Italie (19) Cuirassés et croiseurs de bataille (1)

CUIRASSES ET CROISEURS DE BATAILLE

Une histoire des cuirassés italiens

Panorama

Comme nous l’avons à de nombreuses reprises le combat naval à d’abord ressemblé à une extension du combat terrestre sur des flots déchaînés avant de prendre son envol, son autonomie en adoptant un caractère nettement plus spécifique.

A l’origine de cette révolution, l’artillerie qui rendit illusoire l’abordage autrement que dans le contexte particulier des opérations de course et de piraterie. Désormais les batailles navales voyaient s’affronter en escadre des navires toujours plus gros, embarquant parfois plus de cent pièces d’artillerie (même si au XVIIIème siècle le «74 canons» devint une quasi-norme internationale).

Ces navires imposant le combat en ligne, on vit apparaître l’expression «navire de ligne», une dénomination longtemps conservée par la France pour désigner le cuirassé.

Si les marines françaises, britanniques,espagnoles et néerlandaises s’équipèrent d’un grand nombre de navires de ligne pour tenter d’obtenir la maîtrise des océans, les états italiens restèrent dans ce domaine en retrait tant un tel navire coûtait une petite fortune à construire mais également à entretenir.

Avec l’apparition de la coque en fer et de la machine à vapeur, le capital ship évolua vers de nouveaux types de navires.

Lissa 20 juillet 1866

tableau représentant la bataille de Lissa (1866)

Si les monitor ou cuirassés garde-côtes restèrent marginaux et minoritaires, le cuirassé à coque en fer ou ironclad battleship fût construit en très grand nombre y compris par l’Italie qui en 1866 au moment de la bataille de Lissa possédait une marine moderne mais comme la suite des événements le démontrera une marine moderne mal entraînée et mal conduite ne sert à rien.

Le cuirassé à coque en fer évolua avec l’apparition de la tourelle rotative qui permettait d’augmenter le nombre de pièces axiales même si ces cuirassés appelés après 1905 pré-dreadnought disposaient le plus souvent de seulement quatre canons de fort calibre (le plus souvent du 305mm) en deux tourelles doubles, le reste de l’armement se composant de canons médians de plus ou moins forts calibres en tourelles ou en casemates.

Après plusieurs années de débat, les cuirassés à artillerie principale hétérogène cédèrent la place à des cuirassés disposant d’une artillerie principale homogène ayant pour nom générique le nom du premier navire mis en service à savoir le HMS Dreadnought.

A ces dreadnought allaient succéder des superdreadnought mais l’Italie lancée trop tard rata le coche, les quatre unités de classe Francesco Caracciolo n’étant jamais mis en service. Il faudra attendre les années trente et les Littorio pour que l’Italie possède des cuirassés aussi puissants que ceux de ses voisins.

Les prédreadnought de la Regia Marina

Comme les autres marines majeures, la marine italienne va s’équiper dans le dernier quart du dix-neuvième siècle de cuirassés disposant d’une artillerie hétérogène, des cuirassés appelés après 1905 des prédreadnought en référence au premier All Big Gun Battleship, le HMS Dreadnought.

Quatorze navires répartis en cinq classes vont ainsi former le cœur de la puissance maritime italienne jusqu’au premier conflit mondial.

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Ruggiero di Lauria

La première classe de cuirassés type prédreadnought était la classe Ruggiero di Lauria, une classe de trois navires baptisés Ruggiero de Lauria, Francesco Morosini et Andrea Doria. Ces navires sont mis en service respectivement en février 1888, en août 1889 et en mai 1891. Leur construction à été tellement lente qu’ils sont obsolètes lors de leur mise en service.

Retirés du service actif en 1909/11 (en seconde ligne depuis 1904/05) ils connurent des sorts différents étant transformés en bâtiment-cible (Francesco Morosini), en citerne flottante (Ruggierio di Lauria) et en bâtiment-dépôt (Andrea Doria).

Durant le premier conflit mondial, l’Andrea Doria servit de batterie flottante avant d’être transformé en citerne flottante, étant envoyé à la démolition en 1929. Le Ruggierio di Lauria fût démoli en 1942 et le Francesco Morosini en 1944.

Caractéristiques Techniques

Déplacement à pleine charge 10997 tonnes Dimensions : longueur 105.9m largeur 19.84m tirant d’eau 8.29 à 8.37m Vitesse maximale 16-17 nœuds distance franchissable 2800 miles nautiques à 10 nœuds Armement : quatre canons de 432mm en deux tourelles doubles deux canons de 152mm, quatre tubes lance-torpilles de 356mm sous-marins Equipage : 507-509 officiers et marins

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Le  Sardegna

 

La deuxième classe de prédreadnought italiens est la classe Re Umberto, une classe de trois navires baptisés Re Umberto, Sardegna et Sicilia mis en service respectivement en février 1893, en mai 1895 et en février 1895.

Mis en réserve en 1905, ces navires furent utilisés comme navires-écoles puis au moment de la guerre italo-turque de 1911/1912 de monitor et de transport de troupes.

Durant le premier conflit mondial, le Sardegna fût utilisé comme navire de défense à Venise, le Re Umberto fût utilisé comme batterie flottante à Brindisi alors que le Sicilia servait de bâtiment-dépôt. Les trois navires furent détruits au début des années 20.

Caractéristiques Techniques

Déplacement à pleine charge 15210 tonnes Dimensions : longueur 127.6m largeur 23.4m tirant d’eau 9.3m Vitesse maximale 18.5 nœuds distance franchissable 4 à 6000 miles nautiques (vitesse inconnue) Armement : quatre canons de 343mm en deux tourelles doubles, huit canons de 152mm, 16 canons de 120mm, 16 canons de 57mm, 10 canons de 37mm, cinq tubes lance-torpilles de 450mm Equipage : 733 officiers et marins

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Le Emanuele Filiberto

Aux Re Umberto succèdent la classe Ammiraglio di Saint Bon, une classe de deux navires mis en service au début du vingtième siècle à savoir mai 1901 pour l’Ammiraglio di Saint Bon et avril 1902 pour son sister-ship Emanuele Filiberto.

Ces navires participèrent à la guerre italo-turque (1911/12) qu’il s’agisse des offensives contre la Libye mais également contre Rhodes. Réduits à des rôles de défense côtière quand éclate le premier conflit mondial, ils passent le conflit à Venise avant d’être démolis en 1920.

Caractéristiques Techniques

Déplacement à pleine charge 10700 tonnes Dimensions : longueur 112m largeur 21m tirant d’eau 8m Vitesse maximale 18.3 nœuds distance franchissable 5500 miles nautiques à 10 nœuds Armement : quatre canons de 254mm en deux tourelles doubles huit canons de 152mm huit canons de 120mm huit canons de 57mm deux canons de 37mm, quatre tubes lance-torpilles de 450mm Equipage : 557 officiers et marins

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Le Regia Margherita

La classe Regia Margherita est composée également de deux navires, des cuirassés baptisés Regia Margherita et Beneditto Brin mis en service respectivement en avril 1904 et septembre 1905.

Ces navires vont participer à la guerre italo-turque de 1911/12 appuyant la conquête de la Cyrenaïque ainsi que des opérations en Méditerranée orientale. Réduits ensuite au statut de navire-école, ils furent coulés durant le conflit, le premier sautant sur une mine dans la nuit du 11 au 12 décembre 1916 (675 morts) alors que le second est victime d’une explosion à Brindisi le 27 septembre 1915 (454 morts).

Caractéristiques Techniques

Déplacement à pleine charge 14737 tonnes Dimensions : longueur 138.65m largeur 23.84m tirant d’eau 9m Vitesse maximale 20 nœuds distance franchissable 10000 miles nautiques à 10 nœuds Armement : quatre canons de 305mm en deux tourelles doubles, quatre canons de 203mm, douze canons de 152mm, vingt canons de 76mm,deux canons de 47mm, deux canons de 37mm, quatre tubes lance-torpilles de 450mm Equipage : 812 à 900 officiers et marins

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Le Roma

La classe Regio Elena composée de quatre navires succède à l’infortunée classe Regia Margherita, des navires baptisés Vittorio Emanuelle, Regina Elena, Napoli et Roma dont le seul titre de gloire est d’être les derniers prédreadnought de la Regia Marina. Ils sont mis en service respectivement en septembre 1907, en août 1908, en décembre 1908 et en septembre 1908.

Dessinés par Vittorio Cuniberti, ils participent à la guerre italo-turque en 1911/1912, appuyant les troupes au sol faute d’affrontement avec la marine ottomane. Ils participent au premier conflit mondial opérant depuis Tarente, Brindisi et Valona (Albanie) avant d’être démolis dans les années vingt.

Caractéristiques Techniques

Déplacement à pleine charge 14029 tonnes Dimensions : longueur 144.6m largeur 22.4m tirant d’eau 8.58m Vitesse maximale 22 nœuds distance franchissable 10000 miles nautiques à 10 nœuds Armement : deux canons de 305mm, douze canons de 203mm, seize canons de 76mm et deux tubes lance-torpilles de 450mm Equipage : 742 à 764 officiers et marins

Le Dante Alighieri : le premier

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Le Dante Alighieri

Au début du vingtième siècle, la portée de l’artillerie ne cessait d’augmenter, compliquant la tâche des officiers et des marins chargés de la conduite de tir. De plus l’hétérogénéité des calibres posait des problèmes de stockage et de manutention.

Peu à peu émergea l’idée d’un cuirassé rapide, bien protégé et disposant d’une artillerie homogène, un concept dont la paternité est disputé entre plusieurs grands officiers de marine. Si le bouillant amiral Fisher est le plus connu, il ne faut pas négliger l’apport de Vittorio Cuniberti, un officier et ingénieur italien qui publia en 1903 un article dans la revue Jane’s Figthing Ship décrivant le cuirassé de ses rêves.

Le navire imaginé par Cunibertti aurait déplacé 15000 tonnes, aurait été armé de douze canons de 305mm (quatre en deux tourelles doubles _une à l’avant et une à l’arrière_ et quatre en tourelles simples installées aux quatre coins de la coque), une ceinture blindée de 300mm et une vitesse élevée à savoir 24 nœuds.

Le choix du calibre s’explique par le fait que le canon de 305mm (12 pouces) est pour ainsi dire un calibre standard dans cette catégorie de navires, la protection s’expliquant par le fait qu’on estime nécessaire que le cuirassé soit protégée contre le calibre de sa propre artillerie) alors que la vitesse de 24 nœuds doit permettre au cuirassé de choisir ou non d’engager le combat.

Hélas pour le sieur Cuniberti l’Italie était un pays pauvre et il fallut attendre de nombreuses années pour que la Regia Marina se lance dans la course au dreadnought après la Grande-Bretagne, les Etats-Unis, l’Allemagne et avant la France.

Piètre consolation c’est Vittorio Cuniberti qui conseilla le contre-amiral Masdea pour la réalisation des plans du premier cuirassé italien à artillerie principale monocalibre. Ce navire qui allait être baptisé Dante Alighieri en référence à l’auteur de la Divine Comedie et considéré comme le père de la langue italienne (qui puisa son origine dans le toscan).

Si le Dante Alighieri n’est pas le premier dreadnought de l’histoire, il peut néanmoins se targuer d’être le premier cuirassé à utiliser la tourelle triple. Ce choix s’explique par la crainte de l’effet de souffle d’une tourelle superposée sur l’autre et inversement.

C’est pour cela que le sieur Cunibertti refusait les tourelles superposées mais comment garder une batterie suffisamment puissante sans aboutir à une coque trop longue pour être efficacement protégée ?

L’ingénieur sélectionna la tourelle triple qui permettait avec quatre unités de garder une puissante batterie avec douze canons comparable à d’autres cuirassés disposant d’une configuration plus traditionnelle. A cela s’ajoutait des superstructures réduites au minimun pour augmenter le champ de tir.

Le Dante Alighieri est mis sur cale à l’Arsenal Royal de Castellammare di Stabia près de Naples le 6 juin 1909 lancé le 20 août 1910 et mis en service le 15 janvier 1913. Après une carrière sans événements saillants, le premier all big gun battleship de la marine italienne est retiré du service actif le 1er juillet 1928 pour permettre à Rome de respecter le traité de Washington (1922) et aussi pour des raisons bassement financières.

Caractéristiques Techniques

Déplacement : standard 19500 tonnes pleine charge 21800 tonnes

Dimensions : longueur hors tout : 168.10m largeur : 26.60m tirant d’eau : 9.20m

Propulsion : Quatre groupes de turbines à engrenages Parson alimentées par 23 chaudières (7 fonctionnant au fioul et 16 pouvant fonctionner au fioul et au charbon) développant une puissance totale de 32000ch et entraînant 4 hélices.

Performances : vitesse maximale : 23 noeuds distance franchissable : 4800 miles nautiques à 10 noeuds

Protection : ceinture blindée de 254mm, pont blindé 38mm, tourelles blindées à 254mm, les canons de 120mm en casemates à 98mm et enfin le bloc passerelle à 305mm.

Armement : 12 canons de 305mm (12 pouces) modèle 1909 répartis en quatre tourelles triples (une tourelle avant, deux tourelles centrales et une tourelle arrière), 20 canons de 120mm Oto Melara modèle 1909 en douze casemaltes latéraux et huit en quatre tourelles doubles, 13 canons de 76mm et 3 tubes lance-torpilles de 450mm

Equipage : 970 officiers et matelots

Des dreadnought ou des superdreadnought : les Conte di Cavour et les Andrea Doria

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Le Leonardo da Vinci

Le début du vingtième siècle voit l’augmentation des tensions entre l’Italie et l’Autriche-Hongrie. Une guerre entre Rome et Vienne devient possible imposant un investissement majeur dans le domaine des cuirassés pour une éventuelle revanche de la bataille de Lissa qui en 1866 avait vu la marine italienne subir une lourde défaite.

Après la construction du Dante Alighieri impossible pour la marine italienne de s’endormir sur ses lauriers. De nouveaux cuirassés doivent être construits en l’occurrence trois unités de classe Conte di Cavour et deux unités formant la classe Andrea Doria.

Comme j’étudierai ultérieurement en détail (ou presque) l’historique de ces navires je me bornerai à préciser leurs dates de mise en service et quelques faits saillants à savoir mai 1914 pour le Giulio Cesare et le Leonardo da Vinci, avril 1915 pour le Conte di Cavour, mai 1915 pour le Caio Duilio et mars 1916 pour l’Andrea Doria.

Sur ces cinq cuirassés que l’on pourrait presque regrouper dans une même classe, quatre survivent au premier conflit mondial, n’ayant pu affronter en haute mer la Königliche und Kaiserliche Kriegsmarine, la marine austro-hongroise qui resta tapie dans ses ports.

L’infortuné Leonardo da Vinci fût coulé à Tarente dans la nuit du 2 août 1916 par ce qui s’apparente à un sabotage ennemi. L’épave fût relevée en 1919 au prix d’efforts colossaux mais qui permis aux italiens d’acquérir une précieuse expérience très demandée.

Ces efforts restèrent finalement vint puisque pour des raisons à la fois politiques (traité de Washington de 1922) et financières (crise économique, budgets militaires en baisse) le navire ne fût jamais reconstruit et finalement démoli.

Les quatre autres furent eux gardés en service (avec parfois des passages en réserve ou comme navire-école) avant d’être refondus au cours des années trente, de 1933 à 1937 pour les Cavour, de 1937 à 1940 pour les Doria ce qui explique pourquoi ces quatre vétérans étaient toujours en service en septembre 1948 quand éclata le second conflit mondial.

Du Francesco Caracciolo aux Littorio ou la recherche du meilleur cuirassé pour la marine italienne

Après la construction du Dreadnought et de ses dérivés, la Royal Navy chercha comment garder sa supériorité sur les océans du monde en ces temps bénis du Britannia rules the wave. A l’époque, la politique navale britannique était le Two Pounder Standard plus ten soit une marine britannique dont le tonnage serait égal à ceux des deux marines suivantes plus une marge de sécurité de 10%.

Comme à l’époque le maitre-étalon de la puissance navale était le cuirassé il fallait anticiper sur l’évolution du seigneur des mers et notamment en terme de puissance de feu. Comme on ne pouvait pas augmenter indéfinément le nombre de pièces de l’artillerie principale on chercha à en augmenter la puissance unitaire.

C’est l’acte de naissance du superdreadnought. Le premier d’entre-eux est également britannique en l’occurence le HMS Orion qui disposait de dix canons de 343mm en cinq tourelles doubles (deux axiales avant, une centrale, deux axiales arrières).

Les grandes marines contraintes et forcées se lancèrent dans cette nouvelle course avec la classe New-York pour l’US Navy (canons de 356mm), la classe Bretagne pour la France (canons de 340mm) et la classe Heligoland (canons de 305mm) pour l’Allemagne, cette dernière ayant longtemps armé ses cuirassés de canons de 280mm.

Et l’Italie dans tout ça ? C’est là que le débat peut s’ouvrir. Avec leurs treize pièces de 305mm peut-on considérer les Cavour et les Doria comme des superdreadnought. Pour moi c’est non puisque leur artillerie est identique à un dreadnought.

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Le Francesco Caracciolo fût bien lancé mais uniquement pour libérer la cale

L’Italie va donc commencer et terminer le premier conflit mondial sans cuirassés type superdreadnought, la première guerre mondiale ayant perturbé puis stoppé la construction de quatre unités de classe Francesco Caracciolo (un peu comme elle avait stoppé la construction des Normandie et des Lyon en France).

Ces quatre navires baptisés Francesco Caracciolo Francesco Morosini Cristoforo Colombo Marcantonio Colonna ont été considérés comme l’équivalent italien des Queen Elizabeth britanniques avec une vitesse élevée (28 nœuds en théorie) et un puissant armement avec huit canons de 381mm en quatre tourelles doubles axiales.

Aucun navire à été mis en service, trois ayant été démantelés sur cale. Le plus avancé le Francesco Caracciolo fût bien lancé le 12 mai 1920 mais il s’agissait simplement de libérer la cale.

Il y eut bien un projet de transformation en porte-avions mais à l’époque la Regia Marina ne s’y intéressait pas vraiment et la coque finit par aller à la feraille. Les canons fabriqués ont été réutilisés à bord des monitors Faa di Bruno et Alfredo Cappellini ainsi que des pontons Sabotino, Monte Santo, Monte Grappa, Montello et Monte Novegno.

Caractéristiques Techniques des Francesco Caracciolo

Déplacement : standard 34000 tonnes Dimensions : longueur 210m largeur 29m tirant d’eau 9.4m

Propulsion : 4 groupes de turbines alimentées par 20 chaudières développant une puissance totale de 105000ch et actionnant 4 hélices

Performances : vitesse maximale : 28 noeuds distance franchissable : 6000 miles nautiques à 10 noeuds

Protection : ceinture 300mm tourelles 400mm passerelle 350mm pont blindé 35mm

Armement : 8 canons de 381mm modèle 1914 en quatre tourelles doubles axiales (deux avant et deux arrières), 18 canons de 152mm modèle 1908 en casemates, 12 canons de 40mm modèle 1917.

Equipage : 1480 hommes

Le traité de Washington signé le 6 février 1922 accordait à l’Italie 182000 tonnes de cuirassés et une dérogation pour construire un cuirassé destiné à remplacer le Leonardo da Vinci mais comme la France qui disposait d’une telle dérogation pour remplacer le France, l’Italie n’exerça pas cette option faute de moyens mais probablement aussi de crainte de se tromper sur son choix en matière de cuirassé.

Les études vont cependant être nombreuses pour être prêts le jour où la construction de cuirassés serait de nouveau possible. Si à l’origine la battleship holiday devait s’achever en 1931, le traité de Londres signé en avril 1930 reportait la reprise de la construction de ces navires à 1936.

Le projet le plus abouti fût un cuirassé rapide de 23000 tonnes filant à 28/29 nœuds armé de six canons de 381mm en trois tourelles doubles. En 1928 changement d’optique avec un navire de 36000 tonnes armés de six canons de 16 pouces, un navire unique qui devait être suivis de trois navires plus petits de 23000 tonnes.

Alors que les italiens travaillaient sur un navire de 18000 tonnes armés de six canons de 343mm en deux tourelles triples, l’apparition du Deutschland allemand disposant de six canons de 280mm puis l’apparition du Dunkerque avec ses six canons de 330mm bouleversa leurs plans et leurs certitudes, obligeant les ingénieurs maritimes italiens à dessiner un navire plus gros (26900 tonnes) et mieux armés (huit canons de 343mm) mais ce projet ne tarda pas à être remplacé par un navire de 35000 tonnes armés de canons de 406mm.

Dévelloper un canon de cuirassé prend du temps or il n’existait pas de plans de canons de 16 pouces disponibles en Italie. Comme les plans de pièces de 381mm existaient, les nouveaux cuirassés allaient être armés de neuf canons de 381mm en trois tourelles triples.

Le 11 juin 1934 l’agence de presse Stefani annonce que l’Italie à décidé de construire deux cuirassés de 35000 tonnes, cuirassés baptisés Littorio et Vittorio Veneto.

BB Littorio

Le cuirassé Littorio fût à l’origine de la construction des trois Richelieu

Ces deux navires qui sont une réponse directe aux Dunkerque et Strasbourg vont relancer la construction de cuirassés en Europe et dans le monde, des cuirassés famillièrement appelés «35000» pour leur tonnage très théorique car en pratique ils dépassaient allégrement les 40000 tonnes.

A l’annonce de la construction des deux premiers Littorio, la marine française passe commande de deux cuirassés armés de huit canons de 380mm en deux tourelles quadruples concentrées à l’avant, des navires baptisés Richelieu et Jean Bart.

Les italiens décident alors de commander deux Littorio supplémentaires, des navires baptisés Roma et Impero ce qui entraine la commande par la France de deux cuirassés, un troisième Richelieu baptisé Clemenceau et un navire d’un type différent, le Gascogne qui disposait d’une tourelle quadruple à l’avant et d’une tourelle quadruple à l’arrière.

Ces quatre cuirassés sont ainsi mis en service en mai 1940 (Littorio) en janvier 1941 (Vittorio Veneto), en mars 1943 (Roma) et enfin en septembre 1945 pour l’Impero.

Ce n’est pas finit car à l’annonce de la reconstruction des Bretagne l’Italie prend la décision de construire de nouveaux Littorio mais à canons de 406mm en s’inspirant de canons mis au point pour les cuirassés soviétiques de classe Sovietsky Soyouz.

 

Ces deux navires baptisés Francesco Caracciolo et Marcantonio Colonna sont mis en service en septembre 1945 et octobre 1947. La construction de ces navires n’entraîne pas une réaction française directe mais plutôt indirecte, la décision de construire les Province (ou classe Alsace) étant considérée comme suffisante pour faire face à ces deux nouvelles unités.

En septembre 1948 la Regia Marina aligne dix cuirassés modernes et puissants qui n’ont pas grand chose à envier à leurs homologues français et britanniques. Reste à savoir si ils seront à la hauteur de la mission qui leur ait confié.

Septembre 1948-Septembre 1954 : de l’apogée au crépuscule

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Le Conte di Cavour

En septembre 1948 la Regia Marina aligne dix cuirassés, les deux Contre di Cavour, les deux Andrea Doria, les quatre Littorio et les deux Francesco Caracciolo. La flotte est donc hétérogène avec quatre vétérans ayant plus de trente années de carrière et six unités ultra-modernes disposant de puissants canons de 381 et de 406mm.

Face à ces dix cuirassés, la Flotte de la Méditerranée aligne un total de dix cuirassés même si les deux derniers sont davantage chargés de protéger les porte-avions Joffre et Commandant Teste (Richelieu Jean Bart Clemenceau Alsace Flandre Bourgogne Dunkerque Strasbourg Provence Bretagne) auxquels il faut ajouter six cuirassés britanniques (Nelson Rodney Prince of Wales Duke of York Barham Valiant).

Seize cuirassés contre dix cuirassés italiens, un rapport de 1 pour 1.6 sur le papier mais même si tous les cuirassés alliés ne pouvaient être disponibles à un instant T pour opposer toute leur puissance aux cuirassés italiens.

Cette infériorité est renforcée par la division du corps de bataille entre deux escadres, la Primera Squadra Navale stationnée à La Spezia en Ligurie au sud de Gênes et la Secunda Squadra Navale stationnée à Tarente dans les Pouilles.

Les dix cuirassés sont répartis en divisions, les Divisione de navi de battaglia, la 1ère escadre disposant des 5ème et des 9ème division, la première regroupant le Giulio Cesare et le Conte di Cavour alors que la seconde regroupe le Littorio et le Vittorio Veneto. A noter que le Giulio Cesare est également le navire-amiral de la 1ère escadre.

La 2ème escadre navale dispose de trois divisione de navi de battaglia, la 1ère division regroupant les Francesco Caracciolo et Marcantonio Colonna, la 3ème division les Andrea Doria et Caio Duilio alors que la 7ème division engerbe les cuirassés Roma et Impero.

Les différents belligérants espèrent un affrontement majeur, un Jutland méditerranéen (avec néanmoins des résultats plus probants) mais au final le conflit méditerranéen sera une succession d’opérations, tordant le cou au concept pernicieux de la «bataille décisive», un concept inepte à l’heure de la guerre industrielle. Hélas pour eux les allemands et les japonais l’ont compris beaucoup trop tard…… .

Adoptant une stratégie de Fleet-in-Being, la marine italienne hésite à engager massivement ses cuirassés sachant très bien que la perte d’une telle unité serait irremplaçable à la différence des alliés qui ont mis en service des cuirassés, le Languedoc et le Moselle côté français, les Saint George et Saint Andrew côté britannique.

Sur les dix cuirassés en service en septembre 1948, six sont coulés et quatre survivent au conflit c’est à dire jusqu’au basculement de l’Italie dans le camp allié (avril 1953).

Les quatre survivants sont les Giulio Cesare Caio Duilio Roma et Dante Alighieri (ex-Littorio), ces quatre navires qui avaient miraculeusement échappé aux bombardements alliés s’étaient réfugiés à Bari. Ils vont rallier Malte puis Bizerte où ils vont être internés jusqu’à la fin du conflit, les alliés ne donnant pas suite à la proposition italienne d’envoyer les Roma et Dante Alighieri dans le Pacifique.

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Le Roma fût l’un des cuirassés à survivre au conflit

Leur sort est tranché au traité de Paris. La Marina Militare peut conserver le Roma et le Giulio Cesare, le Dante Alighieri étant cédé à la France qui procède à son démantèlement tandis que le Caio Duilio est cédé à la Grande-Bretagne qui le vend également à la démolition. Les deux cuirassés conservés par les italiens sont utilisés jusqu’en 1967 quand ils sont désarmés et démolis à La Spezia.

L’Andrea Doria est coulé par un sous-marin français au large de Tarente en janvier 1949, une salve de quatre torpilles étant fatale au cuirassé alors que le Conte di Cavour est coulé par l’aviation embarquée française à La Spezia le 15 janvier 1949, six bombes et quatre torpilles provoquant le naufrage du cuirassé qui est relevé (opération JUDGMENT/JUGEMENT).

Son état est tel que les italiens renoncent à sa remise en état. Il va servir de cible aux bombardiers français et britanniques, étant définitivement coulé en mars 1952. l’épave est relevée et démolie après guerre.

Le Vittiorio Veneto est coulé lors de l’opération MERKUR au large du cap Corse alors qu’il couvrait le passage d’un convoi de renfort en direction de Bastia. Il se sacrifie face aux cuirassés et croiseurs lourds français, la deuxième unité de classe Littorio étant coulée par les obus du Richelieu et du croiseur lourd Algérie sans compter les torpilles des contre-torpilleurs et des torpilleurs français pour achever l’orgueil de la marine italienne.

L’Impero est coulé au cours de la bataille du golfe de Zanthe, victime des obus de 406mm du Nelson, de 381mm du Valiant et du 356mm du Prince of Wales, les obus des cuirassés aggravant les dégâts préliminaires causés par l’aviation embarquée alliée.

Au cours de cette même bataille le Francesco Caracciolo est gravement endommagé par l’aviation et des obus de croiseurs lourds britanniques. Échappant de peu à la destruction il se réfugie à Bari ce qui constitue pour ces marins un véritable miracle.

Hâtivement réparé, il est ramené tant bien que mal à Venise pour être entièrement remis en état mais le 14 septembre 1952 un bombardement franco-anglais frappe Venise, touchant le cuirassé qui après avoir encaissé six bombes chavire dans la lagune, l’épave est relevée après guerre et démantelée.

Le Marcantonio Colonna stationné à Tarente est bombardé à plusieurs reprises. Il sort également pour couvrir des unités légères. Il est coulé par petits fonds à Tarente le 26 décembre 1952 lors des bombardements préparatoires à l’opération SKYLOCK. Huit bombes et trois torpilles sont fatales au cuirassé qui se défend en abattant huit avions. Relevé après guerre, il est démantelé.

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