchdaele, les belges restent à l’écart des opérations ce qui permet à la petite armée d’Outre-Quiévrain de limiter ses pertes (C’était d’autant plus important que ces pertes ne pouvaient pas être vraiment compensées).
Un unité belge va également être envoyée en Russie. Appelé officiellement Corps Expeditionnaire des Autos-Canons-Mitrailleuses Belges en Russie, cette unité fût envoyé combattre aux côtés de la Russie de Nicolas II. Il se composait de 444 soldats belges dont seize furent tués au combat.
Fin 1914, 95% du territoire belge est occupé. Le front se fige, rendant impossible l’utilisation des autos blindées en service.
Début 1915, le tsar de Russie demande un soutien militaire du roi des belges. Comme légalement, la Belgique est une puissance neutre, les soldats belges étaient des volontaires au service de la Russie.

autos blindées Minerva
Le premier contingent (333 hommes avec des autos blindées Mors-Minerva et Peugeot) arriva à Arkangelsk en octobre 1915. Elle combat en Galice et est citée à cinq reprises à l’Ordre du Jour.
Après la révolution bolchévique de 1917, la force belge resta en Russie jusqu’au traité de Brest-Litovsk signé en mars 1918, l’unité se trouve en territoire ennemi.
La route du Nord vers Mourmansk étant bloquée, les soldats belges détruisirent leurs véhicules pour éviter leur capture par les bolcheviques.
L’unité entama une véritable anabase à travers la Sibérie et la Chine, rentrant en Europe via les Etats-Unis et l’Atlantique en juin 1918. Un corps britannique identique fût également envoyé en Russie.
La Belgique va également combattre contre les colonies allemandes du Cameroun et de l’Afrique orientale aux côtés des forces coloniales françaises, britanniques et portugaises. C’est la Force Publique qui mène les opérations.
Après avoir porté secours aux français aux prises avec les allemands au Togo, la Force Publique participa à la campagne en Afrique orientale allemande, les congolo-belges remportant les batailles de Tabora (8-19 septembre 1916 où 10000 belges affrontent 5000 allemands, cette victoire offrant le Ruanda-Urundi à la Belgique) et de Mahenge, suite de la bataille précédente et qui se termine par la capture de la ville de Mahenge (28 août au 9 octobre 1917).
Durant ces combats, les allemands sans refuser le combat préfèrent user de la tactique de la guérilla pour compenser leur infériorité numérique et l’impossibilité pour eux de recevoir des renforts d’Europe.
Ils pouvaient également bénéficier de la météo, la saison des pluies en dégradant les «routes» rendait impossible la poursuite par les alliés mais impactait aussi les allemands qui se retrouvèrent parfois dans des régions inconnues ou pire encore des régions inhospitalières.
Au 26 mai 1918, l’armée belge alignait 166000 hommes dont 141974 combattants, le tout formant douze divisions d’infanterie et une division de cavalerie. Elle aligne 952 canons de tous calibres et 129 avions.
Après avoir tenu le front de l’Yser et refusé de participer aux offensives alliées, l’armée belge passe à l’offensive en septembre 1918, libérant une partie du territoire national et notamment la ville de Gand.
Elle participe notamment à la Bataille de Courtrai du 14 au 19 octobre 1918. Cette bataille fait suite à la Cinquième bataille d’Ypres du 28 septembre au 2 octobre 1918, bataille au cours de laquelle est engagé le Groupe d’Armées des Flandres (GAF) qui sous la direction d’Albert 1er (avec le général français Jean Dégoutte comme chef d’état-major) regroupait douze divisions belges, la 2ème armée britannique à dix divisions et la 6ème armée française à six divisions.
Le mauvais temps sauve les allemands d’une déconfiture complète et totale. Les alliés relancent l’offensive le 14 octobre 1918 à l’aube. Le barrage d’artillerie roulant des britanniques (91m par minute) empêche l’infanterie allemande de s’accrocher sur ses positions.
Si la ville de Courtrai elle-même est prise par les anglais, les belges libèrent des villes comme Iseghen,Cortemarck, Bruges, Zeebruge et Ostende. La vaillante petite armée belge et plus précisément le 1er régiment de guides peut même se targuer d’avoir participé à Burkel à la dernière charge de cavalerie réalisée sur le front occidental et ce le 19 octobre 1918.
A l’époque l’unique division de cavalerie belge combattait démontée, les chevaux à l’arrière servant uniquement à la logistique.
Le 18 octobre, la 5ème division belge s’empare de Bruges, la 7ème division belge s’emparant elle de Oostkamp. La division de cavalerie aurait du attaquer Eeklo mais la destruction des ponts à Ruddervoorde l’obligea à faire mouvement pour soutenir la 1ère division d’infanterie belge.
Dans la nuit du 18 au 19 octobre, les allemands se replièrent rapidement du secteur, simplement couverts par une arrière garde de la taille d’un bataillon.
La division de cavalerie belge formée en deux bataillons reçoit l’ordre attendu depuis fin 1914 de poursuivre l’ennemi (NdA les alliés avaient conservé des unités montées dans l’espoir d’obtenir la percée et d’exploiter mais cet événement ne se produisit jamais) en direction d’Eeklo.
La colonne nord avança à travers Eeklo mais fût bloqué par l’arrière-garde allemande près de Burkel ce qui l’obligea à mettre pied à terre pour contre-attaquer.
Dans l’après midi du 19 octobre, le major Victor Van Strydoncck commandant deux escadrons du 1er régiment de Guides (cavalerie légère) reçoit l’ordre de traverser les lignes ennemies par surprise et une fois arriver à Burkel de prendre l’ennemi à revers.
Le premier escadron commandé par le colonel Jooris fût surpris par les mitrailleuses ennemies. Le combat se continua à pied et les belges durent faire tonner l’artillerie pour créer une brèche dans le dispositif allemand.
Après avoir avancé en silence, les cavaliers belges chargèrent l’arrière-garde allemande dans la forêt de Burkel à 16.30 aux cris de «En avant mes enfants ! Pour le roi !». Signe des temps, les guides furent accompagnés par deux autos blindées qui annonçaient l’avenir de la cavalerie.
La première ligne de tranchée fût submergée et les cavaliers continuèrent leur progression, arrivant devant la deuxième ligne située trois kilomètres plus loin. Cette ligne fût également attaquée et prise même si après la destruction des autos blindées, les cavaliers durent combattre comme des fantassins. A 17.00, le commandement allemand du ordonner la retraite.
La dernière opération majeure des belges sur le front occidental est la Bataille de la Lys et de l’Escaut du 20 octobre au 11 novembre 1918.
Cette offensive menée par le GAF voit l’engagement de douze divisions belges, de la 6ème armée française qui comprend trois corps d’armée (le 34ème CA _11ème, 70ème et 77ème DI_ , le 30ème CA _12ème DI française et 37ème DI américaine_ et le 7ème CA _41ème et 128ème DI françaises ainsi que la 91ème DI américaine_) et de la 2ème armée britannique à dix divisions.
Dans le nord, les allemands étaient solidement retranchées derrière le canal Deinze-Bruges et opposèrent une furieuse résistance face aux attaques belges menées entre le 20 et le 31 octobre 1918.
Le 2 novembre 1918, les allemands sont obligés de se replier derrière le canal Ghent-Terneuzen où ils restèrent jusqu’à la fin du conflit. Le 10 novembre, les troupes belges se trouvaient dans les faubourgs occidentaux de Ghent (Gand). A noter que sans l’armistice, une offensive aurait été lancée le 10 novembre 1918 pour franchir l’Escaut et tenter de prendre Bruxelles.

mitrailleuse MG-08
Le repli allemand se passa globalement dans l’ordre, repli couvert par des compagnies de mitrailleuses (Machinen Gewehr Kompanies) qui provoquèrent de sérieuses pertes aux alliés. Les pertes belges entre le 4 octobre et le 11 novembre représentant un tiers de ses pertes totales durant tout le conflit ce qui montre la dureté des combats.
L’armistice fût une surprise pour les troupes alliées comme allemands et allait générer la toxique légende du coup de poignard dans le dos (Dolchlosslegend) qui prétend que l’armée allemande n’à pas été vaincue sur le champ de bataille c’est-à-dire de manière régulière mais trahie par l’arrière et notamment les juifs et les communistes.
En réalité, les travaux des historiens ont montré que l’armée impériale est à l’époque en pleine décomposition et qu’une offensive supplémentaire aurait pu la rejeter facilement en Allemagne.
Nul ne peut savoir ce qui serait advenu de l’Allemagne si des combats avaient lieu au printemps 1919 sur le territoire allemand.
C’est aussi pourquoi durant le second conflit mondial, l’Allemagne tardera à mettre sur pied une économie de guerre, craignant qu’en sacrifiant le confort de la population civile, «l’arrière» ne cède et n’entraîne l’armée dans sa chute.
L’Armée belge à eu durant le conflit 42987 tués et 44686 blessés soit un taux de perte de 11% le plus faibles des armées du front occidental. En ce qui concerne les civils, on estime les pertes à 62000. Le taux de désertion ne cesse de progresser au fil des années avec 1203 en 1916, 5603 en 1917, 2778 entre janvier et mai 1918.
La défaite allemande actée, l’Armée belge occupe la région d’Aix-la-Chapelle et une partie de la Rhénanie conjointement avec les Franco-Anglais. Elle retournera en Rhénanie entre 1921 et 1925 aux côtés des allemands pour obtenir le paiement des réparations.

soldat belge dans la nouvelle tenue et utilisant un fusil mitrailleur Chauchat
A noter que pour l’équipement, l’uniforme désuet d’août 1914 fût remplacé par un équipement moderne très inspiré de la France (avec notamment le célèbre casque Adrian) mais l’uniforme utilisait le même tissu que les britanniques ce qui donnait un cachet particulier aux nouveaux soldats belges.