D’une révolution à l’autre (1789-1830)
Révolutions et Révolution
Au 18ème siècle, le mouvement des Lumières imprègne toute la société. Certes pas les plus humbles mais toutes les couches allant de la noblesse à la petite-bourgeoisie. Ce mouvement va chercher à tirer le meilleur de l’homme et ce dans tous les domaines y compris et surtout dans le domaine politique.
En 1789, la monarchie française connait une crise financière sans précédent. Louis XVI n’à plus le choix et doit se résoudre à réunir les Etats Généraux, le seul organe habileté à lever des nouveaux impôts, organe qui n’à pas été réuni depuis 1614.

Statue de Louis XVI sur la colonne du même nom dans la plus belle ville du monde : Nantes
Très vite la question fiscale et financière passe au second plan. Ce sont des réformes que le Tiers-Etat ainsi que la partie la plus progressiste du clergé et de la noblesse. C’est le début de la Révolution Française qui allait balayer une monarchie vieille de 800 ans.
Le sujet de la Révolution Française sort du cadre de notre étude mais il est important de rappeler que jusqu’en 1791 grosso modo, ce mouvement est plutôt bien éclairé parmi l’intelligensia européenne y compris chez les anglais qui voit dans cette révolution le pendant de leur Glorieuse Révolution survenue un siècle plutôt en 1688.
Seulement voilà à la différence de la révolution anglaise, la révolution française va se radicaliser, aboutissant à une guerre sur tout le continent et à des révoltes intérieures. Personne ne le sait encore mais c’est le début de vingt-cinq années de conflit quasiment ininterrompues jusqu’en 1815.
La révolution française je l’ai dis impacte toute l’Europe et inspire de nombreux patriotes qui rêvent de secouer leur ancienne régime. Proximité géographique oblige, la future Belgique ne tarde pas à être secouée par deux révolutions.
La première c’est la révolution liégeoise, un mouvement de six ans (1789-1795) qui va aboutir à la disparition d’un état pluricentenaire (la principauté de Liège) et à l’annexion de la future Belgique à la France du Directoire. Il y à cependant débat chez les historiens pour savoir si la Revolucion lidjwesse est une simple copie de la révolution française ou si elle à ses propres particularismes ou encore si elle est davantage liée à la révolution brabançonne.
Cette révolution liégeoise fût une période troublée, Liège passant du statut de principauté épiscopale à simple département français.
De 1772 à 1784, le prince-évêque, monseigneur Velbrück était un esprit ouvert aux idées nouvelles mais son successeur Mgr Hoensbroeck est nettement plus autoritaire et réactionnaire.
Cette révolution à été clairement favorisée par les idées nouvelles mais elle à pu prospérer sur un terreau favorable : mécontentement face à un pouvoir politique confisqué, situation économique difficile. Des voix s’élèvent donc pour de profondes réformes et plus de justice sociale.
De Velbruck aurait peut être accédé à ces demandes (encore qu’on à connu des réformateurs audacieux dans les salons et très timides en public) mais certainement pas son successeur, bien plus réactionnaire qui refuse toute réforme et va donc attiser le mécontentement populaire jusqu’à ce que la révolution éclate.
La révolution éclate dans la nuit du 26 au 27 août 1789, le prince-évêque fuyant en Allemagne, la république liégeoise est proclamée. De novembre 1789 à avril 1790, la ville de Liège et d’autres villes de la principauté
Le 12 janvier 1791, une armée autrichienne rétablit Hoensbroeck sur son trône provoquant l’exil des patriotes liégeois à Paris.

Dumouriez
Le 3 juin 1792, monseigneur Hoensbroeck alias le «Tyran de Seraing» meurt et est remplacé par François-Antoine-Marie de Méan mais ce dernier doit fuir devant l’avancée des troupes de Dumouriez qui après la bataille de Jemappes (6 novembre 1792) prennent le contrôle de la principauté de Liège et des Pays-Bays autrichiens. Le général français qui n’à pas encore tourné casaque entre à Liège le 28.
Si les wallons sont enthousiastes, les flamands présents dans la principauté sont nettement plus réservés. En revanche il était impensable que la principauté reste indépendante. Après l’échec de négociations avec le duché de Brabant, la seule solution c’était l’union à la France ce qui sera effective en 1793. La victoire de Neerwinden en mars 1793 permet la restauration du prince-évêque.
En 1794 bis repetita, les victoires françaises de Fleurus (26 juin 1794) et de Sprimont (17 septembre 1794) permettent la reprise de la principauté qui est pleinement intégrée à la France en 1795. Liège est évacuée par les troupes autrichiennes le 27 juillet 1794. C’est la fin définitive de la principauté épiscopale de Liège après plus de 800 ans d’existence.
Le territoire de feu la principauté de Liège est répartie en trois départements : Ourthe, Meuse-Inférieure et Sambre-et-Meuse. Cette disparition sera entérinée en 1801 par le Concordat entre Bonaparte et le pape Pie VII.
Ces départements restèrent fidèles à l’Empire jusqu’à la fin. Ces trois départements vont intégrer le Royaume-Uni des Pays-Bas au sein d’une province de Liège.
La seconde révolution est la révolution brabançonne qui concerne les Pays-Bas autrichiens. Elle se déroule à la même époque que la révolution liégeoise. A l’époque, l’empereur est le fils de Marie-Thérèse, Joseph II représenté sur place par l’archiduchesse Marie-Christine _sœur de l’empereur_ et son époux, Albert de Saxe, duc de Teschen.

Joseph II
Cette révolution éclate suite aux réformes de Joseph II qui voulait supprimer des lois et des règlements et surtout centraliser davantage les possessions hasbourgeoises.
En bon «despote éclairé», le fils de Marie-Thérèse voulait faire le bonheur de ses sujets mais les sujets en question n’étaient pas forcement d’accord ou alors étaient davantage attirés par les principes de la révolution française. Au fond qui était rejeté s’ajoutait une forme très cassante vis à vis des élites locales.
En 1787, les trois Conseils collatéraux sont remplacés par un Conseil Général du gouvernement des Pays-Bas présidé par un ministre dépendant de l’empereur. Les anciennes provinces sont remplacées par neuf cercles divisées en soixante-quatre districts.
La justice est également bouleversée avec le remplacement des institutions existantes par une organisation hiérarchisée chapeautée par un conseil souverain de justice installé à Bruxelles.
Ces réformes qui partent sûrement d’une très bonne intention mettent le feu aux poudres en raison de l’absence totale de concertation qui aurait peut être permis de trouver un compromis mais la patience et la négociation n’étaient pas le fort de Joseph II.
Le 11 janvier 1790 est proclamée la naissance de la Confédération des Etats Belges Unis. Les partisans de la confédération se divisent alors entre progressistes et conservateurs ce qui obère la capacité de défense du nouvel état. Résultat en octobre 1790, les troupes du Saint-Empire n’ont aucun mal à rétablir l’autorité impériale.
La Belgique, la Révolution Française et l’Empire (1789-1815)
Par sa position géographique, la future Belgique ne pouvait échapper aux guerres de la Révolution et de l’Empire. Elle en fût même le carburant car Londres posait comme condition sine qua non l’évacuation de la Belgique par la France mais comme il s’agissait d’une conquête révolutionnaire, Napoléon Bonaparte ne pu s’y résoudre.
Entre 1792 et 1797 se déroulent les combats de la 1ère coalition. Ces combats ont lieu aussi bien sur la frontière espagnole qu’en Italie (où émerge un jeune général corse de 27 ans Napoléon Bonaparte), en Allemagne et dans les Pays-Bas autrichiens.
Le 20 avril 1792, la France déclare la guerre au roi de Bohème et de Hongrie. Peu après, les Pays-Bas autrichiens vont être envahis par une armée française affaiblie par l’émigration des officiers nobles.
Les soldats de métier encore présents sont vus avec beaucoup de suspicion et les «volontaires» si enthousiastes soit-ils ne peuvent compenser l’inexpérience alors qu’ils ont face à eux des professionnels de la guerre.

Le Marquis de La Fayette
Les effectifs sont pourtant importants avec 40000 hommes engagés répartis entre un corps commandé par le «héros des deux mondes», le général de La Fayette, un corps sous l’autorité du maréchal Nicolas Luckner et un troisième corps commandé par un autre héros de la guerre d’indépendance américaine, le marquis de Rochambeau. Face à eux se trouvent 30000 autrichiens commandés par le général Bender.
Le 28 avril 1792, les français attaquent. Mal équipés, mal commandés, les soldats français connaissent de nombreux échecs contre les autrichiens notamment devant Quiévrain, Mons et Tournai.
La France fait face à une formidable coalition à laquelle participe donc la Maison d’Autriche ce qui concerne donc directement la future Belgique. C’était écrit que la Révolution Française allait être écrasée et l’Ancien Régime rétablit.
C’était sans compter les divergences au sein de la coalition et un miracle du côté de Valmy le 20 septembre 1792.
La France révolutionnaire galvanisée lance l’offensive sur tous les fronts. Les volontaires qui jadis fuyaient devant les autrichiens, les prussiens et autres soldats professionnels ne reculent plus mais font face. L’audace de ces soldats de hasard perturbent des soldats de métier habitués à manœuvrer comme à la parade.
En effet aux parades millimétrées, l’armée de la Révolution choisit l’offensive à outrance, baïonnette au canon. Lazare Carnot organise l’économie pour armer plusieurs centaines de milliers d’hommes et du rang surgissent une génération spontanée de généraux plus talentueux les uns que les autres comme Hoche, Joubert et bien entendu Bonaparte.

Lazare Hoche (1768-1797)
Le 6 novembre 1792, le général Dumouriez annonce son intention de pénétrer dans les Pays-Bas avec une armée de 60000 hommes. Il retrouve l’armée du baron Bender retranchée à Jemappes.
Les français l’emportent, les autrichiens doivent battre en retraite. Bender fait même évacuer Bruxelles et se retranche à Luxembourg. Bruxelles tombe aux mains des français le 14 novembre, Liège suit le 28 novembre et Namur le 2 décembre.
C’est alors que Dumouriez s’oppose aux commissaires de la République qui souhaitent une annexion pure et simples des territoires belges en vue de réaliser le rêve d’un pays possédant des frontières naturelles : Atlantique, Pyrenées, Méditerranée, Alpes et Rhin.
Le futur général renégat encourage les belges à s’organiser en république indépendante. Si cela plait aux progressistes, cela ulcère les conservateurs et les jacobins. Finalement Danton proclame l’annexion de la Belgique le 13 janvier 1793.
En 1793, les combats se portent également sur le territoire des Provinces-Unies. Les impériaux passent à la contre-offensive, s’emparant de Maastricht puis de Liège le 5 mars 1793.
Le 18 mars 1793, les français sont battus à Neerwinden. Ils doivent abandonner les territoires belges. Le général Dumouriez fait défection et rallie les forces autrichiennes.
Le 26 mars 1793, l’archiduc Charles frère de l’empereur François II, nouveau gouverneur des Pays-Bas et le comte de Metternich-Winnenburg, ministre plénipotentiaire font une entrée triomphale à Bruxelles.

François II, empereur du Saint Empire Romain Germanique puis empire d’Autriche
François II à tiré les leçons du passé. La politique autrichienne est à la conciliation et à l’apaisement pour ne pas pousser les belges dans les bras des français. Une amnistie est prononcée, les Etats du Brabant votant sans problèmes les subsides mais aussi un don gratuit pour financer la guerre contre la France.
Les autrichiens et les anglais pénètrent dans le nord de la France, s’emparant de plusieurs villes comme Dunkerque et Maubeuge mais comme jadis la résistance française s’affirme et la victoire du général Houchard à la bataille de Hondschoote dégage Dunkerque du siège anglais et porte à nouveau la guerre sur le territoire belge.
Les 15 et 16 octobre 1793, les troupes françaises commandées par Jourdan et Carnot remportent la victoire de Wattignies. Les autrichiens doivent se replier vers Mons.
Ypres est prise le 18 juin 1794 suivit de Charleroi le 25 juin. La victoire décisive à lieu à Fleurus le 26 juin et le 11 juillet, les français rentrent à nouveau à Bruxelles. Les autrichiens ne cessent de reculer, étant rejetés de l’autre côté du Rhin en janvier 1795. les anglais et les hollandais se replient aussi, les français rentrant à Amsterdam le 20 janvier 1795.
Le 1er octobre 1795 (9 vendémiaire an IV), la Convention décrète la réunion de la Belgique et du pays de Liège à la France. Ces territoires sont réorganisés en neuf départements qui correspondent à peu près aux anciens États des Pays-Bas autrichiens tandis que le sud de l’Entre-Sambre-et-Meuse est attaché au département des Ardennes (décret du 14 fructidor an III 31 août 1795).
Les Pays-Bas autrichiens n’existent plus. ils sont maintenant annexés à la Première République française. Il faudra cependant attendre le traité de Campo-Formio (18 octobre 1797/26 Vendémiaire An VI) pour que l’empereur François II reconnaisse que les Pays-Bas autrichiens quittent le Saint-Empire pour rallier la République Française (en attendant le Premier Empire).
La future Belgique est ensuite relativement peu concernée par les guerres de l’Empire, les batailles se déroulant loin du plat pays. Il faudra attendre la fin de l’Empire pour que les plaines belges se retrouvent au cœur des batailles entre les coalisés et Napoléon Bonaparte.
En 1814, les territoires belges de l’Empire Français sont placés sous la tutelle des alliés en attendant que le Congrès de Vienne prenne une décision. En dépit des rivalités entre anglais, russes, autrichiens et prussiens, un accord est trouvé.

Charles Maurice de Talleyrand-Périgord
Grâce à la maestria du «Diable Boiteux», Talleyrand et malgré l’épisode des Cent Jours, la France de Louis XVIII s’en sort bien. Les frontières sont certes réduites mais ce n’est pas la cataclysme que des pays revanchards comme la Prusse auraient pu infliger à notre pays.
Il faut cependant éviter un nouvel aventurisme de ces diables de français. On décide donc de corseter la France par des états-tampons.
Au sud on trouve le Royaume d’Espagne où Ferdinand VII est restauré, au sud-est, on trouve le royaume de Piémont-Sardaigne, sur le Rhin la Prusse s’installe, préparant la future unité allemande et au nord au trouve le Royaume-Uni des Pays-Bas qui englobe feu les Provinces-Unies, le Grand-Duché du Luxembourg et les anciens Pays-Bas autrichiens.
Si on peu trouver un mot pour résumer tout ceci ce serait compensation. Les populations locales ne sont naturellement pas consultés. Si l’empereur d’Autriche perd les Pays-Bas autrichiens, il reçoit en compensation la Vénétie.
Les Pays-Bas autrichiens sont ainsi cédés au Royaume-Uni des Pays-Bas pour compenser la perte de la colonie du Cap et de ses comptoirs d’Asie. Le Luxembourg (qui se compose de la province actuelle du Luxembourg belge et le Grand-Duché proprement dit) à été cédé à titre personnel à Guillaume 1er pour compenser la perte de possessions familiales cédées à la Prusse. Le Luxembourg appartient d’ailleurs à la Confédération Germanique, une garnison essentiellement prussienne se chargeant de défendre ce pays.