La Guerre de Sept Ans et la fin de la Nouvelle-France
La guerre de Sept Ans devrait si on était strict s’appeler Guerre de Neuf Ans car quand la guerre éclate en Europe en 1756, les combats font rage dans le Nouveau Monde depuis mai 1754 mais à l’époque personne n’à l’impression de participer à un conflit mondial car l’Amérique c’est très, trop loin de Versailles, Londres, Berlin ou Vienne (pour citer les principaux protagonistes du conflit, l’alliance franco-autrichienne contre l’alliance anglo-prussienne).
Cette vision d’un conflit mondial fait que nombre d’historiens considère la guerre de Sept Ans comme le premier conflit mondial mais cette vision n’à pas entraîné une renumérotation des deux boucheries du 20ème siècle, la guerre d’août 1914 à novembre 1918 est toujours la première guerre mondiale et la guerre de septembre 1948 à septembre 1954 est toujours la deuxième guerre mondiale.
NdA je vais aborder uniquement le volet nord-américain de la guerre de Sept Ans
Une précision sémantique tout d’abord. En Amérique le conflit n’est pas appelé «Guerre de Sept Ans» (et pour cause !) mais selon les écrits «Guerre de la Conquête» ou «French and Indian War» (guerres françaises et indiennes).
A l’époque la puissance dominante en Amérique du Nord est la France dont l’immense empire encercle les treize colonies américaines qui ne peuvent s’étendre au delà des Appalaches en dépit d’une dynamisme économique et démographique bien plus important que celui de la Nouvelle-France.
Comme à Fontenoy neuf ans plus tôt ce sont les anglais qui vont tirer les premiers. En janvier 1754, des virginiens commandés par William Trent s’empare d’un fort français qui rebaptise Fort Prince George.
Réaction immédiate des français qui les expulsent et construisent Fort Duquesne sur l’emplacement de l’actuelle de Pittsburgh (18 avril 1754).
Le véritable cassus belli du volet nord-américain de la guerre de Sept ans c’est la mort de Coulon de Jumonville, un officier français tué alors qu’il devait vérifier si le territoire français (dans l’actuelle Pennsylvanie) était envahit par les anglais.
Dans des circonstances troubles, le chef du détachement britannique, le colonel George Washington aurait ordonné l’ouverture du feu sur cet émissaire de Louis XV qui est tué puis scalpé par les auxiliaires améridiens alliés des britanniques (28 mai 1754).
Cela va entraîner la bataille de Fort Necessity (construit par George Washington) le 4 juillet de la même année qui est une victoire française, la prestation de George Washington est de son propre aveu piteuse ce qui ne l’empêchera pas d’être le commandant en chef des insurgents vingt ans plus tard et d’accepter l’aide française de La Fayette et de Rochambeau.
Les tentatives locales ayant échoué pour reprendre Fort Necessity, la métropole envoie des renforts (deux régiments, 10000 livres et 2000 mousquets).
L’année 1755 est marquée par de nombreuses escarmouches entre français et britanniques dans la vallée de l’Ohio.
Les britanniques connaissent un grand nombre d’échecs, combattant à l’européenne selon les mœurs de l’époque (ordre serré, colonne de bataille) face à des français et des améridiens qui pratiquent la guérilla donna peut être des idées aux futurs chefs des insurgents. Néanmoins au début de 1756 après la victoire britannique à la bataille du lac George, le commandant Dieskau blessé et fait prisonnier doit céder sa place à Louis-Joseph de Saint-Verran, marquis de Montcalm.
Sur mer les choses se passent mieux pour les britanniques qui établissent un blocus à l’entrée du golfe du Saint-Laurent.
Le 8 juin 1755 à lieu une bataille au large du cap Race qui voit la capture de deux navires français pendant que d’autres parviennent à franchir le blocus. Cette bataille, un harcèlement continuel et la capture des marins explique pourquoi un conflit initialement localisé à l’Amérique du Nord va dégénérer en un vrai conflit «mondial» au printemps 1756, la Grande Bretagne déclarant la guerre à la France le 18 mai 1756.
A la même époque commence ce qu’on à appelé le «Grand Dérangement», la déportation des Acadiens qui refusaient de servir dans l’armée et dans la marine britannique, une mesure prise contre une population qui vivaient sous l’autorité britannique depuis la paix d’Utrecht (1713). Une partie rallia le Québec, d’autres la France et d’autres encore la Louisiane mais la majorité fût dispersé dans différentes colonies britanniques.

Buste de Louis Montcalm de Saint Verran
A peine arrivé, le marquis de Montcalm s’empare du fort britannique d’Oswego sur la rive du lac Ontario, principale menace sur les lignes de communications françaises entre le Canada et la vallée de l’Ohio. 1700 britanniques sont faits prisonniers.
En 1757 les britanniques se fixent comme objectif la prise de la forteresse française de Louisbourg à l’embouchure du Saint-Laurent.
L’armée britannique commandée par Loudon rallie Halifax, attendant la marine mais comme la Royal Navy à pris du retard, trois escadres françaises se regroupent à Louisbourg. La saison étant trop avancée pour combattre, le commandant britannique se replie en direction de New-York.
Montcalm attaque Fort William Henry à la pointe sud du Lac George mais en dépit d’une résistance héroïque du colonel Monro le fort est prit et 2300 britanniques faits prisonniers.

William Pitt l’Ancien
Le ministre de la Guerre William Pitt l’Ancien nomme Abercrombie à la tête des forces britanniques et envoie de nombreux renforts. La Royal Navy met en place un blocus efficace, favorisant une offensive sur trois axes : Louisbourg, Fort Carillon, et Fort Duquesne.
En juillet 1757 le général Abercrombie se met en marche avec une armée de 7000 réguliers et de 9000 coloniaux soit 16000 hommes direction le lac Champlain pour s’emparer de Fort Carillon. Le marquis de Montcalm tente de l’arrêter avec 3000 hommes. La bataille de Fort Carillon se termine par une victoire française mais la supériorité britannique est trop nette pour que cela change vraiment quelque chose.
Le 27 août 1757 Fort Frontenac est pris, un vrai coup dur car c’était un centre de ravitaillement très important pour les français. Fin octobre c’est Fort Duquesne qui est pris et immédiatement rebaptisé Fort Pitt (d’où le nom de Pittsburgh).
Les mauvaises nouvelles s’accumulent pour les français. Aux défaites de Fort Frontenac et de Fort Duquesne s’ajoute le débarquement au sud de Louisbourg de 14600 hommes qui est prise le 26 juillet après six semaines de résistance.
Le reste de la campagne si ce n’est pas une promenade de santé est une succession de victoires britanniques notamment la prise de tous les forts de la vallée de l’Ohio notamment le fort Carillon pris le 27 juillet 1759.
Le 21 juin 1759 les britanniques sont en vue de Québec qui est assiégée à partir du 12 juillet. La résistance française est farouche, la garnison de 15000 hommes résistant farouchement. Dans la nuit du 12 au 13 septembre, le commandant britannique Wolfe débarque une armée dans une zone non défendue par les français ce qui force Montcalm à livré bataille.

James Wolfe
Le 13 septembre 1759 à lieu la bataille des plaines d’Abraham, une bataille où les deux commandants en chef _Wolfe et Montcalm_ meurent mais le premier est victorieux. Vaudreuil dirige la retraite des troupes, la garnison de Québec capitulant le 18 septembre.
Au printemps suivant, une armée française commandée par Lévis l’emporte à Sainte-Foy aux portes de Québec ce qui faire espérer la reprise de Québec mais au même moment les britanniques ont lancé une offensive en direction de Montréal, une offensive terrestre doublée d’une offensive sur le Saint-Laurent.
Le 8 septembre 1760 les britanniques s’emparent de Montréal puis de Fort Pontchartrain du Détroit sur le site même de la future ville de Détroit.
La guerre au Canada est pliée, l’essentiel des combats se déroulant dans les Caraïbes où suivant le pacte de famille, l’Espagne rentre en guerre. Si Madrid était entré en guerre en même temps que la France cela aurait pu changer les choses mais là Paris n’à plus assez de moyens.
En profitant de l’engagement massif des britanniques aux Antilles, les français tentent de reprendre la main au Canada mais cela ne donne rien d’autre qu’une défaite à Terre Neuve (bataille de Signal Hill le 15 septembre 1762).
Des négociations de paix ont commencé en 1761 mais l’entrée en guerre de l’Espagne le 4 mai 1762 interrompt les négociations. La paix est finalement signé en deux fois avec d’abord le traité de Paris qui concerne la Grande-Bretagne, la France et l’Espagne le 10 février 1763.
Les gains britanniques sont énormes avec pour la Grande-Bretagne le Canada et toutes les îles au large sauf Saint-Pierre-et-Miquelon ainsi que tous les territoires à l’est du Mississippi.
Dans les Caraïbes si la France récupère la Martinique, la Guadeloupe, Marie-Galante et Sainte-Lucie, toutes les autres îles deviennent britanniques. Si l’Espagne récupère Cuba et les Philippines, elle doit céder la Floride et doit évacuer le Portugal.
En Inde, les britanniques font des Indes le joyau de leur empire, la français ne conservant que cinq comptoirs qui ne sont pas fortifiés et ne possèdent aucune garnison. En Europe, Belle-Île occupée par les britanniques est échangée avec Minorque.
En Afrique tous les territoires britanniques sont libérés, Gorée est rendue aux français en échange du Sénégal.
L’autre traité concerne l’Autriche et la Prusse (traité de Hubertsbourg 15 février 1763) et sort du cadre de cette étude.
A la guerre de Sept Ans qui met fin à la Nouvelle-France succède une guerre menée par une alliance de quatorze nations amérindiennes contre les britanniques. Cette guerre qui dure du 7 mai 1763 au 25 juillet 1766 se termine par une paix blanche.
Cette guerre de Sept Ans fait de la Grande-Bretagne une puissance mondiale avec le premier empire colonial du monde et une maîtrise absolue des mers. Ce sont les prémices de la Pax Britannica qui va régner sur le monde de 1815 à 1914.
C’est aussi le début d’un Canada qui devient un pays d’essence anglophone même si se maintien au Québec une imposante minorité francophone qui va se battre pour conserver son identité et sa culture, ayant souvent l’impression de ne pas être compris par le reste du Canada.