URSS (26) Porte-Avions

PORTE-AVIONS

Avant-propos

Cela est peu connu mais la marine russe aurait pu être la première marine du monde à mettre en oeuvre un porte-avions, la marine tsariste étudiant la transformation en porte-avions du vieux cuirassé Admiral Lazarev mis en service en 1869.

Ce projet daté en 1909 aurait vu l’arasement des superstructures pour permettre l’installation d’un pont d’envol de 76.5m de long sur 15.2m au dessus d’un hangar relié au pont d’envol par deux ascenseurs. Les dix avions Blériot devaient cependant gagner la terre après leur décollage du navire ce qui fit échouer le projet : les opposants soulignèrent que les avions de l’époque n’étaient pas connus pour leur exceptionnelle fiabilité.

Cela ne dissuada pas les partisans de l’aviation navale qui obtiennent l’ouverture d’une école de pilotage près de Pétrograd suivi d’un centre d’instruction à Sébastopol puis l’acquisition d’un certain nombre d’hydravions, un premier appareil de ce type étant embarqué sur le croiseur Kagoul au début de 1913. Après le début de la guerre, la Russie réquisitionne et modifie plusieurs navires pour soutenir l’aviation : un pour la flotte de la Baltique et trois pour la flotte de la mer Noire.

Il faudra cependant attendre l’arrivée au pouvoir des bolcheviques pour lancer l’étude de véritables porte-avions.

La marine se heurta cependant à l’opposition de l’armée de terre qui voulait reléguer la marine à une simple force côtière destiné à protéger les flancs contre les autres marines ennemies.

Il y eut bien le développement d’une aviation basée à terre mais il fallut attendre l’immédiat avant guerre pour voir le lancement des premières études de porte-avions bien que le cuirassé Poltava rebaptisé Frunze le 1er janvier 1926 aurait pu être transformé en porte-avions avec 50 appareils mais le projet resta dans les cartons tout comme resta lettre morte l’achèvement en porte-avions du croiseur de bataille inachevé Izmail de classe Borodino.

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Lancement du croiseur de bataille Borodino. L’achèvement de l’Izmail comme porte-avions fût étudié par la RKKF

Cela aurait donné un navire pouvant filer à 27 nœuds, embarquant cinquante avions avec une puissante artillerie antisurface (huit canons de 180mm) mais une protection assez faible puisque le blindage ne serait que de 76mm au maximum.

Outre le manque de moyens techniques et industriels, la géographie ne plaidait pas pour une puissante force de porte-avions. A cela s’ajoute le scepticisme de Staline vis à vis du porte-avions, préférant largement le croiseur lourd.

C’est ainsi qu’en 1936 le maréchal Egorov propose d’ajouter au programme de construction six porte-avions de 23500 tonnes soit le tonnage d’un Essex. Cette idée fût rejetée par Staline qui nous le savons ne croyait pas au porte-avions.

Projet 72

Type 72

Finalement sans que l’on sache trop comment pourquoi, la marine soviétique va disposer en juin 1950 de deux porte-avions type 72, des navires d’une classe comparable aux Essex américains soit 23700 tonnes, 30 nœuds avec un groupe aérien de trente à soixante appareils, des chasseurs Yakovlev Yak-9, des Illiouchine Il-2K et des avions torpilleurs Tupolev PT-M-75. La DCA se compose de canons de 130mm, de canons de 37mm et de 25mm.

Le premier pont plat baptisé Orel est mis en service en juin 1948. Construit à Molotovsk, il est affecté à Mourmansk pour couvrir l’Océan Glacial Arctique même si l’utilisation du porte-avions restera toujours difficile dans cette zone.

Le second baptisé Ulianovsk construit à Konsolmosk sur Amour n’est mis en service qu’en mars 1950. Il est stationné à Vladivostok, constituant une réassurance contre un Japon potentiellement agresseur de l’Extrême-Orient soviétique.

Porte-avions classe Orel (type 72)

Avant-propos

Comme nous l’avons vu en introduction, la mise au point du porte-avions au sein de la marine soviétique à été particulièrement laborieuse en raison d’un grand scepticisme autour du porte-avions, d’un manque d’expérience des architectes navals et surtout sur l’instabilité des bureaux d’études régulièrement purgés.

Finalement après de nombreuses péripéties la marine soviétique parvint à faire construire deux porte-avions d’escadre. Appartenant au type 72 ils sont d’un tonnage voisin des Essex américains avec une configuration, une allure proche des armoured carrier britanniques.

Ils ne possèdent cependant pas de pont blindé et leur hangar est plus spacieux que celui que des Illustrious britanniques. Leur armement est conventionnel avec des canons de 130mm antisurface et antiaériens associés à des pièces légères de 25 et de 37mm.

Sur le plan de l’équipement aéronautique on trouve trois ascenseurs axiaux, six brins d’arrêts et une catapulte mais cette dernière inspirée des catapultes Heinkel utilisées sur les croiseurs et les cuirassés ne donna jamais satisfaction au point qu’elle était rarement employée.

Le groupe aérien se compose de trente à soixante appareils (généralement le chiffre admis est de 42) avec des chasseurs Yakovlev Yak-9K, des bombardiers en piqué Illiouchine Il-2K Sturmovik et des avions-torpilleurs Tupolev PT-M-75.

Carrière opérationnelle

L’Orel

-L’Orel est mis sur cale aux chantiers navals de Molotovsk (auj. Severodinsk) le 14 avril 1943 lancé le 8 mai 1945 et mis en service le 17 juin 1948. Il est affecté sur le théâtre d’opérations de l’Arctique avec Mourmansk pour port-base, Mourmansk étant le seul port soviétique libre des glaces toute l’année.

Les débuts sont difficiles et mêmes délicats avec de nombreux accidents liés à l’inexpérience des pilotes et des marins.

Dans la douleur, la marine soviétique apprend la dureté des opérations aéronavales même si quand l’opération BARBAROSSA débute la RKKF est bien loin de posséder l’expérience des opérations aéronavales des pays étrangers.

Si je devais réaliser une série de cercles de compétences, je mettrai les Etats-Unis et le Japon dans un premier cercle suivit de la Grande-Bretagne et de la France, L’Allemagne, l’Italie et l’URSS étant loin derrière.

A partir du déclenchement de l’opération BARBAROSSA, l’Orel va couvrir les convois ravitaillant l’URSS depuis les îles britanniques. Il va aussi attaquer la navigation allemande au large des côtes norvégiennes et tenter de neutraliser les aérodromes occupés par la Luftwafe.

Cette menace ne peut être ignorée par les allemands qui cherchent à détruire à tout prix ce porte-avions particulièrement remuant. Le 17 mars 1952 alors qu’il venait de lancer son groupe aérien contre Narvik, l’Orel est surpris par des bombardiers allemands en maraude.

Seize Junkers Ju-188 envoyés initialement pour frapper un convoi sont détournés vers cette cible bien plus appétissante. En dépit d’une DCA furieuse et de mouvements désespérés, dix torpilles sont larguées contre le porte-avions et ses trois destroyers d’escorte.

Une «anguille» frappe un destroyer qui explose dans une gigantesque boule de feu, une deuxième se perd mais deux autres frappent à mort le porte-avions qui coule rapidement. Il sera cependant vengé, les chasseurs du porte-avions alertés abattant cinq des huit bombardiers survivants avant de se poser sur des aérodromes à terre.

L’Ulianovsk

-L’Ulianovsk est mis sur cale aux chantiers navals de Konsolmosk sur Amour le 8 janvier 1946 lancé le 14 septembre 1948 et mis en service le 31 mars 1950.

Stationné à Vladivostok, ce porte-avions est chargé de dissuader le Japon d’attaquer la Sibérie et l’Extrême-Orient soviétique.

Le groupe aérien du porte-avions gagne peu à peu en expérience mais est clairement sous-utilisé par rapport à celui de l’Orel qui lui combattait vraiment. On verra même des transferts d’un groupe aérien à l’autre de pilotes, de navigateurs et de rampants.

Après la destruction de l’Orel, l’envoi de l’Ulianovsk à été étudié mais Moscou craignait qu’un tel envoi n’encourage le Japon à se lancer dans une nouvelle aventure militaire dans le nord.

Les alliés ont proposé la cession d’un porte-avions mais ce projet n’à été mené à bien et le groupe aérien de feu l’Orel à été employé à terre depuis la région de Mourmansk.

Endommagé à plusieurs reprises de manière accidentelle puis par l’ennemi japonais (un coup à toucher par une batterie côtière en mai 1954, un kamikaze tombé à l’eau à la proue en juin 1954), le porte-avions participe à l’offensive en Mandchourie, effectuant des missions d’appui-rapproché, l’aviation japonaise de Mandchourie et l’armée de l’air du Mandchoukhouo ne représentant plus qu’une menace résiduelle.

Après une assez longue carrière, l’Ulianovsk est désarmé le 17 mars 1965 après quinze ans de carrière. Il semble que la Chine à été un temps intéressée par son acquisition avant d’y renoncer le deuxième porte-avions soviétique étant démantelé au cours des années soixante-dix.

Caractéristiques Techniques

Déplacement : standard 23700 tonnes pleine charge 32150 tonnes

Dimensions : longueur 224m largeur 27.9m tirant d’eau 8.4m

Propulsion : quatre groupes de turbines à engrenages alimentées en vapeur par huit chaudières développant 200000ch et entraînant quatre hélices

Performances : vitesse maximale 30 nœuds distance franchissable 10000 miles nautiques à 18 nœuds

Protection : ceinture blindée 63 à 101mm cloisons 100mm pont du hangar et pont principal 38mm îlot 25 à 38mm appareil à gouverner 63mm

Armement : huit canons de 130mm modèle 1936 en quatre affûts doubles (deux à tribord avant et deux à bâbord avant), douze canons de 37 70-K en six affûts doubles (tribord arrière et bâbord arrière) et seize canons de 25mm 110-PM en huit affûts doubles (deux à tribord avant, deux à bâbord avant, deux à tribord arrière et deux à bâbord avant)

Installations Aéronautiques : pont d’envol droit de 225m de long sur 22m de laege relié au hangar par trois ascenseurs carrés de 15m de long par 17m de large, six brins d’arrêts, une catapulte

Groupe aérien : trente à soixante appareils. Lors de sa mise en service un porte-avions de classe Orel était équipé de seize chasseurs Yakovlev Yak-9K, de douze bombardiers en piqué Illiouchine Il-2 Sturmovik et de seize bombardier-torpilleurs Tupolev PT-M-75 soit quarante-quatre appareils. Le nombre peut être augmenté en cas de besoin

Equipage : 2125 officiers et marins

Projets n’ayant pas aboutis

Durant le second conflit mondial, l’URSS comme l’Italie n’à mis en œuvre que deux porte-avions ce qui n’à empêché ni Moscou ni Rome de travailler sur de nombreux projets une fois le porte-avions considéré comme indispensable pour toute marine digne de ce nom. Parlons néanmoins d’abord des projets antérieurs aux Orel.

Le premier projet baptisé Projet 71 qui reprenait la coque des croiseurs légers de classe Tchapaev, les croiseurs légers standards de la marine soviétique. De ce projet à débouché le Projet 71A, un porte-avions de 215m de long, de 10600 tonnes, filant à 33.7 noeuds, une DCA composée de 8 canons de 100mm et un groupe aérien de 30 appareils.

Une autre étude baptisée Projet 71B donnait un navire de 24000 tonnes, filant à 32.3 noeuds avec une DCA de 16 canons de 130mm et un groupe aérien de 70 appareils soit assez proche du projet adopté pour les Orel.

A la même époque comme probablement toutes les marines, la marine soviétique étudia le croiseur porte-avions (d’autres étudièrent le cuirassé porte-avions) ce qui aurait donné un navire de 256m de long, 27000 tonnes, 36 nœuds (!), neuf canons de 305mm (probablement en trois tourelles triples), seize canons de 130mm avec un groupe aérien embarqué de soixante appareils.

Après la construction des deux porte-avions de classe Orel, les partisans soviétiques des ponts plats espérèrent la construction de nouvelles unités pour permettre à toutes les flottes de disposer d’au moins une unité (même si il aurait fallu gérer les conventions des détroits turcs qui interdisait le passage de porte-avions par les Dardanelles et le Bosphore) mais malheureusement le programme naval de 1947 ne prévoyait pas de nouveaux porte-avions.

Si cela avait été le cas il est probable qu’ils auraient été différents des Orel. Deux projets ont été étudiés, les projets 73 et 74. Le premier nous donnait un porte-avions d’escadre de 40800 tonnes avec 110 appareils (70 chasseurs et 40 avion-torpilleurs) alors que le second était un porte-avions d’escadre de 30560 tonnes qui semble être une version améliorée des Orel en tirant les premières leçons de leur utilisation.

 

Un nouveau projet est étudié à la fin du conflit, le projet 85, un porte-avions de 25000 tonnes, une vitesse de 31 à 35 nœuds, une distance franchissable de 5000 miles nautiques à 18 nœuds avec un groupe aérien de 50 à 70 appareils.

Ce projet ne fût pas mené à bien mais il servit de base de travail au projet 89 qui allait aboutir à la classe Orel. C’est ainsi que deux porte-avions de 23000 tonnes sont remplacés par quatre porte-avions de 60000 tonnes baptisés Orel Poltava Petropavlosk et Sevastopol, des navires qui vont servir jusqu’à la chute de l’URSS en 1991 mais ceci est une autre histoire.

porte-avions orel

Maquette du porte-avions Orel

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