Les avions militaires soviétiques (3) : reconnaissance et observation
Avant-propos
Comme nous l’avons vu, la mission première de l’avion était l’observation et la reconnaissance au profit des états-majors mais aussi au profit de l’artillerie dont la portée sans cesse croissante imposait des capteurs déportés, aéroportés afin de repérer les cibles et de corriger le tir après la première salve.
Même après le développement de la chasse et du bombardement, la reconnaissance resta une mission importante et prioritaire pour l’aviation ce qui explique la réticence pour de nombreux pays de voir émerger une force aérienne indépendante, l’armée de terre étant réticente à perdre son aviation (c’était la même chose pour la marine).
Les avions de reconnaissance forment une vaste famille allant du petit monomoteur destiné à coller au plus près du front («le mouchard» pour les troupes françaises) au puissant appareil qu’il soit bimoteur ou quadrimoteur volant à haute voir très haute altitude.
Ces avions ne sont d’ailleurs pas amenés à jouer le même rôle, le premier était destiné à l’observation des mouvements ennemis alors que le dernier était destiné à la reconnaissance stratégique.
Au pays de l’art opératif, la reconnaissance avait un rôle capital. Il s’agissait de repérer le dispositif ennemi, de le cartographier, de trouver points faibles et points forts pour échafauder un plan de bataille destiné à démanteler ce système en sous-systèmes qui génèrent davantage de problèmes qu’autre chose.
La reconnaissance photo n’est qu’un moyen aux côtés de l’écoute radio, du renseignement humain ou encore de la reconnaissance terrestre.

Polikarpov Po-2
Une fois l’opération lancée, la reconnaissance est toujours aussi importante. Pour limiter la «friction» et tenter de dissiper «le brouillard de guerre», les avions de reconnaissance qu’il s’agisse de petits monomoteurs Po-2 ou de bimoteurs comme le Pe-2 doivent repérer tout point de blocage et soit déclencher les feux pour l’éliminer ou si cela prend trop de temps trouver une solution alternative.
En juin 1950, les VVS disposent d’avions de reconnaissance légers et des avions de reconnaissance tactique, peu en revanche d’avions de reconnaissance stratégique. Ces avions sont généralement des dérivés d’appareils existants ce qui facilite la production, le soutien logistique et la formation des équipages.
On trouve ainsi des monomoteurs Kharkiv KhAI-5 (utilisés également pour le bombardement léger), des monomoteurs Sukhoï Su-2/4 et 6, des monomoteur Polikarpov Po-2 (et quelques anciens R-5 et R-Z) mais aussi des bimoteurs dérivés d’avions d’attaque et utilisés pour la reconnaissance tactique ou à long rayon d’action en l’occurrence le Petlyakov Pe-2, le Tupolev Tu-2R (reconnaissance à long rayon d’action) et le Tupolev Tu-2F (reconnaissance photo).
Après guerre, les soviétiques ne développeront pas d’avions de reconnaissance spécifique, se contentant de mettre au point comme de nombreux pays une variante reconnaissance de leur chasseur-bombardier standard.
En juin 1950 les unités de reconnaissance forment des divisions de reconnaissance et d’observation dépendant des différentes armées aériennes, chaque division disposant de trois à quatre régiments de 21 appareils soit des divisions de 84 appareils.
Ces divisions qui dépendaient des VVS furent rejoints au cours du conflit par des régiments intégrés aux divisions de bombardement de la DA, régiments de 21 appareils utilisés pour l’éclairage des bombardiers, des sortes de Pathfinder russes.
Polikarpov Po-2
Le Polikarpov Po-2 (appelé également U-2 en raison de son rôle initial d’avion d’entrainement uchebnyy en russe, le nom Po-2 à été adopté en 1944, deux ans après la mort de Vladimir Polikarpov) était un avion d’usage général mis au point à la fin des années vingt et utilisés pendant près de vingt-cinq avant, pendant et même après le second conflit mondial !
Outre l’entrainement, il fût utilisé également pour l’attaque au sol, la reconnaissance, la guerre psychologique, les liaisons, l’évacuation sanitaire……. . Entre 1928 et 1959, ont été produit plus de 30000 Po-2.
A l’origine de cette sucess story russe figure la volonté de remplacer le U-1, la copie de l’Avro 504 britannique. Le vol inaugural à lieu le 7 janvier 1928, les essais menés au cours de l’année avant de lancer la production en série en 1929.
La production cesse dès 1956 en URSS mais se poursuit jusqu’en 1959 en Pologne et en en Tchécoslovaquie, les deux pays achetant la licence dès 1955 pour relancer la production aéronautique le plus rapidement possible.
A la version de base désignée U-2 s’ajoute les U-2A U-2AO et U-2AP pour les travaux agricoles (futurs Po-2A, Po-2AO et Po-2AP), les appareils expérimentaux U-2G, U-2PL et U-2KL, des versions d’attaque au sol U-2LSh et U-2LNB, des versions hydravion U-2M et U-2P, une version ambulance U-2S, une version liaison U-2ShS, des versions de transports civils U-2SP et U-2SPL, la version d’entrainement U-2UT, la version utilitaire U-2VS, une version d’observation nocturne d’artillerie U-2NAK, des versions améliorées U-3 et U-4.
Outre l’URSS, l’appareil à été utilisé par l’Albanie, la Bulgarie, la Chine, la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Finlande, l’Allemagne (appareils capturés), la Hongrie, la Mongolie, la Roumanie, la Turquie et la Yougoslavie.
Caractéristiques Techniques
Type : biplan biplace d’usage général
Masse à vide 770kg en charge 1030kg maximale au décollage 1350kg charge utile 260kg
Dimensions : longueur 8.17m envergure 11.40m hauteur 3.10m
Motorisation : un moteur radial Shvetsov M-11D de 125ch
Performances : vitesse maximale 152km/h vitesse de croisière 110km/h distance franchissable 630km plafond opérationnel 3000m
Armement (U-2VS/LNB) une mitrailleuse de 7.62mm ShKAS et six bombes de 50kg
Polikarpov R-5
Le Polikarpov R-5 est un monomoteur biplan mis en service au début des années trente. Il à été utilisé comme avion de reconnaissance et comme bombardier léger. Près de 7000 appareils ont été produits pour les forces aériennes soviétiques mais aussi pour l’export.
Destiné à remplacer le Polikarpov R-1, le R-5 était un biplan essentiellement construit en bois. Le prototype effectue son premier vol à l’automne 1928 et entre en production en 1930.
Outre la version de base, des variantes hydravions, attaque au sol et transport civil ont été produites avant de passer le relais au Polikarpov R-Z, une version améliorée du R-5 mais qui sera comme son devancier rapidement déclassé par des avions plus modernes.
L’appareil connait son baptême du feu sous les couleurs soviétiques en 1939 lors de la bataille de Khalkhin-Gol contre les japonais avant de combattre en Pologne et en Finlande. Si les pertes furent minimes durant les deux premiers conflits, en revanche en Finlande les pertes furent plus lourdes.
Entre-temps l’appareil à combattu en Espagne sous les couleurs républicaines avec 31 exemplaires qui jugés trop lents furent relégués au bombardement de nuit où ils étaient moins vulnérables. Il en restait sept à la fin du conflit mais ils n’ont visiblement pas été réutilisés par les nationalistes après leur victoire.
La version civile baptisée Polikarpov P-5 embarquait elle deux passagers et 400kg de fret. Certains appareils disposaient de conteneurs appelés Kasseta pouvant emporter sept passagers.
En juin 1950 l’appareil était clairement dépassé mais il restait en service. De nombreux exemplaires furent détruits au sol ou abattus après avoir décollé, leur lenteur en faisant des proies idéales pour la chasse allemande.
Les survivants furent utilisés essentiellement de nuit pour des missions de harcèlement nocturne et ce jusqu’à la fin de la guerre en septembre 1954. Il est immédiatement retiré du service, tous les appareils ou presque feraillés. Outre l’URSS et l’Espagne, l’appareil à été utilisé par l’Iran, la Mongolie et la Turquie.
Caractéristiques Techniques
Type : avion de reconnaissance et de bombardement léger biplan monomoteur biplace
Masse à vide 1969kg en charge 3247kg
Dimensions : longueur 10.56m envergure 15.5m hauteur 3.25m
Motorisation : un moteur en ligne Mikulin M-17B de 680ch
Performances : vitesse maximale 228km/h distance franchissable 800km plafond opérationnel 6400m
Armement : une mitrailleuse fixe PV-1 tirant vers l’avant et une mitrailleuse DA dans le cockpit arrière 250kg de bombes sous l’aile inférieure
Polikarpov R-Z
Le Polikarpov R-Z est une évolution directe du R-5. Effectuant son premier vol en janvier 1935, il va être produit à plus de 1000 exemplaires entre 1935 et 1937. Il va participer à la guerre d’Espagne, à la bataille de Khalkhin-Gol et à la guerre d’Hiver.
Par rapport au R-5, le R-Z avait un nouveau fuselage monocoque plus profond, une canopée coulissante pour le pilote et une protection fixe pour l’observateur, un moteur plus puissant.
L’appareil était toujours en service en juin 1950 mais en petit nombre. Des appareils surpris au sol furent détruits par la Luftwafe, d’autres abattus alors qu’ils avaient pris l’air pour éviter d’être réduits au sol à l’état d’épave.
Tout comme le Polikarpov R-5, le Polikarpov R-Z fut utilisé de nuit pour des missions de harcèlement nocturne, frappant une fois par nuit loin derrière le front dans des zones où les défenses étaient assez faibles.
Retiré du service actif dès la fin de la guerre, le petit biplan monomoteur à été préservé à quelques exemplaires dans les musées du monde entier mais aucun en état de vol malgré les efforts de quelques passionnés.
Caractéristiques Techniques
Type : avion de reconnaissance et de bombardement léger biplan monomoteur biplace
Masse à vide 2007kg en charge 3150kg
Dimensions : longueur 9.72m envergure 15.45m hauteur 3.60m
Motorisation : un moteur en ligne Mikulin AM-34 de 820ch
Performances : vitesse maximale 316km/h à 3500m distance franchissable 1000km plafond opérationnel 8700m
Armement : une mitrailleuse fixe PV-1 tirant vers l’avant et une mitrailleuse DA dans le cockpit arrière 250kg de bombes sous l’aile inférieure
Tupolev ANT-7
Connu également sous la désignation de Tupolev R-6, l’ANT-7 est un avion bimoteur monoplan utilisable aussi bien pour la reconnaissance que pour l’escorte des bombardiers dans une période où on cherchait à faire effectuer à un même avion plusieurs missions ce qui donnait généralement des avions bons à rien et mauvais en tout.
Pour l’ANT-7 outre la reconnaissance et l’escorte on voulait lui permettre de réaliser des missions de transport, de protection de l’espace aérien, de bombardement léger et même de torpillage !
Issu du Tupolev TB-1, le Tupolev ANT-7 effectue son premier vol le 11 septembre 1929, les tests officiels commençant en mars 1930.
Après un certain nombre de modifications techniques, le premier appareil de série est produit en novembre 1931, premier d’une série de 410 avions produits en trois ans, 385 fabriqués à l’usine GAZ-22 de Moscou, cinq à l’usine GAZ-31 de Taganrog (appareils munis de flotteurs et désignés KR-6P)) et vingt à l’usine GAZ-12 de Komsomolsk-sur-Amour
Obsolète dès 1935, l’appareil quitte le service actif en 1941. Quelques appareils seront détruits au sol par les allemands mais ces ANT-7 étaient des leurres implantés sur de faux aérodromes destinés à détourner l’attention des bombardiers de la Luftwafe des vrais aérodromes opérationnels. Aucun appareil n’à survécu au second conflit mondial.
Caractéristiques Techniques
Type : avion bimoteur de reconnaissance multiplaces
Masse à vide 3856kg en charge 6472kg
Dimensions : longueur 15.06m envergure 23.2m hauteur : nc
Motorisation : deux moteurs en ligne Mikulin M-17F de 720ch
Performances : vitesse maximale 230km/h au niveau de la mer 216km/h à 3000m distance franchissable 800km plafond opérationnel 5620m
Armement : une mitrailleuse de 7.7mm PV-2